Le projet de renaturation de la Pétrusse entre Hollerich et sa confluence avec l’Alzette dans le Grund va bientôt débuter. Mais il ne faudrait surtout pas croire que l’affaire est aussi simple que cela…
L’idée de transformer le ruisseau emprisonné dans son carcan de béton depuis 1933 n’est pas nouvelle : la volonté politique de lui rendre un cours naturel date de 2005. Ce n’est pas un hasard si cette année-là, pour la première fois, les écologistes s’installaient au collège échevinal de la capitale. Aujourd’hui, Viviane Loschetter porte ce projet loin d’être aussi évident qu’il en a l’air.
Mais, au fond, pourquoi transformer un parc qui provoque le ravissement de tous, habitants comme touristes ? Le coup de pouce décisif a été apporté par la Fédération horticole luxembourgeoise qui avait interpellé le gouvernement précédent sur l’opportunité d’organiser à Luxembourg une grande exposition horticole en 2020. Étonné, mais intéressé par la demande, l’État a depuis travaillé sur sa faisabilité et les modalités que cet évènement pourrait prendre. Le gouvernement actuel a gardé le même intérêt et le master plan est aujourd’hui finalisé. Il a été élaboré par le bureau d’architectes et d’urbanistes allemand Förderlandschaft.
«Nous avions la volonté de renaturer la Pétrusse et, lorsque nous avons appris le souhait de la fédération horticole, nous nous sommes dit qu’il serait formidable de placer le cadre de cet évènement dans la vallée, au cœur de la Ville !», avance Viviane Loschetter. La conjonction des deux facteurs a donc permis de véritablement lancer l’initiative.
Pour l’élue écologiste, soutenue par les horticulteurs, il n’est toutefois pas prévu de concevoir une exposition classique. Le caractère exceptionnel de la renaturation d’un ruisseau serpentant au cœur d’une capitale impose une thématique vertueuse. Pas question d’inviter des exposants qui présenteraient des plantes exotiques et des pratiques de jardinage allant à l’encontre d’un environnement naturel. «Nous voulons que soient mis en avant les jardins extensifs, plantés d’essences indigènes et entretenus avec des méthodes respectueuses du vivant», souligne-t-elle.
«Il faudra attendre encore cinq ans»
En sortant du béton, la Pétrusse retrouvera un lit qui, par définition, sera mouvant. «Il faudra laisser une largeur d’une dizaine de mètres de chaque côté pour absorber l’excédent d’eau lors des crues», explique Viviane Loschetter. Il ne s’agira donc pas d’une renaturation à la légère, la Pétrusse devra être libre de trouver son cours en fonction de son débit.
Pour autant, il n’est pas question de limiter l’accès à la vallée qui est sans doute le parc le plus spectaculaire de Luxembourg. «Les piétons et les cyclistes pourront s’y promener et s’y déplacer même lorsque les eaux seront hautes car des ponts et des passages sur pilotis seront installés», précise celle qui est également la présidente du groupe parlementaire déi gréng à la Chambre des députés.
Si la longueur de la renaturation n’excédera pas 1 750 mètres – entre Hollerich et le Grund –, le projet est éminemment complexe. En effet, il ne s’agit pas simplement de casser le corset de béton et de ratisser les rives pour que les travaux entrepris aient du sens. Un grand travail doit être réalisé en amont pour que la qualité de l’eau de la rivière puisse atteindre le niveau indispensable à l’accroissement de la biodiversité dans la vallée, qui reste l’objectif primordial de l’entreprise. Cela a un coût, «estimé aux alentours de 20 millions d’euros», et nécessite du temps. Il est d’ores et déjà acquis que la libération de la rivière ne sera pas célébrée en même temps que l’exposition horticole. «Il faudra atteindre encore cinq ans avant que la première partie soit terminée, prévient Viviane Loschetter. Mais nous avons un avantage : tous les terrains appartiennent déjà aux domaines de l’État ou à la Ville de Luxembourg.»
Erwan Nonet