Le conseil communal de Sanem a voté ce vendredi le transfert des terrains de la future prison en zone constructible. Les retombées financières sont déjà colossales. La première pierre du centre pénitentiaire n’est pas posée, mais les millions d’euros continuent d’affluer.
Les prisons, c’est un peu comme les éoliennes, on est content que ça existe, mais pas près de chez soi. Les habitants de Sanem vont pourtant devoir s’y résoudre. Après bien des oppositions, le projet de centre pénitentiaire d’Uerschterhaff, lancé en 2008, est quasiment acté. Le conseil communal a voté ce vendredi le passage des terrains concernés en zone constructible. Pas moins de trois hectares entre Sanem et Soleuvre.
« Ça ne veut pas dire que les travaux vont commencer , tempère le bourgmestre, Georges Engel. Il reste encore la délivrance du permis de construire, dont je détiens le pouvoir. Mais comme l’État est fair-play, il n’y a pas de raison que ça bloque… » «Fair-play»? Généreux même!
Alors que la première pierre du centre pénitentiaire (400 places pour détenus en préventive) doit être posée en 2017, les compensations sont déjà concrètes. « En tout, nous toucherons 20 millions d’euros conditionnés à des grands projets », calcule Georges Engel. Contrairement au Monopoly , ça vaut le coup de s’arrêter sur la case prison! Sans compter les 250 emplois créés, qui augmentent de fait les dotations annuelles communales.
Financements généreux en compensation
Concrètement, les projets qui ont bénéficié des vingt millions d’euros sont nombreux ( lire ci-dessous ) et ce n’est pas fini. Aujourd’hui, en même temps que le conseil communal se prononcera sur les terrains, le bourgmestre dévoilera les plans du futur hall omnisports de Sanem. L’infrastructure, qui sera accolée au terrain de foot, coûtera 9,7 millions d’euros. Et devinez qui règlera 70 % de la note? L’État, toujours en compensation de la prison! « Nous avons connu une opposition très forte il y a quelques années, se remémore le bourgmestre, en sortant des pétitions de milliers de signatures . Je crois que les habitants ont désormais compris que c’était un projet d’intérêt public .»
Au conseil, l’unanimité est presque totale, à part du côté de déi Lénk. « Ils sont contre le système pénal tel qu’il est dans sa façon globale , décrypte Georges Engel. Ils estiment que l’État enferme trop de gens .» Le bourgmestre, étiquetée LSAP, voit de son côté un intérêt à la future prison. « Aujourd’hui, à Schrassig, les condamnés et les prévenus en attente d’un procès vivent dans le même établissement. Avec Sanem, on réduira les risques d’un embrigadement. »
Georges Engel reste lucide. Il sait que l’hexagone de béton, quoique design pour une prison, « se verra dans le paysage. On parle quand même de murs de 6 mètres de haut.. .» Pour autant, il rappelle qu’en plus des sommes colossales obtenues, il a exigé l’implantation d’une unité de la police grand-ducale à proximité, « avec plusieurs dizaines d’agents ». Bref, s’il y a bien un endroit où l’on pourra se promener en toute sécurité à Sanem, c’est près du futur centre pénitentiaire.
Hubert Gamelon
Piscine, salle de concert, halls de sport…
Avec 20 millions d’euros, il y a de quoi faire. Les fonds en provenance de l’État en compensation de la prison donnent des résultats concrets. Voici trois exemples.
Généralement, l’État investit à hauteur de 30 % dans les projets communaux éligibles. Grâce aux fonds en compensation de la prison, Sanem voit l’enveloppe s’alourdir! « En moyenne, nous sommes passés de 30 % à 50 % de financement d’État », explique Georges Engel. L’exemple le plus frappant est le complexe sport et culture «Kuss», au Scheierhaff. Il comprend une piscine flambant neuve, un hall omnisports et une salle de concert pouvant accueillir des centaines de personnes dans des conditions optimales.
Des projets plus faciles à monter
« L’État a mis 6,8 millions d’euros dans le centre Kuss, ce qui représentait 50 % de la somme initiale. Nous avons du coup pu voir plus grand », sourit le bourgmestre. Avec un complexe qui a coûté presque deux fois plus cher que prévu! Autre exemple avec le centre d’intervention des sapeurs-pompiers. « Nous l’aurions construit quand même sans les subventions d’État, mais certainement pas avec la même facilité », commente le bourgmestre.
Le futur hall omnisports (70 % de subventions d’État) sera construit contre le terrain de foot. Il permettra de fermer la salle vétuste de l’école Belvaux. « Avec 1 600 habitants sur Sanem, deux vraies salles de sport (NDLR : en comptant la Kuss) , ça ne sera pas de trop », estime le bourgmestre. Certes. Mais à force, on finirait presque par vivre au-dessus de ses moyens grâce à l’activité pénitentiaire… Un vrai business pour tout le monde!