Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
Le Bicherbus prête des livres aux quatre coins du pays depuis 1982. Nous avons croisé son chemin, à Clemency. Sur la route, toujours…
Il sillonne le Grand-Duché depuis 1982. Colporteur de culture, jamais fatigué, les phares rivés sur la prochaine étape. Il n’y a pas un village où le Bicherbus ne se soit jamais posé.«Rien derrière, tout devant, comme toujours sur la route», a-t-on envie de citer en clin d’œil à un autre grand voyageur, l’écrivain Jack Kerouac. «La liste de nos arrêts a changé en 30 ans», glisse Romain Kayser, l’un des chauffeurs de cette bibliothèque sur roues. Manon Hoffmann, pionnière, se souvient des premières escales. «Neunhausen, dans le nord du pays… je trouvais ça beau, je voulais y retourner.»
Le Bicherbus dépend de la Bibliothèque nationale (BNL). En 1982, le bus ne résultait que d’un projet expérimental, sous tutelle du ministère de la Culture. «Nous avons été rattachés à la BNL en 2010, explique Romain Kayser. Tout est plus simple : un résident inscrit dans une bibliothèque du réseau n’a qu’à effectuer un transfert de coordonnées chez nous.» Le Bicherbus effectue 20 000 km par an, en traversant une centaine de localités chaque mois. «Nous couvrons tout le pays, précise Romain Kayser. Lundi dans le Sud, mardi dans le Nord, mercredi à l’Est…»
Une centaine d’étapes par mois
Le Bicherbus est sur la route six jours par semaine, quand le calendrier est chargé. Lundi, nous l’avons «intercepté» à Clemency. Il faut être vif pour l’attraper, le Bicherbus ne stationne qu’une demi-heure ! «Les fidèles sont habitués», nous glisse-t-on. De l’extérieur, le bus ressemble à un car de voyagiste. À l’intérieur, c’est une autre histoire : plus de 4 000 livres sont soigneusement rangés. On admire la prouesse. Ici tout est précis, le client doit trouver son auteur rapidement. «Nous trions les livres par langues : allemand, français, anglais, enfant.» Un autre rayon est spécialement mis en valeur au milieu du bus : celui des Luxemburgensia. «L’étiquette regroupe tous les auteurs luxembourgeois ou publiés par une société luxembourgeoise.» La plupart des ouvrages sont récents.
À peine la porte du bus ouverte, une dizaine de personnes investissent les lieux. Serge Joachim, également chauffeur, s’active pour ranger les premiers retours de prêt. On ne chôme pas ici! «Ce matin, c’était dur sur la route, glisse-t-il. Les embouteillages du Kirchberg nous ont paralysés.» Et pourtant, le bus est à l’heure. Secret de vieux routiers. Dans les rayons, Denise cherche la perle rare. Cette habitante de Clemency utilise le Bicherbus depuis 14 ans. «C’est bien pratique, sans ça, je devrais me rendre à Differdange ou en Ville pour tomber sur une bibliothèque.» Le bus, qui ne reprend ses tournées qu’à la rentrée, a manqué à tout le monde ici pendant les vacances. «Heureusement qu’on peut emprunter 15 ouvrages à la fois !», sourit Henriette. Les auteurs qui cartonnent s’appellent Guillaume Musso ou John Grisham. «Les mêmes qu’en librairie», remarque Romain. Mais le chaland peut choisir, en plus des 4 000 références disponibles sur place, parmi tout le catalogue de la Bibliothèque nationale. «Nous avons mis en place un système de préréservation en ligne», explique Romain. On n’est pas loin de la livraison de livres à domicile !
Pas le temps d’achever la discussion, il faut repartir. Le bus est attendu à 13h10 à Pétange. Il repart à la minute près, tel un train. Les habitants de Clemency, eux, s’en vont à pied. Petit bémol : ils ont un quart d’heure de marche vers le centre, le Bicherbus ne stationnant qu’à l’entrée du village. Pas très pratique !
Hubert Gamelon
Renseignements sur bnl.public.lu
Tél. : 80 30 81
