Comme reprendre le sport, manger mieux ou prendre plus de temps pour soi, arrêter de fumer fait partie des bonnes résolutions. Difficiles à tenir, elles sont affaire de motivation.
Il ne suffit pas de dire les choses, il faut aussi les faire sinon on traîne ses bonnes résolutions d’une année à l’autre. Pour s’aider à les tenir, il existe des béquilles. La Fondation Cancer en propose en ligne aux fumeurs sur maviesanstabac.lu ou lors de consultations gratuites d’une tabacologue pour un meilleur accompagnement du fumeur dans toutes les étapes de son parcours de futur non-fumeur. La première d’entre elles est un test à faire en ligne pour découvrir sa dépendance à la nicotine, une base pour définir un plan d’attaque.
Tout le monde le sait, la cigarette tue (8 millions de personnes dans le monde chaque année). C’est écrit sur les paquets de cigarettes. Pourtant, au Luxembourg, plus de 3 milliards de cigarettes ont été vendues en 2019. Un record effrayant d’autant plus qu’entre 2000 et 2017, leur nombre avait été réduit de moitié. Cette augmentation spectaculaire, si elle est à attribuer aux achats des travailleurs frontaliers, se répercute également dans la population. Selon une enquête menée en 2019 par la Fondation Cancer et TNS Ilres, le nombre de fumeurs au Luxembourg est passé de 21 % de la population en 2018 à 27 % en 2019, soit une augmentation de 28 % des fumeurs. Les jeunes de 18 à 24 ans représenteraient plus du tiers d’entre eux. La tendance est particulièrement à la hausse chez les jeunes hommes (+64 % entre 2018 et 2019). Chez les jeunes femmes, une hausse de 27 % a été enregistrée durant la même période.
«Les chiffres ont augmenté de manière dramatique en 2018 et 2019. Nous ne disposons pas encore des chiffres de 2020 pour confirmer ou infirmer cette tendance», note Lucienne Thommes, directrice de la Fondation Cancer, prudente. Le confinement et l’ennui ou les angoisses qui l’ont accompagnée, auront-ils ou non eu raison des efforts des uns et des autres ? Elle ne préfère pas s’avancer sur la question sans données scientifiquement prouvées. «On a dit tout et son contraire sur les fumeurs et le Covid, qu’ils étaient protégés du virus ou, la version de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qu’ils risquent de contracter une forme plus sévère de Covid-19 que les non-fumeurs. Peut-être cela en aura motivé certains à arrêter de fumer.»
Non seulement le prix est plus bas que chez nos voisins, mais il est également insignifiant par rapport à nos salaires
Soixante-douze pour cent des fumeurs disent souhaiter arrêter. «Les femmes prennent la décision d’arrêter de fumer pour leur entourage, pas pour elles-mêmes. Elles sont enceintes ou leur conjoint est gêné par l’odeur», indique la directrice. Outre, la santé, le prix du tabac est un des facteurs qui poussent les fumeurs à arrêter. Au Luxembourg, il ne serait pas encore assez dissuasif. «Selon la Banque mondiale, il suffirait d’une hausse de 5 % du prix des cigarettes pour entraîner l’arrêt de 10 % des fumeurs, indique Lucienne Thommes. Peut-être que si les produits à base de tabac étaient plus chers, moins de jeunes commenceraient à fumer. Au Luxembourg, le prix du paquet de cigarettes est dérisoire par rapport aux salaires. Il ne faut pas travailler longtemps pour s’en offrir un. Non seulement le prix est plus bas que chez nos voisins, mais il est également insignifiant par rapport à nos salaires.»
La fondation plaide donc en faveur d’une hausse conséquente des prix du tabac. Malheureusement, la politique ne suit pas. «Cette mesure serait très efficace. Là où elle est appliquée, des reculs significatifs du nombre de fumeurs ont été constatés, précise la directrice. Le ministère de la Santé serait heureux si une telle mesure était appliquée. Le ministère des Finances un peu moins. Il compte sur les revenus des accises sur le tabac.» Les prix attractifs pratiqués au Grand-Duché encouragent les frontaliers à acheter des cigarettes au Luxembourg plutôt que dans leurs pays respectifs. La vente de tabac a rapporté 775 millions d’euros à l’État luxembourgeois pour l’année 2019.
