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Belval : un projet pour raviver le souvenir d’une source miraculeuse


Le collectif BeBunch, associé à Ney & Partners pour l'ingénierie et à Laura Mannelli pour la scénographie en réalité virtuelle, a décroché le projet de pavillon (photo : DR).

Un projet de pavillon mené par la commune de Sanem doit raviver le souvenir d’une source miraculeuse sur le site de Belval. Les résultats du concours d’architectes ont été proclamés vendredi.

Le saviez-vous? Au tournant du XXe siècle, Belval et la commune de Sanem étaient mondialement connus pour leur eau minérale curative exceptionnelle. Cette source, la source Bel-Val, tombée dans l’oubli et redécouverte lors de travaux un siècle plus tard, va être réhabilitée. Un pavillon va commémorer son existence et sensibiliser à la protection de cette ressource naturelle dans le parc Um Belval à un jet de pierre de l’endroit où elle jaillit, à 200 mètres sous l’intersection des boulevards de la Recherche et du Jazz. Vendredi ont été proclamés les résultats du concours d’architectes lancé pour imaginer le futur pavillon de la source Bel-Val.

Le collectif BeBunch, associé à Ney & Partners pour l’ingénierie et à Laura Mannelli pour la scénographie en réalité virtuelle, a décroché le projet de création d’un pavillon récréatif qui rappelle l’histoire de la source, face à quatre autres concurrents. L’intégration paysagère et la légèreté de la proposition avec ses formes circulaires et ses grands parasols ont fait la différence ainsi que le rapport à l’eau et les références immédiates. De plus, le projet respectera les principes premiers de l’économie circulaire. Le jury a également salué sa poésie. Tout en rondeurs et en courbes douces, il ressemble à des nymphéas flottant sur l’eau.

Cet espace récréatif associant des fonctions de repos, de restauration et des sanitaires devrait être prêt en février 2022 ou au plus tard au printemps. La commune de Sanem veut absolument en faire profiter les visiteurs pour l’été quand elle sera sous les projecteurs d’Esch 2022 en tant que commune phare de la manifestation. Un budget de plus d’un million d’euros sera voté la semaine prochaine par le conseil communal. Le pavillon sera situé sur le tracé du «grand parcours», «un projet historique et artistique mis en place spécifiquement pour Esch 2022 sous la thématique RemixNature qui abritera des projets en fil rouge à travers les quatre localités de la commune (Sanem, Belvaux, Soleuvre et Ehlerange)», selon la commune de Sanem. Il pourra également accueillir un projet autour de l’eau et de sa revalorisation.

Malheureusement, cette pureté tant vantée, c'était avant l'installation des usines... (photo : DR).

Malheureusement, cette pureté tant vantée, c’était avant l’installation des usines… (photo : DR).

L’eau utilisée pour le projet ne sera pas celle de la source Bel-Val. Son eau ne sera pas captée pour être proposée au public. «Ce serait une entreprise trop coûteuse, estime-t-on du côté de la mairie de Sanem. De plus, l’eau n’a certainement plus la qualité ni les propriétés qu’elle avait au début du siècle dernier étant donné l’industrialisation du site sidérurgique dans les années qui ont suivi.» Elle va donc s’écouler paisiblement sous un nouveau projet immobilier de Belval. Charge à la Maison de la culture et de l’histoire A Gadder et à ses archives de la faire revivre en racontant son histoire dans le pavillon.

Un des autres objectifs du futur pavillon est d’offrir «un espace cuisine sécurisé qui serait à la disposition de la commune et des associations pour organiser des manifestations et pour offrir un espace de restauration par beau temps».

Trois finalistes et une mention spéciale

L’appel à projets a eu lieu sous la forme d’une consultation rémunérée, explique la commune. La procédure de sélection des projets proposés par les architectes choisis s’est faite en deux phases. Le concours consistait à présenter un concept qui définissait l’esthétique architecturale et les fonctionnalités du pavillon de la source Bel-Val dans le parc Um Belval sous forme d’un avant-projet sommaire. Un préjury a sélectionné les projets retenus selon des critères de faisabilité. Ces projets ont été présentés par les architectes ou groupements participant au jury.

