Contre la pénurie d’infirmiers, une prime de 7 000 euros sera versée aux nouvelles recrues. Injuste, estime le personnel déjà en place.
Belgique : une prime de 7 000 euros pour attirer du personnel infirmier
Une onde de choc que ces 7 000€ non imposables pour appâter le personnel infirmier. Et cela fait des vagues chez Vivalia. La Province de Luxembourg qui va verser cette prime d’attractivité aux infirmières en vue de lutter contre la pénurie au sein des hôpitaux a-t-elle mesuré la frustration pour les fidèles ?
Cette prime destinée au personnel infirmier nouvellement engagé a été approuvée à l’unanimité par les élus provinciaux. Cette carotte à l’embauche doit respecter des modalités ; comme de rester dans l’intercommunale durant trois années.
Si cela part évidemment d’une bonne intention, la frustration est grande pour celles et ceux qui donnent au quotidien depuis des années, comme Nathalie. Elle parle à visage découvert et témoigne auprès de nos confrères de l’Avenir. Son ressenti est, dit-on, partagé par beaucoup.
Nathalie Lemonnier, vous êtes infirmière à Vivalia Arlon. Vous y travaillez depuis de très nombreuses années, comment avez-vous appris cette décision de verser 7 000€ pour appâter des infirmiers ?
Par des collègues qui ont des enfants et qui ont lu l’info sur lavenir.net. On a lu les articles sur Facebook. Dans un premier temps, cela fait râler. Et puis, on se dit «Alléluia, on va avoir de la main-d’œuvre pendant trois ans». Et dans trois ans, ils auront d’autres priorités, ils feront comme la majorité, ils partiront au Luxembourg. Et ceux qui ont de l’ancienneté, ils ont quoi ?
Vous vous sentez comment ?
Très amère.
La direction vous a avertie ?
Je ne suis pas cheffe de service. La direction n’a pas à me prévenir par mail. Maintenant, cette décision nous fait sourire. C’est vrai, c’est une belle carotte, on va avoir de la main-d’œuvre. Regardez les commentaires sur les réseaux, c’est du genre «Chouette, on déménage pendant trois ans !» et puis ceux-là repartiront avec la prime.
Mais les gens qui ont été fidèles, qui sont restés au poste, qui ont gardé le bateau à flots pendant toutes ces années. Et eux ? Ils ont quoi comme remerciements? Une boîte de chocolats à la fin de l’année !
On parle de tout cela dans le personnel ?
Forcément, on en parle en équipe.
Ce que vous demandez ?
Rien du tout ! Mais pour ceux qui sont là, où est la reconnaissance ? On sait très bien qu’il y a un problème avec le GDL. Que cela contribue fortement au fait que les gens partent ailleurs. On peut le comprendre.
Moi qui suis diplômée française et frontalière française, je le comprends parfaitement. Par rapport à mes collègues belges, je n’ai pas à me plaindre, mais c’est vrai, on a été fidèle au poste, on n’a pas quitté le navire, et c’est quoi la reconnaissance ? 900 euros de prime Covid ?
Pourquoi n’êtes-vous pas partie au Grand-Duché ?
Je suis venue à Arlon, cela m’a plu. Quand on m’a présenté le salaire, encore plus par rapport au salaire français. Je suis considérée comme frontalière avec un diplôme français, j’ai tous les avantages. Maintenant, aller au Luxembourg, oui, il y aurait le salaire, mais il n’y a pas que l’appât du gain.
L’herbe n’est pas plus verte ailleurs. Ceux qui y vont font une croix sur un tas de choses. La façon de travailler, l’ambiance ne sont pas les mêmes. S’ils pouvaient, beaucoup de collègues feraient machine arrière. On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre.
Ce que vous voudriez dire à votre direction ?
Rien ! Strictement rien, je fais mon travail du mieux que je peux. Je conçois le soin infirmier comme j’ai été formée. Mon avis ne changera rien. Je ne pense pas à être la seule à être amère. Avec un peu plus de reconnaissance pour leur personnel, ils garderont les gens.
Je vous ai donné mon nom, je n’ai pas peur des retombées, parce que je fais mon travail. En le disant correctement, on a le droit de s’exprimer. Je pense que ce que je dis, c’est le reflet de ce que pensent beaucoup de mes collègues.
On appâte les gens, mais cela ne les empêchera pas de partir après trois ans. Qu’ils pensent à chouchouter un peu plus leur personnel actuel et peut-être que cela ira mieux !
D’autres témoignages sont à découvrir sur le site de L’Avenir.