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SNCF Lorraine : interdit de faire la bise aux intérimaires et aux sous-traitants


Voilà les cheminots interdits de bisous. Mais pas avec tout le monde... (François Aussems)

Au Technicentre SNCF de Lorraine, les bises pour dire bonjour sont dans le collimateur de la direction. Tollé au sein du personnel.

La missive est tombée jeudi midi sur les boîtes mail des cheminots du Technicentre Lorraine. Elle tient en deux lignes : «Je vous informe qu’à partir de ce jour, il est interdit de saluer par bise toute personne ne faisant pas partie de l’entreprise (entreprises sous-traitantes, écoles – apprenti-e-s, stagiaires, alternant-e-s, etc. –, sociétés d’intérim, etc.). De plus, un comportement trop proche desdits personnels est également interdit.»

Quelques mots sont écrits et soulignés en rouge. Voilà les cheminots interdits de bisous. Mais pas avec tout le monde. Notez bien que le directeur de l’établissement qui gère la maintenance des machines SNCF, Gilles Schwob, classe les employés en deux catégories. Les fonctionnaires qui bénéficient du statut historique de la SNCF, et les autres. Les fonctionnaires peuvent se saluer et se claquer la bise. Mais il ne faut surtout pas se mélanger avec les intérimaires ou les sous-traitants, déclassés pour le coup en sous-catégorie.

«Un mail maladroit»

Au sein du personnel, l’incompréhension a rapidement laissé la place à la colère : «On ne comprend pas les raisons de ce mail. Cela nous fait passer pour quoi ? Pour des hommes au comportement incorrect, s’énerve Jean Riconneau, responsable CGT. Les gars sont furieux. C’est inacceptable qu’une entreprise publique fasse de telles différences entre les catégories d’employés, cela n’a aucun sens. En 2016, il y avait 57 équivalents temps plein chez les intérimaires. Donc eux, on ne peut pas les saluer comme les autres si on en a envie. Cela veut dire quoi ? C’est grave.»

Des cheminots blessés ont déjà demandé à leur syndicat de porter l’affaire en justice. Jean Riconneau, encore : «Toutes les règles d’éthique sont définies par le code de déontologie. Il n’y a pas de trace dans ce code ni de motif valable qui lui permettent de faire ça.»

Forcément, on s’interroge. Qu’est-ce qui justifie une telle décision ? Quel élément a provoqué cette interdiction de bisous ? Réponse de la direction régionale de la SNCF : rien de particulier. «Le directeur du centre technique reconnaît un mail maladroit. Il est allé un peu vite mais il voulait se montrer bienveillant, assure le service presse. Il exprime dans ce mail que les salutations accompagnées d’une bise sont fréquentes chez les cheminots. Or cela peut indisposer et il faut en tenir compte.»

Encore une fois : est-ce que la direction a reçu des réclamations, des plaintes à ce sujet ? «Non, mais il y a tout un contexte national et international. Ce mail s’adressait surtout aux plus jeunes pour que tout le monde adopte le meilleur des comportements.» La SNCF fait donc le lien entre une bise et le harcèlement sexuel. «Le directeur du Technicentre va rapidement rencontrer les syndicats et les agents pour préciser les choses.» En attendant, on ignore si l’interdiction est suspendue. À la SNCF, c’est sûr, ce n’est pas le monde des bisounours.

Kevin Grethen (Le Républicain Lorrain)