Il ne faut pas avoir honte de demander de l’aide. Il n’est jamais trop tard pour arrêter de fumer
L’avènement des cigarettes électroniques n’aura pas fait reculer le nombre de fumeurs comme cela avait été avancé un temps. «Les cigarettes électroniques ont été un épiphénomène au Luxembourg. Peu de gens les ont utilisées, mais là encore nous manquons de données chiffrées, note Lucienne Thommes. Nous n’avons rien contre leur utilisation comme moyen d’arrêter de fumer si tous les autres ont échoué. Ce qui est dangereux est de combiner la cigarette classique et la cigarette électronique.»
De toutes les résolutions de nouvel an concernant la santé, arrêter des fumer est la plus importante. «Il n’y a rien de plus sain que d’arrêter de fumer», confirme Lucienne Thommes, «Si on n’y arrive pas dès le premier essai, on apprend de ses erreurs et on fera mieux la prochaine fois. Il ne faut pas avoir honte de demander de l’aide. Il n’est jamais trop tard pour arrêter de fumer.» Le nombre d’années passées à fumer est plus dangereux pour la santé que la quantité de cigarettes fumées. Une bonne hygiène de vie ne prémunirait pas non plus les fumeurs contre les pathologies liées à la consommation de tabac que sont les AVC et les crises cardiaques. «Le tabac bloque les artères et augmente les risques», explique la présidente. En outre, plus d’un tiers des cancers sont dus au tabagisme. Un dernier argument pour se tenir à sa résolution : un fumeur vit dix ans de moins en moyenne qu’un non-fumeur.
Sophie Kieffer
Pour que l’envie s’envole en fumée
Les bonnes résolutions sont une chose. Les tenir sur le long terme en est une autre. Qui n’a pas replongé au moins une fois dans un de ses «anciens» travers et est allé à 23h acheter un paquet de cigarettes à la station-service du coin parce que «c’était trop dur» On peut résister à tout sauf à la tentation. Si la motivation et la volonté sont les éléments indispensables pour commencer un sevrage tabagique, elles sont souvent insuffisantes pour le mener au bout. De nombreuses béquilles existent, contrairement aux remèdes miracles. La Fondation Cancer et le site santé.lu recommandent «un traitement personnalisé qui tient compte de la dépendance et des habitudes de vie du fumeur» accompagné par un professionnel pour maximiser les chances de réussite.
Parmi les béquilles, on retrouve les substituts nicotiniques, des médicaments à base de nicotine vendus en pharmacie sans ordonnance. Ils aident à diminuer les symptômes de manque de nicotine. Selon le niveau de dépendance et l’état de santé, «le médecin peut décider de prescrire un antidépresseur qui atténue le manque de nicotine dans votre sevrage tabagique ou bien un autre médicament qui se lie à certains récepteurs nicotiniques dans le cerveau», indique le site santé.lu.
D’autres thérapies existent comme les thérapies cognitives ou comportementales. Elles peuvent aider le fumeur à ne pas craquer pour une cigarette, à se débarrasser des mauvaises habitudes et à gérer son stress autrement que par la cigarette. Certains fumeurs ont également recours à l’hypnose, l’acupuncture, la mésothérapie ou encore l’homéopathie. Ces méthodes ne font cependant pas l’unanimité auprès des spécialistes.
S.K
Les stratégies pour résister
Chaque ancien fumeur a les siennes. La Fondation Cancer sur son site dédié en propose quelques-unes. Pour trouver la plus efficace, l’organisme conseille de remplir son propre journal du fumeur afin de découvrir quelles cigarettes sont indispensables et à quels contextes elles sont associées.
Une fois cela déterminé, il sera plus aisé de mettre en place des stratégies d’évitement. Il peut s’agir d’éviter momentanément les sorties avec les fumeurs ou de boire du café ou de l’alcool qui pourraient me donner envie de fumer. L’organisme propose également des exemples de stratégies de compensation, en guise de diversion dans les moments où le besoin de fumer se fait sentir comme par exemple appeler un ami, mâcher un chewing-gum, boire un verre d’eau ou consulter son téléphone.
En cas de craquage
Arrêter de fumer est un véritable apprentissage, note la Fondation Cancer. Le fumeur qui craque a besoin de temps pour comprendre pourquoi il craque et ensuite comment faire pour ne plus craquer et trouver son équilibre. Pendant cette phase de questionnement, la Fondation Cancer conseille sur son site de revenir au plus vite à l’arrêt du tabagisme, de ne pas interrompre son traitement de substitution nicotinique ou médicamenteux, de ne pas se démoraliser et de se rappeler pourquoi on souhaite arrêter de fumer, demander de l’aide à un proche et prendre rapidement rendez-vous avec un médecin ou tabacologue. Surtout ne pas culpabiliser.