Accueil | Luxembourg | Esch-sur-Alzette : les réfugiés ne sont plus seuls

Esch-sur-Alzette : les réfugiés ne sont plus seuls


Georges et Nick Clesen, les chevilles ouvrières du projet pour le Point info jeunes d'Esch. (Photo : Isabella Finzi)

Le Point info jeunes (PIJ) a lancé des cours de français pour les demandeurs d’asile. George, le prof, est un jeune Irakien ici depuis 2009.

Depuis deux semaines, à raison de deux fois 1h30 de cours par semaine, six demandeurs d’asile résidant à Esch-sur-Alzette profitent des cours donnés par George, jeune Irakien de 20ans arrivé au Grand-Duché il y a six ans. La grande force de cette initiative? George parle arabe, et cela change tout!

De Syrie, d’Irak, d’Érythrée, du Soudan… Les demandeurs d’asile affluent dans toute l’Europe. Au Luxembourg aussi. S’il est évidemment primordial de poser en premier lieu la question des structures d’accueil, avoir un toit n’est pourtant que la première étape d’une période forcément compliquée pour ces migrants forcés qui arrivent en territoire inconnu après un périple cauchemardesque.

La première barrière à laquelle ils sont confrontés, c’est celle de la langue. Si accueillant soit-il, le Luxembourg ne compte que très peu de locuteurs maîtrisant l’arabe. Or il s’agit de la langue maternelle de la plupart des arrivants. Les papiers qui permettent d’obtenir le statut de réfugié ne sont pas proposés dans cette traduction. Et le délai d’attente pour les obtenir est très long… Si une directive européenne indique que la réponse de l’administration ne peut excéder neuf mois, dans les faits, les demandeurs d’asile patientent parfois plus que cela.

Cette réalité a sauté aux yeux du Point info jeunes de la Métropole du fer lorsqu’à la fin du mois d’août, un petit groupe de demandeurs d’asile conseillé par une assistante sociale les a encouragés à frapper à la porte de leur local de la rue du Commerce. «Pour nous, c’était une situation tout à fait nouvelle», reconnaît Nick Clesen, étudiant en sciences sociales à Vienne qui effectue en ce moment un stage au PIJ et qui a pris en main le dossier. Car au PIJ, on a une conscience sociale développée.

«Nous avons commencé par contacter la Croix-Rouge pour qu’elle nous conseille», explique-t-il. Et il s’est avéré que le chantier que le PIJ pouvait mettre en place le plus rapidement, c’était celui des cours de langue. Ainsi, depuis quinze jours, six demandeurs d’asile habitant dans un centre eschois se rendent deux fois par semaine au PIJ.

Leur prof, c’est George, un Irakien de 20 ans qui va lancer avec ce projet son service volontaire civique. Lui aussi a connu l’expérience du déracinement. «Je suis arrivé ici à la fin 2009, après être passé par la Syrie», explique le Rumelangeois, ravi de pouvoir partager son français avec ses élèves. «Je me sens bien lorsque je donne mes cours parce que je sais que c’est utile. Lorsque je suis arrivé, j’aurais aimé pouvoir en profiter aussi», se souvient-il.

À la découverte du Luxembourg

Il est d’ailleurs admiratif de l’effort qu’ils réalisent : «Ils ont vraiment envie d’apprendre et ils progressent très vite.» Le fait de parler arabe avec eux change beaucoup de choses. «Ils se sentent plus à l’aise, avec moi et ils n’hésitent pas à me poser des questions sur le Luxembourg», avance George, qui peut également leur donner un coup de main pour accomplir toutes les démarches administratives.

Les demandeurs d’asile qui fréquentent le PIJ ne se retrouvent pas uniquement pour les cours de langue. Les coordinateurs leur concoctent spécialement un programme de découverte tous azimuts. «Nous sommes allés jouer au foot, avons fait du graffiti avec le projet Hariko, Sales-Lentz nous a offert des tickets pour faire un tour de Luxembourg dans un bus hop-on, hop-off et nous avons également fait un tour du pays en minibus», énumère Nick Clesen.

Lorsqu’ils sont allés se procurer un Kulturpass à la Kulturfabrik, le directeur administratif René Penning en a profité pour offrir des places pour le concert d’Hindi Zahra, mercredi dernier, à tout le monde!

Alors que les propositions de bénévoles affluent, «le premier jour, nous avions déjà reçu 40 mails de personnes qui se proposent de les aider!», se félicite Nick Clesen, le PIJ est en train de mettre en place un programme pour créer des cours de langue en tandem, «basés sur une réelle relation de confiance entre les deux personnes». On peut imaginer des formules permettant d’apprendre le français, l’allemand, le luxembourgeois… et même l’arabe si les intérêts se posent des deux côtés de la table!

À son échelle et avec ses moyens, le PIJ d’Esch-sur-Alzette apporte sa pierre à un édifice qui en a grand besoin. «Pour nous, il est important de participer au lancement de cette dynamique d’accueil. Si tout le monde s’y met, on peut faire de belles choses!», assure Nick Clesen. Georges, lui, a décidé de se lancer à fond dans le projet : prochainement, il va suivre une formation de traducteur auprès de la Croix-Rouge.

Erwan Nonet

Courriel : pij@esch.lu