Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
Les lourdes restrictions imposées aux familles lors d’un décès depuis le début de la pandémie compliquent le processus de deuil. Omega 90 propose un nouvel atelier dédié.
Comment surmonter le deuil d’un être aimé quand une pandémie mondiale vous prive des derniers instants ensemble ? Depuis le début de la crise sanitaire, le standard du service Consultation de l’association Omega 90, spécialisée dans l’accompagnement de fin de vie, est en surchauffe. Au bout du fil, «des gens en souffrance, qui ressentent beaucoup de colère par rapport aux conditions dans lesquelles leur proche est parti», confie Fabian Weiser, directeur de l’ASBL, qui a dû répondre à 771 nouvelles demandes d’aide en 2020.
Une augmentation de 3,2 % par rapport à 2019, mais le flot de ces appels à l’aide s’est en fait concentré sur les neuf derniers mois de l’année, donc il y a eu des périodes compliquées à gérer : «Le nombre de séances a bondi de 10 % certains mois. Au total, nous avons mené 4 595 sessions d’accompagnement. Pour cela, nous avons adapté le temps de travail de nos psychologues, qui n’ont pas compté leurs heures», poursuit le directeur. Au total, 1 130 personnes ont été soutenues, dont 310 enfants.
Durant les premières semaines de la crise sanitaire, l’urgence de contrer la propagation de ce virus dont on ne savait rien a forcé les patients et leurs familles à subir des procédures strictes et déshumanisées dans ces moments déjà douloureux : visites non autorisées ou réduites au minimum, équipement de protection, port du masque, de gants, placement immédiat du défunt en housse scellée, cérémonies impossibles ou limitées, etc. «Pendant le premier confinement, plus personne ne pouvait aller nulle part. Des personnes sont mortes seules», déplore Fabian Weiser. «Ceux qui restent ne parviennent pas à faire leur deuil, car ils n’ont pas pu dire au revoir : des étapes essentielles du processus de deuil sont manquantes.»
«Dire au revoir après la mort»
Par la suite, à mesure que les connaissances sur le covid s’amoncelaient, et à la demande d’Omega 90 qui s’était mobilisée sur le sujet, le ministère de la Santé a adapté certaines des restrictions. Mais le traumatisme est bien présent au sein de la population.
C’est pourquoi, dès septembre, l’association proposera un nouveau projet baptisé «Dire au revoir après la mort». En petits groupes de huit personnes, les participants travailleront, guidés par des psychologues, sur cette colère qui ne les quitte pas et apprendront comment mobiliser des ressources sur lesquelles s’appuyer pour enfin surmonter le décès de l’être cher.
«On s’adresse aux gens qui n’ont pas franchi le cap d’aller consulter. Il est important qu’ils prennent conscience qu’ils ne sont pas seuls. Il y aura aussi des groupes spécifiques pour les enfants, dont beaucoup ont souffert du climat extrêmement anxiogène», détaille Fabian Weiser.
Du côté de Hamm, où se trouve le centre de soins palliatifs Haus Omega, la priorité a été de ne surtout pas «enfermer» les 102 patients accueillis en 2020 dans les 15 chambres que compte la structure. «Nous avons bien évidemment dû nous adapter aux mesures sanitaires, mais il était essentiel pour nous de permettre à ces personnes en fin de vie d’être accompagnées par leurs proches 24 heures sur 24», explique Nicole Weis-Liefgen, elle aussi directrice d’Omega 90. «Nous avons appuyé cette demande dans des lettres ouvertes au gouvernement et nous avons été entendus», poursuit-elle. Ainsi, les pensionnaires n’ont pas eu à subir de restrictions. Un véritable soulagement pour eux comme pour leur famille.
En 2020, les différents services d’Omega 90 – Consultation, Bénévolat, Formation et Haus Omega – ont nécessité un investissement de 6 748 000 euros, financé à la fois par des dons privés (564 000 euros), la CNS et des conventions avec les ministères de la Famille, de l’Éducation nationale et de la Santé.
Christelle Brucker
