Peut-on dire que ce couple s’est installé ou alors est-il de passage ?

On a pu identifier la femelle depuis quelques semaines dans le massif de Saint-Hubert parce qu’elle s’est attaquée à des troupeaux de la région et que nous avons pu étudier son ADN. Il s’agit d’une jeune louve née en Allemagne en 2024, soit à 500 km de Saint-Hubert. Elle est arrivée chez nous très jeune, quand elle avait un an, vers le mois de mai. Elle est assez inexpérimentée. À coup sûr, on sait qu’elle s’est établie durant l’été dans le massif et les traces ADN prouvent qu’elle était encore là en septembre. Normalement, il faut attendre six mois pour conclure qu’un loup s’est installé dans une région, mais ici, c’est indiscutable qu’elle a formé un couple avec un loup qu’elle devait attendre.

Et ce loup alors, d’où vient-il ?

On n’en sait rien. On ignore tout de lui. Il va falloir faire des investigations.

Serait-ce possible qu’il s’agisse du couple de loups identifié dans la forêt d’Anlier et qui aurait eu la bougeotte ?

Non. C’est bel et bien un nouveau couple qui s’est installé en province de Luxembourg.

Que va faire la Région wallonne ?

Tout d’abord, il faut délimiter une zone de présence permanente comme on l’a fait dans les Fagnes ou à Anlier. Cette zone comprend le territoire du loup élargi à une périphérie incluant des zones agricoles et d’élevage.

Quelle est la taille d’une telle zone ?

Le territoire du loup a une surface de 15 000 hectares et ici il s’étend sur au moins trois communes : Saint-Hubert, Nassogne et Tenneville. Et pour la périphérie, on se base sur des indices de présence comme des attaques de troupeaux, des témoignages de chasseurs et autres promeneurs, des images prises par des caméras pièges, etc. D’ailleurs nous sommes en train de solliciter les chasseurs pour qu’ils nous fassent remonter les infos. La semaine dernière, on a demandé au Conseil cynégétique de faire remonter la demande.

D’autres loups pourraient-ils venir s’ajouter à ce couple dans le massif de Saint-Hubert ?

Non. Ce couple qui y est installé empêchera d’autres loups d’entrer dans leur territoire.

«Les loups se méfient des humains»

Le massif est très giboyeux : cervidés et sangliers pullulent. Est-ce une garantie que ces loups ne vont pas s’attaquer aux troupeaux en périphérie de la forêt ?

Non. Le site est en effet très giboyeux, mais cela n’empêche pas le loup de s’attaquer à la faune domestique. D’ailleurs il ne fait pas la différence entre proies sauvages et les autres. À ce sujet, je rappelle que les éleveurs peuvent faire appel à de l’aide de la région qui prodigue aussi des conseils pour bien protéger les animaux. Toutefois, on constate que les couples installés rechignent à quitter leur forêt pour s’en prendre à des animaux domestiques, car ils se méfient des humains. Mais bon, cela n’empêche pas les accidents avec les troupeaux.

Ces loups peuvent-ils réguler la surpopulation de gibier à cet endroit ?

Ces deux loups à eux seuls ne vont pas régler la densité de tout, mais ils peuvent en effet avoir une influence sur la faune.

Cette faune sauvage ne va-t-elle pas quitter le massif parce qu’elle a senti la présence de ces deux prédateurs ?

Oui c’est possible qu’on assiste à un déplacement de la faune. Cela a déjà été décrit dans le centre des Fagnes.

Philippe Carrozza
(L’Avenir)