Face à la pénurie de masques destinés aux professionnels médicaux, deux frères ont pris les choses en main. Une communauté s’est formée pour les aider, mettant à leurs disposition leurs imprimantes 3D.
Confrontée au danger représenté par le coronavirus, la population s’organise. Les initiatives citoyennes se multiplient. Dans les quartiers, on va à tour de rôle faire les courses pour les voisins les plus vulnérables, on applaudit les soignants depuis nos fenêtres ou balcons pour les remercier, on échange des services à distance… L’entraide face à l’inertie du confinement rend créatif et permet d’agir, de se rendre utile ou de pallier des manques. L’initiative lancée au début de la crise du coronavirus par les deux frères Jeff et Tom Schockmel va en ce sens.
«3D Print – Let’s Fight Corona Luxembourg» a déjà fourni gratuitement 2 000 masques à visière intégrale réalisés grâce à des imprimantes en trois dimensions et à la solidarité des Luxembourgeois au personnel médical en première ligne. «L’idée de faire des masques nous est venue, à mon frère et à moi, après avoir lu dans plusieurs journaux que le personnel médical au Luxembourg en manquait et que le ravitaillement tardait à venir, explique Jeff Schockmel. Nous nous sommes mis à la confection après avoir obtenu l’accord des hôpitaux et du ministère de la Santé.»
Distribués gratuitement
Les deux hommes ont rapidement été rejoints dans leur entreprise par Marc Ollinger et Kim Franck qui les ont aidés à mettre en place la logistique nécessaire à ce projet. À la suite d’un appel lancé sur les réseaux sociaux, ils ont été rejoints par plus de 700 personnes, dont des lycéens, et ont obtenu de nombreux soutiens de la part d’entreprises et d’institutions. Si la grande majorité mettent leurs imprimantes en trois dimensions et leur temps libre au service de la communauté médicale, d’autres comme les entreprises Grün et Qb Designs ou la commune de Bertrange ont fourni le matériel nécessaire à la confection des masques.
Ces masques sont distribués gratuitement. Jeff et Tom Schockmel y tiennent. «Les gens nous font des cadeaux pour nous remercier. Cela va de la boîte de chocolats à la petite enveloppe, mais nous ne les acceptons pas. Gagner de l’argent ne fait pas partie de notre démarche solidaire», explique Jeff Schockmel.
Les hôpitaux, des CIPA, les gardiens de prison parmi les bénéficiaires
Les imprimeurs au grand cœur fabriquent la monture en plastique, sorte de serre-tête, qui retient le masque en verre face au visage du soignant. Ils les déposent ensuite à six endroits différents au Luxembourg (lycée des Arts et Métiers à Luxembourg, lycée Guillaume-Kroll à Esch-sur-Alzette, Nordstad Lycée à Diekirch, lycée Edward-Steichen à Clervaux, école fondamentale Reenert à Berbourg et rue de l’Église à Wolwelange). Les pièces recueillies sont acheminées vers le lycée des Arts et Métiers – grâce à Flex, le service de car sharing des CFL, ainsi qu’à l’ACL – où leur conformité est testée avant qu’elles ne soient redistribuées aux professionnels de santé. «Quand les commandes à préparer ne sont pas trop importantes, nous assemblons nous-mêmes les masques en ajoutant un élastique et la visière», poursuit Jeff Schockmel.
Hier midi, 6 014 pièces avaient été imprimées. Un tiers a pour le moment été utilisé et distribué. «Les premiers masques sont allés au CIPA Belvaux, au CHEM d’Esch-sur-Alzette, au CHL, au Servior Howald, au CIPA Gréngewald de Niederanven, à la Fondation Pescatore à Luxembourg, aux Hôpitaux Robert-Schuman, au CHDN d’Ettelbruck, à la Fondation Autisme, ainsi qu’aux gardiens de prison, entre autres», énumère Jeff Schockmel. D’autres maisons de repos pour personnes âgées, des pharmacies et des aides-soignants ont également pu profiter des masques jusqu’à présent.
«Jusqu’à ce qu’on n’ait plus besoin de nous»
Le nombre de masques disponibles pour les professionnels de santé au Luxembourg est largement insuffisant. Certains modèles fournis jusqu’à présent n’auraient pas la faveur des professionnels qui préfèrent pouvoir couvrir intégralement leurs voies respiratoires. «Même s’il devait y avoir suffisamment de masques pour combler les besoins du secteur hospitalier, nous ne relâcherions pas nos efforts et je remercie toutes les personnes qui fabriquent des montures pour leur engagement totalement bénévole, promet Jeff Schockmel. Les hôpitaux sont certes prioritaires, mais il y a tous les autres métiers de la santé : les aides-soignantes, les kinés, les dentistes… Nous continuerons à produire des masques jusqu’à ce qu’on n’ait plus besoin de nous.»
Sophie Kieffer
Pour rejoindre le mouvement ou commander des masques, il suffit de se rendre sur la page Facebook «3D Print – Let’s Fight Corona Luxembourg». Les professionnels de santé peuvent également commander des masques en ligne sur le site letsprint.lu.
Est-ce qu’il est possible de nous réserver 10 masques pour notre personnel dans la pharmacie de Kehlen?