Le collectif Transition Minett, déjà investi dans l’énergie verte, ouvre un bar associatif. Objectif : promouvoir une alimentation locale, donc écolo, et la camaraderie de la bonne bouffe !
C’est le genre d’adresse que l’on aime garder secrète. Des tables en bois, des murs d’argile («made in Terres rouges»), une baie lumineuse, des plats préparés avec les légumes de saison. Mais nous l’éventons, car c’est la vocation même de Mesa, situé au 1, rue du Moulin à Esch-sur-Alzette, que de brasser les idées et les gens. Doit-on parler d’un café, d’un restaurant, d’un espace partagé ou encore d’une épicerie de proximité ? Aucune description ne colle. Disons «bar associatif», alors.
Fondé par le collectif Transition Minett, Mesa est une application concrète de la transition écologique. « Avec l’énergie et les transports, l’alimentation est le troisième pilier qu’il faut modifier », résume Éric Lavillunière derrière le comptoir.
Le bar a ouvert en plein centre, avec la complicité de la commune, pour matérialiser ces solutions « qu’on ne voit jamais» , lâche Éric. «Tout le monde parle de transition : les dirigeants à la COP21, les médias, les spécialistes, mais les gens s’interrogent : Où est-il ce fameux changement ? Il faut lui donner plus de visibilité .»
Impossible de passer à côté de l’atmosphère à part du lieu. Quand on entre, c’est encore un autre voyage : des plats de midi bios et locaux à 10 euros. Des jus de pomme et des gâteaux maison, des légumes «moches» refusés par la grande distribution qui sont pourtant très bons, des sourires, un accueil chaleureux.
Montrer qu’une transition est possible
« Tous les concepts d’une alimentation écologique sont là, estime Éric. Pas de gâchis, une empreinte carbone réduite en achetant le moins loin possible, de la nourriture de saison. Mais notre militantisme ne prend jamais le pas sur le plaisir !»
De la viande est d’ailleurs proposée en alternative au menu végétarien de midi, « alors qu’il faut sept calories végétales pour produire une calorie animale », une aberration si l’on compte nourrir 8 milliards d’habitants d’ici 2025. Mais encore une fois, pas de sectarisme. « Surtout, la viande est luxembourgeoise, glisse Éric. Tout dans notre établissement provient d’un rayon de moins de 150 km, à part le sucre et le café. »
Une prouesse car, en passant du côté de l’épicerie, le visiteur découvre une offre complète : lentilles cultivées en Belgique, fromage de Zoufftgen (France), légumes des jardins eschois ou de la coopérative Terra-Luxembourg, farine et produits laitiers de la Grande Région et même sirop de menthe et gelée de coing maison.
À Mesa, on s’attable sans regarder sa montre. Personne ne vous mettra dehors pour une histoire de consommation à reprendre. Un coin lecture permet de se documenter sur l’agriculture de demain. On y retrouve de grandes signatures, comme celle de Pierre Rabhi, le paysan français à l’origine du mouvement des Colibris («si chacun porte sa goutte d’eau, on éteint l’incendie»), ou des penseurs anglo-saxons connus comme Rob Hopkins.
Ce dernier a d’ailleurs mis le Luxembourg à l’honneur dans un ouvrage récent. 21 histoires de transition présente un tour du monde des initiatives concrètes. Entre un reportage en Afrique du Sud et au Royaume-Uni, on tombe sur le modèle d’économie collaboratrice initié par Transition Minett à Esch-sur-Alzette. On y retrouve les panneaux solaires installés sur les bâtiments eschois depuis 2014 (26 000 kWh produits par an, sachant que la consommation en éclairage d’un logement standard tourne autour de 350 Kwh/an).
Découvrir cela en mangeant une tartine de miel de l’Ellergronn, ça donne des ailes pour sauver la planète.
Hubert Gamelon