Diamants de sang et trafic international sur fond de conflits africains : le dossier qui sera examiné par le tribunal correctionnel de Thionville, le 28 novembre, n’a vraiment rien de banal.
C’est ce que l’on appelle une bonne pioche. Quand ils stoppent le véhicule de ce chef d’entreprise originaire de la région lyonnaise sur l’A31, non loin de Thionville, à la fin de l’été 2015, les douaniers lorrains ne pensent pas forcément tomber sur pareille cargaison. Sur le conducteur du véhicule qu’ils viennent d’arrêter, ils découvrent, en effet, non pas du khat ou une quelconque autre substance prohibée, mais quatre petits sacs de velours dans lesquels se trouvent autant de diamants taillés de, respectivement, 0,5 carat, 0,6 carat, 1 carat et 1,5 carat… Soit trois pierres plus grosses que la plupart des solitaires et un véritable « caillou ». Des gemmes dont la valeur marchande sera plus tard évaluée à quelque 40 000 euros.
Interrogé sur la provenance de cette marchandise, l’automobiliste assure aux enquêteurs des douanes que tout est en ordre : il aurait acquis les diamants – bruts – en République Démocratique du Congo en toute légalité et produit même une facture d’un montant de 12 000 euros qui, selon lui, le prouve. Arrivées en France, les pierres ont ensuite été taillées par un joaillier lyonnais puis expertisées en région parisienne. Au moment où les douaniers l’arrêtent, l’homme affirme être justement de retour d’Anvers, célèbre place mondiale du commerce de diamants, où il a tenté, sans succès, de négocier ses pierres.
Processus de Kimberley
Malheureusement pour lui, les vérifications et investigations menées par les enquêteurs vont mettre au jour une histoire un peu différente. Ce sont d’abord les entreprises que prétend diriger le suspect qui n’inspirent guère confiance : la première est en sommeil et l’activité de la seconde semble se limiter aux fonctions de boîte aux lettres. Surtout, les diamants transportés devraient, selon les termes du processus de Kimberley, l’être dans des emballages scellés, accompagnés de certificats en bonnes et dues formes. Et non dans de simples pochettes avec, pour tout viatique, une facture d’achat congolaise.
Très vite, les fonctionnaires des douanes soupçonnent un trafic de blood diamonds, littéralement diamants de sang, c’est-à-dire provenant de zone de conflits sur le continent africain et dont le commerce sert à financer les guérillas. Des pierres dont la détention, le transport et le commerce sont, bien entendu, interdits en France.
Pour ces raisons, le Lyonnais fait l’objet d’une citation directe émanant de l’administration des douanes, appuyée par le parquet de Thionville. Il s’expliquera devant le tribunal correctionnel Nord mosellan le 28 novembre.
Hervé Boggio (Le Républicain Lorrain)