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Carloh, une voiture quand on en a besoin


Le Covid-19 ne semble pas aujourd'hui un frein au partage de véhicules. (illustration Fabrizio Pizzolante)

Carloh, le service d’autopartage de la capitale, fête ses cinq ans. Son réseau compte aujourd’hui 18 stations réparties à travers la ville pour un parc de 35 véhicules.

Posséder une voiture a un coût, et celui-ci peut paraître d’autant plus exorbitant que l’on se sert très peu de son véhicule. Pour les utilisateurs réguliers des transports en commun qui peuvent ponctuellement avoir besoin d’une automobile, le carsharing (ou autopartage) pourrait donc s’avérer être une solution intéressante.

C’est en ce sens qu’il y a tout juste cinq ans la Ville de Luxembourg a décidé de lancer le système d’autopartage avec Carloh. Après une inscription en ligne sur le site carloh.lu et une courte formation de 45 minutes, l’utilisateur peut réserver un véhicule pour s’en servir seulement lorsqu’il en éprouve le réel besoin.

Dix-huit stations sont désormais réparties sur le territoire de la capitale, deux nouvelles stations (à Beggen et dans le Grund, rue Saint-Quirin) sont en effet venues étendre l’offre. Quatre véhicules supplémentaires complètent également la flotte qui compte aujourd’hui 35 véhicules, des berlines et des citadines, thermiques ou électriques.
« Le carsharing est un outil complémentaire aux bus, vélos, tram et trains. C’est un mode de transport qui reste surprenant au Luxembourg et qui fonctionne très peu avec du marketing, mais plus avec le bouche à oreille », note Patrick Hein, le directeur de Carloh, qui fait savoir que les deux tiers des clients de la société se sont abonnés après en avoir entendu parler par un proche.

Le coronavirus, une opportunité

La clientèle de Carloh est très « hétéroclite », affirme le directeur. Plutôt jeunes, les clients sont surtout des citadins qui roulent finalement assez peu. « Nous avons aussi beaucoup de clients qui possèdent déjà une voiture mais en ont parfois besoin d’une seconde. Il y a des Luxembourgeois, des étrangers et beaucoup d’expatriés. Le carsharing intéresse énormément ces derniers qui viennent à Luxembourg pour une durée relativement limitée, de quelques mois à deux ans, et ne veulent donc pas investir dans un véhicule. D’autant que trouver un logement avec un garage est compliqué ici et cela coûte cher. Tout comme le fait de laisser sa voiture dans la rue pour ne rouler que deux ou trois fois par mois. »

C’est la crise du coronavirus qui a permis de mettre en avant la proportion importante d’expatriés dans la clientèle de Carloh : nombreux sont ceux qui ont suspendu, voire annulé, leur abonnement pour rentrer dans leur pays d’origine. Crise sanitaire qui a d’ailleurs eu un impact considérable sur l’activité de la société d’autopartage : Patrick Hein fait ainsi état d’une baisse de 70% de l’activité à partir de la mi-mars et pendant la durée du confinement. Il ne croit pas cependant que le Covid-19 soit aujourd’hui un frein au partage de véhicules. « Je pense au contraire que cela peut être une opportunité : avec le coronavirus, nous sortons moins et utilisons de fait moins notre véhicule privé. On peut dès lors se demander si on en a vraiment encore besoin. Mais certains déplacements restent indispensables, d’où l’intérêt du carsharing. Bien sûr, les gens qui craignent beaucoup le virus vont eux extrêmement limiter leurs déplacements .»

La question hygiénique ne semble en effet avoir que peu d’impact : en septembre, Carloh avait retrouvé 90% de son activité habituelle. Pourtant, les véhicules continuent de n’être contrôlés et nettoyés intérieurement et extérieurement que tous les 14 jours en cette période de crise sanitaire. Il faut dire qu’avec 800 déplacements par mois, un nettoyage complet après chaque utilisation semble irréaliste.

Les dirigeants en appellent donc à la responsabilité de chacun. « Les clients sont sensibilisés au respect des gestes barrières, port du masque et éventuellement de gants, précise l’échevin à la mobilité de la ville de Luxembourg, Patrick Goldschmidt. Même au lancement de Carloh, les gens avaient peur de cet aspect – que les voitures ne soient pas suffisamment propres. Mais la clientèle est généralement très respectueuse des véhicules, car ce n’est pas un véhicule personnel. »

Moins de 3 000 km par an

S’il est difficile d’estimer précisément les économies réalisées en utilisant le système de carsharing plutôt que son propre véhicule, ce mode de transport demeure toutefois indubitablement intéressant pour les citadins qui roulent moins de 2 000 à 3 000 kilomètres par an, comme l’explique Patrick Hein : « Les économies réalisées dépendent bien évidemment de la durée de la réservation et des kilomètres parcourus. Mais quelqu’un qui utilise une voiture entre deux et quatre fois par mois durant quelques heures afin d’effectuer entre 30 et 50 kilomètres, paiera de 80 à 120 euros par mois pour utiliser le service de carsharing. Tandis qu’avoir son propre véhicule, même une petite voiture, coûte au minimum 230 euros par mois lorsqu’on prend en compte le prix d’acquisition ainsi que les frais d’essence, d’assurance, d’entretien et l’argent perdu à la revente. »

Deux sociétés se partagent le marché du carsharing aujourd’hui au Grand-Duché : Carloh, le premier à s’être implanté, et Flex, le service d’autopartage des CFL, qui lui s’étend sur l’ensemble du territoire national.
Avec un peu plus de 700 abonnés à Carloh, le carsharing demeure encore assez marginal. « Bien sûr, j’espère que nous aurons un peu plus d’abonnés. Ce nombre n’est pas suffisant pour atteindre le seuil de rentabilité », reconnaît Patrick Goldschmidt. « Mais l’autopartage n’en demeure pas moins une offre importante dans le concept de mobilité. On estime en effet qu’une voiture de carsharing peut remplacer dix voitures individuelles. On espère que les habitants des quartiers tels que le Grund, où les gens ont des difficultés à trouver une place pour se garer, apprécieront ce service. Car avec Carloh, ils ont d’office une place réservée. »

Tatiana Salvan