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«La première étape : c’est d’accepter sa douleur»


Odile Dufour et Romain Delle Vedove expliquent aux patients comment fonctionnent des appareils tels que Tens, un aappareil de neuro stimulation électrique transcutanée. Photo : François Ausemms

C’est dans le cadre de la journée européenne de la Douleur, que de nombreux stands informatifs ont été installés ce lundi matin dans le hall du Centre hospitalier de Luxembourg. Des infirmiers et psychologues spécialisés étaient présents pour informer les passants notamment sur la gestion de la douleur.

«On ne doit jamais nier la douleur du patient. Même si elle ne se voit pas, elle existe.» Odile Dufour est infirmière au Centre de la douleur de Luxembourg. Tous les jours, elle reçoit une «multitude de patients aux pathologies toutes aussi différentes les unes que les autres». D’ailleurs, la première chose à faire, selon la spécialiste, «lorsque l’on souffre», c’est «d’accepter la douleur», avant d’apprendre à vivre avec et la gérer. Et il existe de nombreuses façons de le faire, quel que soit l’âge.

La douleur des enfants

Chez les enfants, de nombreuses techniques permettent de prévenir la douleur notamment dans le cadre de soins précis, qu’ils soient douloureux ou désagréables, comme les prises de sang, les pansements, ou la ponction sur Port-à-cath (qui sont des petits boîtiers insérés sous la peau au niveau de la poitrine, et qui permettent de faciliter l’administration du traitement en chimiothérapie).  «On peut prescrire des médicaments mais aussi utiliser des patchs, de la sucrine, ou même une crème anesthésiante quand il faut piquer un enfant pour une prise de sang par exemple», indique Angeline Gallo, infirmière anesthésiste aux urgences.

Pour éviter que le stress ne s’ajoute à la douleur, et ne l’amplifie, «il est également très important de focaliser l’attention de l’enfant sur autre chose. «On peut donc lui proposer de dessiner sur une peluche, de faire des bulles, on peut lui raconter une histoire, faire travailler son imaginaire et même aller jusqu’à l’hypnose», explique la spécialiste.

Car une douleur «sur laquelle on se concentre», dit-elle, est une douleur plus forte, même chez les adultes.

Chez les adultes

D’un stand à un autre, les professionnels de la santé présents pour cette journée européenne ont eu à cœur d’échanger avec toute personne soucieuse de comprendre les mécanismes compliqués de la douleur. Certains ont abordé sa gestion par la sophrologie, comme Nathalie Herreman, infirmière et sophrologue spécialisée dans la ménopause,  par l’hypnose comme la psychologue Annick Bazzi, ou grâce à du matériel innovant, qu’ont présenté Romain Delle Vedove, infirmier, avec des appareils de péridurale et Odile Dufour avec un appareil spécifique aux migraines.

Mais comment gérer sa douleur rien qu’avec la pensée? La sophrologie, qui consiste en un ensemble de techniques de relaxation, de respiration, de mouvements corporels, de décontraction musculaire et de «visualisation» de pensées, le permet. «Elle ne supprime pas la douleur mais permet de focaliser l’attention sur autre chose que celle-ci», explique Nathalie Herreman.

«Le but est d’amener le patient à se concentrer sur ses pensées positives, d’avoir un rôle actif sur son corps», dit-elle, précisant toutefois qu’elle est plus efficace dans le cadre d’un suivi «pluridisciplinaire», ce que confirme Annick Bazzi lorsqu’elle aborde l’hypnose. «Ce ne sont pas des techniques qui font disparaître la douleur mais qui les atténuent».

D’ailleurs, comment l’hypnose fonctionne-t-elle? «Il ne faut pas imaginer l’hypnose comme la pratique Messmer, car le patient ne perd absolument pas son libre-arbitre», assure la spécialiste. «En réalité, en consultation, je demande à mes patients de fermer les yeux, d’écouter ma voix, et je les aide à mieux se concentrer sur autre chose que leurs douleur. Par exemple lorsqu’ils manquent de sommeil, ils peuvent se concentrer également sur leur respiration». Le tout est de pouvoir, à terme, «faire ses exercices à la maison» dès que la douleur ou le manque de sommeil se fait sentir.

Que répondre aux médecins et personnels soignants, qui répondent à des patients souffrant que la «douleur est dans la tête»?

«D’un point de vue purement médical, on ne peut que dire qu’elle vient de la tête puisque c’est le cerveau qui transmet l’information et émet le signal de douleur. En revanche, personne n’a le droit de dire qu’elle est imaginaire», conclut-elle.

Relaxation progressive de Jacobson et technique de Bowen

La journée européenne de la Douleur a aussi été l’occasion pour moi de participer à des ateliers de découverte de thérapies telles que la relaxation progressive de Jacobson, prodiguée par Christelle Burton, infirmière à la clinique de la douleur, ou la technique manuelle de Bowen, prodiguée par Pascaline François, également infirmière.

La relaxation progressive de Jacobson est une méthode active de relaxation qui s’appuie sur l’existence d’un lien étroit entre la tension musculaire et l’état de tension psychologique. En somme, en arrivant à un état global de relâchement musculaire, de détente physique, qui amène à une détente mentale, le patient ressort relaxé.

Ainsi, après avoir contracté les muscles de la main, des bras, du pied, on ressent la sensation agréable des muscles qui se décontractent. Et après 12 minutes seulement d’exercice au lieu de 30 ou 45 minutes, je ne peux que le conseiller! Pas question de confondre la technique de Bowen avec un simple massage que l’on pourrait se payer en centre de beauté. Les kinésithérapeutes, les ostéopathes et le personnel médical formé peuvent seuls prodiguer ce soin technique, précis, compliqué.

Allongé sur une table de massage le patient, «est traité en surface mais a pourtant des effets profonds sur le système nerveux sympathique», explique la spécialiste. «Les mouvements consistent à placer deux pouces bout à bout sur un point précis, à exercer une pression perpendiculaire aux fibres, à relâcher cette pression et à laisser le corps agir», dit-elle.

Et après une trentaine de minutes de traitement, autant dire que l’effet est édifiant. «Vous sentirez une grande fatigue juste après la séance», m’avait-elle dit avant de commencer. Elle ne s’était pas trompée.

Sarah Melis