À l’image du salon de l’érotisme, ce week-end à Metz, le sexe se vit de manière de plus en plus décomplexée. Exemples dans la région, où les boutiques spécialisées sont en pleine mutation.
Elle se fond parfaitement dans le paysage de la zone commerciale Porte Verte, à Essey-lès-Nancy. Entre un assureur et un opticien. L’enseigne Pink Plaisir et sa grande vitrine sans filtre, aux tenues affriolantes, a ouvert il y a trois mois. A l’intérieur, 350 m² dédiés au plaisir sexuel. Longtemps confinés aux rues mal éclairées des quartiers « craignos », les sex-shops ont désormais pignon sur rue. « Aujourd’hui, on parle de love-shops », corrige d’emblée le maître des lieux, Guy Hoen.
Autrefois à la tête de vidéos clubs, il a vu son business s’effondrer à cause d’internet. Avec deux associés vosgiens, ce Mosellan s’est reconverti dans l’ouverture de grandes surfaces coquines dans les zones commerciales du Grand Est. La première a vu le jour en 2008 boulevard Lobau à Nancy. Six autres ont suivi : Zac d’Augny près de Metz, mais aussi à Reims, Dijon, Strasbourg et Besançon. Eclairage plein pot, rayonnages dignes d’un supermarché, personnel formé, vente de DVD marginalisée, l’endroit séduit une clientèle moins testostéronée. « On reçoit autant d’hommes que de femmes. Ils cherchent à pimenter leur vie de couple ou à séduire et parlent de sexe de manière très ouverte. Le concept repose sur la vente d’huiles de massage, de lingerie et d’accessoires qui ne cessent de monter en gamme », détaille Guy Hoen. Dans ses mains : le dernier jouet à la mode, un œuf vibrant télécommandé !
En caisse, une dame, la cinquantaine, s’achète des tenues sexy. Croisées au rayon godemichés, Estelle et Loly, 28 et 23 ans, font leurs emplettes : « Ce n’est plus un tabou de s’amuser avec son corps. On cherche à passer de bons moments en couple et à faire plaisir à nos hommes. La boutique met à l’aise. Elle n’est ni glauque ni intimidante », confient celles qui s’adonnent aussi à des soirées sex-toys entre copines sur le modèle de Tupperware.
A quelques kilomètres, dans la chaude rue Jeanne-d’Arc de Nancy, Manu Ramenatte a frappé un grand coup en ouvrant il y a six mois le troisième Jacquie et Michel Store, après Paris et Lyon. Fort de ses vingt ans d’expérience dans le milieu, le patron du Club 87 – un sex-shop à l’ancienne de 380 m² – a décroché les droits exclusifs des boutiques de ce site internet porno qui cartonne.
Popularisé par son slogan (« Et on dit merci qui ? Merci Jacquie et Michel »), le site a imposé ses vidéos amateures, humoristiques et aussi franchouillardes que hard. « Je n’ai jamais vu un tel succès. La boutique attire une clientèle jeune qui ne serait jamais venue chez moi avant. Au lieu de se planquer pour rentrer, elle fait des selfies devant la vitrine ! » s’étonne le spécialiste, présent ce week-end au salon de l’érotisme messin. Dans son magasin, l’attirail habituel mais aussi les produits dérivés (t-shirts, mugs, chaussettes, casquettes, etc.) et les DVD de la marque. « Le sexe se vit désormais de manière décomplexée. C’est comme les tatouages. Autrefois, cela faisait mauvais genre. Aujourd’hui, c’est à la mode », décrypte Virginie, la vendeuse. Merci qui ?
Philippe Marque (Le Républicain Lorrain)