La mère et la grand-mère du petit garçon ont été mises en examen pour privation de soins par ascendant sur mineur ayant entraîné la mort.
C’est une histoire restée dans l’ombre et le silence. Le 16 janvier, un bébé est né dans les WC du domicile familial de Faulquemont. Et il y est mort. Sans que personne ne s’en rende compte. Elles ont été mère et grand-mère quelques instants. Mère et grand-mère d’un petit garçon de 3,5 kg et 57 cm. Mais les deux femmes assurent ne pas s’en être rendu compte.
Pour comprendre «cette histoire effroyable», juge une source, il faut revenir au 16 janvier dernier. Ce matin-là, un lundi, une jeune femme d’une vingtaine d’années souffre de douleurs au ventre. Elle vit à Faulquemont avec sa mère, qui s’inquiète. Celle-ci lui conseille de prendre un bain pour se détendre, pendant qu’elle file à la pharmacie. Le mal s’accentue. La mère passe quelques coups de fil, prend conseil. Alors qu’elle est en ligne avec le centre 15, sa fille se rend aux toilettes. Un membre du service de régulation décide d’envoyer des ambulanciers privés.
La fille, aide-soignante de profession, se sent mal. Elle saigne. Quelque chose, «une masse» dit-elle, sort et tombe dans la cuvette. Sa mère pense à une fausse couche. Personne ne prête attention, personne ne regarde. La fille se recouche. Les ambulanciers, arrivés 45 minutes plus tard, découvrent une situation qui n’était pas celle annoncée. Ils venaient pour de simples maux de ventre. Or la jeune femme est au plus mal. Il faut la transporter dans un service de soins. Les ambulanciers ne s’approchent pas des toilettes.
La mère se met en contact avec une sage-femme, qui lui demande de prendre son courage à deux mains et d’apporter tout ce qui se trouve dans la cuvette. La professionnelle de santé a besoin de vérifier si l’ensemble du placenta est sorti. Elle s’exécute et place la «masse» dans un sac-poubelle… Une fois le corps du nouveau-né découvert, les autorités judiciaires sont alertées.
Mort des conditions dans lesquelles il a vécu
Alors que la jeune femme est encore hospitalisée, une enquête de gendarmerie est lancée pour homicide volontaire. Une autopsie est pratiquée. Il ne s’agit plus d’une «masse», mais d’un bébé arrivé quasiment à terme. Le légiste est formel : l’enfant a vécu. Le petit corps ne porte pas de traces d’étranglement. Il n’est pas mort de noyade non plus. Mais des conditions dans lesquelles il a vécu durant quelques minutes de vie, selon les premiers éléments.
«Il n’y avait aucun signe d’une grossesse, rien, réagit Me Philippe Quatreboeufs, avocat de la jeune femme. Je crois qu’elle a été dépassée par les événements. Et c’est difficile encore aujourd’hui de prendre la mesure des choses. Imaginez : elle découvre avoir été enceinte, que le bébé est mort et qu’on lui reproche de l’avoir tué.»
Défenseur de celle qui fut grand-mère, Me Marlène Schott confie que sa cliente «a vécu un véritable drame humain auquel sont venus s’ajouter un placement en garde à vue difficile à vivre pour elle puis une présentation devant un juge d’instruction. Si elle reste bouleversée par ce qui s’est passé, elle demeure sereine vis-à-vis de la justice car elle n’a rien à se reprocher pénalement. Elle a d’ailleurs contesté sa mise en examen devant le juge d’instruction.»
Les deux femmes sont mises en examen pour privation de soins par ascendant sur mineur de moins de 15 ans ayant entraîné la mort. Elles risquent la cour d’assises.
Kevin Grethen (Le Républicain lorrain)