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Esch-sur-Alzette : le patrimoine pour fil conducteur


Cette projection montre l’esprit du futur quartier avec cette tour pendant de celle de Belval, autre friche réhabilitée. (photo Iko Real Estate)

Un quartier au concept avant-gardiste va voir le jour sur les friches industrielles Rout Lëns. Son masterplan a été présenté samedi matin lors d’une vidéoconférence.

Quartier à taille humaine, patrimoine vivant, mobilité douce, quartier durable, convivial et connecté dans lequel les futurs habitants passeront du temps de qualité entre patrimoine et nature.» C’est ainsi qu’Iko Real Estate résume son projet de quartier sur les friches de la Lentille rouge (Rout Lëns) à Esch-sur-Alzette. Pendant 40 ans, le site se décatissait, stigmate d’un passé révolu. Le projet de quartier lui donne un nouveau souffle et le porte vers l’avenir. Pas question pour autant de tirer un trait sur son histoire : cinq bâtiments vont être intégrés au nouveau quartier. «Le patrimoine industriel doit être le fil conducteur du projet», a indiqué Sandra Huber, chef de projet, samedi matin à l’occasion de la présentation du masterplan.

Autour de ce fil conducteur, 1 500 logements de types différents sont prévus dans des immeubles de trois ou sept étages et dans une tour en bois de 60 mètres de haut qui contrebalancera l’aspect horizontal du projet et du portique. On y trouvera des espaces publics, un concept de mobilité davantage basé sur la mobilité douce que la voiture, l’économie circulaire et la volonté affichée d’une neutralité en matière de CO2. Pour concevoir tout cela, Iko s’est adjoint les services d’une pointure de l’urbanisme, Bernard Reichen, de RR&A. «Un nouveau quartier historique va voir le jour, explique-t-il. Il fédérera le quartier du Viaduc, le quartier du Conservatoire de musique, le crassier et ses ateliers et la cité ouvrière Hiehl, ensemble de bâtiments merveilleux qui faisaient partie de l’usine. Ils feront tous partie de ce nouveau quartier.»

Le futur quartier connecte. Il a connecté les citoyens impliqués dès le départ dans sa planification par Iko et il connectera les habitants de la Métropole du fer en leur ouvrant les portes de ces infrastructures publiques et de son futur parc autour des étangs. Un accès direct dans le prolongement de la rue de l’Alzette pourra être créé le long d’une Alzette renaturée. Les différents bâtiments du quartier seront eux-mêmes connectés par une allée de la Culture-industrielle.

Lancement du chantier en 2022

Le long de cette allée, les bâtiments conservés. Le magasin TT sera un lieu de convivialité et d’échange avec une microbrasserie et un marché de circuit court. Bernard Reichen tient à conserver sa vocation d’origine en l’adaptant aux conditions actuelles. Le bâtiment des turbines sera «un lieu culturel, un lieu des nouvelles technologies, de coworking, d’exposition, de musique…». La halle des Soufflantes sera conservée dans sa conception actuelle et ne sera pas mise aux normes. Elle servira de salle de sport avec un mur d’escalade de 16 mètres de hauteur. Elle sera prolongée par un jardin humide. «La question de l’hydrologie est essentielle dans les projets urbains actuels, a indiqué l’urbaniste. Chaque contrainte technique doit dans ce projet être le support d’une esthétique, d’un imaginaire. Ce sera un jardin de rétention des eaux et un jardin mis au profit des habitants.»

Avant de pouvoir intégrer «ce patrimoine industriel amené à devenir un dispositif urbain extraordinaire», il faudra encore patienter. Les travaux de démolition sont terminés. La phase d’assainissement du site et les procédures administratives vont se poursuivre tout au long de 2021. «En 2022, Iko espère engager la réalisation du site (…) et la réhabilitation des bâtiments patrimoniaux», comme l’explique Sandra Huber. «Nous souhaitons engager un phasage qui va de l’est vers l’ouest en trois volets.» À commencer par le raccordement à l’existant orienté vers le centre-ville à travers différents programmes de logements et de services de proximité. Les phases seront ensuite davantage orientées vers le logement pour rejoindre une phase plus naturelle.

Le plan d’aménagement général du projet et une maquette seront mis à la disposition de la population en début d’année prochaine dans le cadre de l’enquête publique d’usage. Le masterplan peut d’ores et déjà être consulté sur le site internet dédié routlens.lu.

Sophie Kieffer

Mixité programmatique
Iko s’est engagé à réaliser un minimum de 10 % de logements abordables. Pour lutter contre la crise du logement, Iko propose «la mixité programmatique» pour suivre les citoyens dans leur parcours résidentiel de la résidence étudiante à la résidence pour personnes âgées en passant par diverses tailles de logements.

La nature et l’urbain
Sur les 11 hectares du quartier, 3,5 hectares seront dédiés aux espaces verts. Le travail sur la végétation s’organisera autour de quatre composantes. La première est au sol avec une ambiance forestière d’essences locales. La deuxième sera située en hauteur sur les terrasses végétalisées. La troisième se trouvera sur les sommets des bâtiments où des pelouses sèches seront installées. La quatrième sera tournée vers le futur et l’expérimentation : une végétation exotique sera plantée autour des bâtiments patrimoniaux comme un laboratoire des futures essences végétales qui se développeront dans la région en raison du réchauffement climatique. Les espèces qui ont poussé sur les friches seront aussi préservées.

Keeseminnen : un parti pris urbain
Leur destruction a fait débat. Bernard Reichen explique son choix : «Le bâtiment est en béton et de ce fait extrêmement compliqué à réutiliser. Le maintien des portiques, qui devaient être détruits aussi, a été privilégié par rapport au projet futur. (…) Le parti pris urbain consiste à travailler pour les générations futures. Les bâtiments conservés ont tous trouvé un usage pour profiter aux petits-enfants des derniers ouvriers de l’usine. Ce parti pris est différent d’un parti pris de préservation mémorielle. (…) Il faut resituer cette question à une échelle plus large de préservation de site, de préservation de bâtiments et d’insertion de ces bâtiments dans une nouvelle problématique de développement.»