La phase suivante consistera à développer le projet avec le maître d’ouvrage. Afin de pouvoir assurer le volet scénographique du pavillon, il avait été demandé aux architectes de s’associer à un scénographe, designer, artiste ou autre créatif afin de développer le concept du contenu demandé. Sur les cinq bureaux participants, seuls quatre ont remis un projet au jury.

Le troisième prix du concours est allé au binôme 2001–NJOY qui, avec «RE-SOURCEBEL-VAL», a présenté un projet «aux recherches formelles et développement très aboutis allant au-delà de l’histoire elle-même pour poser des questions très actuelles sur la gestion et l’économie de l’eau». Le projet le plus circulaire de tous a terminé deuxième et a reçu une mention spéciale du jury pour «son audace de traitement et les idées véhiculées à travers l’architecture». Il s’agit de celui du trio constitué de Pauline Lacord, Étienne Duval et Julie Marthe Hoffmann, avec le pavillon «BEL VALSPLASH».

Sophie Kieffer

Ils ont dit oui à l’eau ferrugineuse !

L’emplacement était connu, mais personne n’avait pensé à la capter avant Joseph Steichen-Mongenast qui a fait faire le tour du monde à l’eau de Bel-Val.

«La plus hygiénique des eaux de table, la plus agréable des eaux médicinales!» Deux millions de bouteilles de l’eau de la source Bel-Val étaient vendues chaque année dans le monde entier à son apogée grâce à ce slogan publicitaire. La source minérale de Bel-Val est connue depuis un temps immémorial, selon le site industrie.lu qui rapporte que «déjà aux époques les plus reculées, les malades sont accourus de loin et de près pour y trouver le rétablissement de leurs forces et de leur santé. Avant son captage toutefois la source sommeillait au sein de la terre, et n’envoyait à la surface que des suintements plus ou moins notables qui, tout en faisant entrevoir les précieuses qualités de ses eaux, témoignaient surtout de l’abondance de celles-ci dans les profondeurs».

Joseph Steichen-Mongenast, conseiller à la Cour supérieure de justice à Luxembourg, la (re)découvre en 1885, alors qu’il vient d’hériter de la ferme Ernshof. Des travaux de sondage sont entrepris vers 1888. La captation des quelque 3 000 hectolitres qui en jaillissaient toutes les 24 heures a été réalisée par les ingénieurs Jean-Nicolas Klensch et Joseph Heuskin vers la fin de 1890. Cette eau, riche en sels minéraux, calcium et fer et dotée de vertus curatives, est mise en bouteille et commercialisée par la Société anonyme générale des eaux minérales de Bel-Val à partir de 1893 de Chine en Argentine, en passant par les États-Unis et l’Afrique du Sud.

La société tombe à l’eau

L’eau de Bel-Val remporte 38 médailles d’or, des diplômes d’honneur internationaux et le grand prix de l’exposition mondiale de Bruxelles en 1910 et se classe parmi les grandes marques comme Vittel, Contrex ou Évian. En 1923, la limonade Bel-Val voit le jour. Elle est «exquise, rafraîchissante, digestive et composée de sucre cristallisé et d’essences de première qualité». La production d’eau de source atteint les deux millions de bouteilles par an en 1925, mais à partir de 1929, la Grande Dépression sonne le début de la fin. La faible demande et la concurrence internationale croissante entraînent la cessation de la production en 1935. Le terrain et les bâtiments sont rachetés par l’Arbed en 1938. Ils seront transformés en camps de prisonniers russes, polonais, serbes et croates en 1942 et 1943. Ils ont ensuite accueilli les collaborateurs. Ce qu’il restait des bâtiments de l’exploitation a été détruit en 1958 pour faire place au site sidérurgique de Belval en pleine expansion.