[Série d’été] Ahn : le Palmberg, la plus belle des terrasses

Le Palmberg, à Ahn, est un trésor. On ne tombe pas dessus par hasard, il faut le vouloir pour découvrir ce splendide terroir fermé par des falaises ocre au nord-ouest mais ouvert sur un panorama unique vers le village d’Ahn et la Moselle en contrebas.

Il y a des lieux qui ont tout, à qui on ne trouve aucun défaut. Le Palmberg en fait partie. Sa configuration géologique et naturelle est aussi originale qu’inspirée et, ce qui ne gâte rien, les vins qui sont tirés des vignes soutenues par des terrasses portées par des murs en pierres sèches sont parmi les meilleurs du pays. Le riesling, notamment, sait profiter à merveille de ce terroir marqué par la minéralité et un microclimat étonnant.

Ici, la vallée est plutôt large car la Moselle a pu éroder sans trop d’efforts les marnes tendres du Muschelkalk moyen. Par contre, les falaises qui délimitent la vallée sont constituées de dolomie, une roche calcaire dure que l’on a extraite ici jusqu’en 1959 pour en faire des pierres de taille ou des pierres concassées. Les falaises du Palmberg jouent un rôle très important dans cet écosystème. Orientées sud/sud-est, elles suivent le parcours du soleil pendant une bonne partie de la journée et emmagasinent ainsi une partie de sa chaleur qu’elles s’empressent de restituer lorsque s’invite la fraîcheur de la nuit.

C’est ainsi que le Palmberg est la localisation la plus chaude de tout le pays, il y pleut aussi un petit peu moins qu’ailleurs. À tel point que le microclimat qui s’y développe est qualifié de méditerranéen. On y retrouve d’ailleurs une flore et une faune que l’on s’attendrait davantage à croiser sous des latitudes bien plus sudistes, dont le buis (Pällem en luxembourgeois) qui a donné son nom à l’endroit. Le Palmberg est même le seul endroit du pays où il pousse à l’état sauvage. Il n’est d’ailleurs pas impossible qu’il soit une relique de la présence gallo-romaine. Histoire de tromper encore un peu plus les promeneurs, on peut entendre l’été, ici et nulle part ailleurs au Grand-Duché, des cigales de montagne ! Au sol, lorsque c’est la saison, on peut repérer une douzaine d’espèces d’orchidées qui raffolent des sols calcaires secs.

Un grand terroir à riesling

Si la nature s’épanouit à ce point au milieu de ces parcelles de vignes, c’est qu’elle y est bien protégée : on se trouve au cœur de la zone Natura 2000 Machtum-Pellembierg-Froumbierg-Greivenmaacherbierg. Il est donc strictement interdit d’y ramasser autre chose que du raisin.

Les falaises regardent la Moselle mais sont traversées par la Donverbaach, un petit ruisseau qui sait s’énerver lors des fortes pluies. Son lit est haché, rugueux, car la rivière doit se frayer un chemin au pied des éboulis qui ont dévalé les pentes depuis des siècles. La mousse et les fougères tapissent les rochers qui s’étendent au pied d’une forêt de ravins composée de hêtres, d’érables, de tilleuls et de frênes.

Parcourir ce cadre à pied est un bonheur car on traverse de nombreux écosystèmes différents, il n’y a pas beaucoup de pas à faire pour s’offrir un nouvel horizon tant la diversité des paysages est riche. L’Institut allemand de randonnée ne s’y est pas trompé en classant le sentier qui le traverse comme une Boucle de rêve, un label prisé qui démontre – si besoin était – l’intérêt du secteur.

Pour profiter pleinement du cadre, la dégustation des vins qui y sont produits est un must. Les rieslings du Palmberg sont immanquablement minéraux, fruités et denses. Les vignerons du village en contrebas ne sont pas malheureux de pouvoir profiter d’un tel écrin ! Alors que le remembrement date du début des années 1970 et que les vignes ont été plantées en 1976, l’âge des ceps est aujourd’hui idéal. Grâce à leurs longues racines, les vignes peuvent puiser profondément dans le sous-sol pour trouver de l’eau, même pendant les périodes particulièrement chaudes. Le paradis, on vous dit !

Erwan Nonet