Les hôpitaux du pays ont débuté mardi leur campagne de vaccination contre le Covid-19 auprès de leur personnel. Reportage à l’hôpital du Kirchberg.
«Tout va bien», lance Suzanne Koy. La médecin du service chirurgie maxillo-faciale à l’hôpital Robert-Schuman (HRS) du Kirchberg vient de se faire vacciner contre le Covid-19. Et elle a le sourire : «C’était une simple piqûre dans le bras. Cela me rassure d’avoir été vaccinée.» Suzanne Koy poursuit en soulignant que cette crise sanitaire liée au Covid-19 met le personnel soignant «face à une pression élevée. Nous devons traiter les patients, faire attention aux autres patients, à nous et à nos proches. C’est compliqué pour tout le monde d’imaginer tous les efforts que le personnel soignant doit faire pour faire face à cette crise». Et elle émet un vœu : «Il faut que tout le monde se fasse vacciner pour qu’on puisse à nouveau vivre normalement.»
Après le centre de vaccination à la halle Victor-Hugo du Limpertsberg et plusieurs maisons de soins, la vaccination contre le Covid-19 a donc débuté mardi dans les différents hôpitaux du pays auprès du personnel soignant.«Nous avons commencé à travailler sur la planification à la mi-décembre, indique le directeur administratif des Hôpitaux Robert-Schuman, Michel Schütz. Nous avons mis en place cette procédure de vaccination et ce « vaccinodrome » en un temps record.»
Il y a un vrai lien pour éviter des contretemps et du gaspillage
Tout commence à la pharmacie de l’hôpital du Kirchberg. Les vaccins BioNTech/Pfizer sont stockés dans des congélateurs à -79°C. Pour les sortir, une clé est nécessaire. Des lunettes, une visière et des gants de protection aussi. «On doit les sortir la veille de leur utilisation pour les placer dans un frigo normal où la température oscille entre 2 et 6°C, explique Anne Otto, pharmacienne et responsable de la pharmacie des HRS. Ensuite avant de pouvoir les manipuler, il faut les laisser à une température ambiante pendant une demi-heure. Puis on peut préparer les doses de vaccins. La préparation d’une dose est très précise, par exemple il faut la retourner 10 fois de manière délicate, et très « timée ». La préparation du vaccin en lui-même n’est pas compliquée, mais c’est une expérience inédite en raison de la procédure.»
En effet, les préparations se font presque «à la minute» puisque la pharmacie est en lien direct avec le «vaccinodrome», installé au 2e sous-sol de l’hôpital du Kirchberg. «Nous savons la veille combien de personnes doivent se faire vacciner le lendemain, à quelle heure, et on vient souvent voir comment cela se passe, indique Anne Otto. Il y a un vrai lien pour éviter des contretemps et du gaspillage.»
L’objectif des Hôpitaux Robert-Schuman est de vacciner chaque jour 96 personnes de son personnel soignant des HRS, du Rehanzenter et d’Omega 90 et celui de ses sous-traitants – «tous les gens qui travaillent sous notre toit», résume Michel Schütz, soit 3 704 personnes. Pour se faire vacciner, les volontaires, comme Suzanne Koy, doivent s’inscrire en ligne via Doctena. Ensuite, ils se présentent au «vaccinodrome» à l’heure de leur rendez-vous pour une première étape administrative, où il est vérifié tous les éléments d’identité des volontaires au vaccin. Puis un médecin questionne le volontaire avant de l’autoriser (ou non) à se faire vacciner. Et une infirmière injecte le vaccin. «C’est une simple injection intramusculaire dans un bras, rappelle Cécile Winant, chargée de mission infirmière clinicienne. C’est rapide. Le plus, c’est le dossier administratif…» Et en tout, cela prend en théorie 17 minutes. «Cela fait deux heures que le vaccinodrome est ouvert et on bat ce temps…», précise le directeur administratif, Michel Schütz, pour qui l’arrivée du vaccin est un «soulagement» car «l’hôpital du Kirchberg, qui a enregistré le premier décès lié au Covid-19 du pays le 29 février dernier, et l’ensemble du personnel soignant du pays font face à cette crise sanitaire depuis bientôt un an».
L’objectif des hôpitaux Robert-Schuman est que son personnel soignant et celui de ses sous-traitants soient vaccinés d’ici trois mois. Mais à l’issue de cette campagne, la volonté du directeur général des HRS, le Dr Claude Schummer, est que «le vaccinodrome devienne un centre de vaccination pour l’ensemble de la population car il est primordial que l’ensemble de la population participe à l’effort de vaccination dans la lutte contre le Covdi-19».
Guillaume Chassaing
1,3 million de doses (pré)commandées
La stratégie vaccinale a été dévoilée début décembre par le gouvernement et s’affine au fil des semaines, et surtout des autorisations de mise sur le marché par l’Agence européenne des médicaments (EMA). La campagne de vaccination a débuté le lundi 28 décembre à la halle Victor-Hugo pendant trois jours au cours desquels environ 800 personnes du personnel hospitalier et 400 du personnel des maisons de soins ont été vaccinées. Ensuite, le 6 janvier dernier, des équipes mobiles ont commencé à vacciner des résidents de maisons de soins. Cette campagne se terminera demain et au total 6 200 résidents de maisons de soins seront vaccinés à ce moment-là. Et depuis hier, les hôpitaux du pays ont lancé en leur sein une campagne de vaccination auprès de leur personnel. Cela a été rendu possible grâce à la livraison supplémentaire, lundi, de 4 875 doses du vaccin BioNTech/Pfizer
Actuellement, ce sont les vaccins BioNTech/Pfizer qui sont injectés aux volontaires. Mais le vaccin du laboratoire Moderna est également arrivé sur le territoire luxembourgeois : 1 200 premières doses ont été livrées lundi. Au total, le Grand-Duché a réservé à ce jour 110 462 doses du vaccin Moderna et 414 210 de BioNTech/Pfizer.
Au moment de l’élaboration de la stratégie, le Luxembourg s’est engagé dans le cadre des contrats d’achat anticipés négociés par la Commission européenne avec les producteurs, pour 1,3 million de doses de vaccin avec lesquelles il sera possible de vacciner plus de 800 000 personnes, étant donné que certains de ces vaccins nécessitent l’administration de 2 doses. Outre BioNTech/Pfizer et Moderna, qui ont déjà reçu l’autorisation de l’EMA, les autres «candidats vaccins» sont notamment AstraZeneca, Sanofi GSK, Johnson&Johnson et CureVac.
«La situation se calme»
En marge de la mise en service du «vaccinodrome» à l’hôpital Kirchberg, le Dr Claude Schummer a fait le point sur la situation des hospitalisations liées au Covid-19 dans l’établissement hospitalier. «La situation est en train de se calmer, souligne le directeur général des Hôpitaux Robert-Schuman (HRS). Nous avons actuellement ici 21 patients Covid-19 normaux et 5 en soins intensifs. On avait peur avant Noël, mais finalement ça se passe bien.»
Néanmoins, le Dr Claude Schummer reste prudent : «Il y a eu le retour des élèves à l’école hier (NDLR : lundi). On va voir comment cela va se passer au cours des 15 prochains jours.»
Le directeur général des Hôpitaux Robert-Schuman conclut en annonçant qu’«après avoir déprogrammé certaines activités depuis octobre, nous commençons à les reprogrammer en ce moment. On va voir. La crise fait que nous pilotons toujours à vue pour le moment…».