Pour la première fois en 2019, ArcelorMittal a admis que des rejets polluants étaient issus de la cokerie. L’industriel a répondu de deux épisodes de pollution devant le tribunal de Thionville ce mardi 10 novembre. Le jugement à la portée hautement symbolique sera rendu le 5 janvier prochain.
Les rejets polluants empoisonnent depuis des années la rivière Fensch à Florange. Pour la première fois en 2019, ArcelorMittal a reconnu être à l’origine d’un incident de pollution survenu le 8 mars 2019 à la suite d’une opération de nettoyage de ses réseaux. L’industriel était, depuis trois ans, sous le coup d’une mise en demeure de la Dreal (Direction régionale de l’environnement) pour ne pas avoir réalisé de diagnostic de ses installations datant de 1954.
Deux plaintes déposées conjointement par la communauté d’agglomération du Val de Fensch, la commune de Florange et la Dreal, ont finalement abouti et portent sur deux épisodes de pollution signalés en mars et en août 2019. La société ArcelorMittal France mais également le chef d’établissement du site de Florange et le chef du département cokerie étaient renvoyés devant le tribunal judiciaire de Thionville ce mardi 10 novembre pour répondre de «déversement de substance nuisible dans les eaux», d’«exploitation d’une installation classée non conforme à une mise en demeure» et d’«exploitation sans respect des règles générales et prescriptions techniques».
«Un effet dissuasif»
Face au tribunal, le directeur d’établissement a détaillé les circonstances qui ont conduit à un rejet massif d’hydrocarbures dans la rivière le 8 mars 2019, caractérisé par la défaillance d’un des deux décanteurs. Interrogé sur le second épisode de pollution survenu le 12 août 2019, il a botté en touche. «Arcelor est un contributeur de la pollution de la Fensch, mais il n’est pas le seul.» Si la cokerie ne fonctionne plus aujourd’hui, «des opérations de dégazage peuvent encore provoquer des rejets d’effluents», révèle ce dernier alors que par un habile tour de passe-passe, la société ArcelorMittal Atlantique Lorraine visée par les plaintes a été dissoute en août 2019, avalée par ArcelorMittal France. «Quand j’entends dire que la Fensch est déjà tellement polluée… Alors un peu plus ou un peu moins… Le ministère public ne peut se résoudre à cette conclusion. Une fermeture du site ne veut pas dire que toute la pollution disparaît», souligne le procureur. Et de demander «un effet dissuasif» pour justifier de réquisitions à la hauteur de la «puissance financière» d’ArcelorMittal : 300 000 euros d’amende et jusqu’à 2 ans de prison et 100 000 euros pour les deux prévenus. La défense, elle, prône la relaxe. Le jugement a été mis en délibéré et sera rendu le 5 janvier 2021.
Catherine Roeder avec Lucie Bouvarel (Le Républicain lorrain)