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Moselle : ce papa primé pour sa BD qui explique l’épilepsie


« Ce prix, j’ai encore du mal à y croire, confie Adel Bounif. Je ne me considère pas écrivain. Je suis juste un parent-expert. » (Photo : RL)

Papa d’une fillette de 12 ans souffrant du syndrome de Dravet, une forme rare d’épilepsie, Adel Bounif vient de se voir décerner le prix national Handi-livres dans la catégorie jeunesse pour sa bande dessinée Un arc-en-ciel après la pluie. Le Fameckois y démythifie la maladie de manière ludique et accessible. Rencontre.

Il toussote, vaine tentative pour chasser l’émotion qui le submerge, puis s’excuse, enfouissant son nez dans son café-crème qui refroidit. Adel Bounif a beau être rodé à l’exercice , évoquer le quotidien de sa fille, Manel, n’en est pas moins éprouvant. La petite Fameckoise, 12 ans, souffre d’une forme sévère d’épilepsie, le syndrome de Dravet. Elle ne guérira pas. « Le traitement médicamenteux, qu’elle prend trois fois par jour, vise simplement à réduire la fréquence et l’intensité des crises », indique son papa. « Elle vit avec une épée de Damoclès au-dessus de sa tête. » Il y a les crises, imprévisibles, violentes. Les absences aussi. Passée « l’horreur » des premières convulsions alors que la petite n’a que 8 mois, puis le diagnostic après le bilan génétique, glaçant, Adel et sa femme ont apprivoisé la rudesse du quotidien. Une lessiveuse.

L’écriture qui apaise

Mais cette maladie génétique extrêmement rare induit également un retard cognitif important, des troubles du langage, comme la stéréotypie, et des retards moteurs. La maman de Manel a renoncé à son activité professionnelle pour se consacrer à sa fille. Adel, qui occupe un poste administratif au Grand-Duché, s’est, un peu malgré lui, érigé en porte-parole de l’association Alliance syndrome de Dravet, pour laquelle il est référent régional. Parler de cette maladie est son exutoire. Les mots, il les fait danser dans des poèmes, « comme des slams » qu’il débite « à l’instinct ». Il les décline aujourd’hui en bande dessinée, un projet qui l’habitait depuis longtemps. Un arc-en-ciel après la pluie, c’est son nom, a récemment reçu le prix national Handi-livres dans la catégorie jeunesse, décerné par le fonds de dotation Handicap et Société.

« Un handicap invisible »

« J’ai mis toutes mes tripes de papa dans cette BD que j’ai voulue comme un support pédagogique et ludique à destination des enfants, les adultes de demain. » L’album, ludique et coloré, est articulé autour de plusieurs séquences mettant en scène une petite fille souffrant d’épilepsie, qui dialogue tantôt avec un camarade de classe, tantôt avec un neuropédiatre ou ses parents. Les mots sont simples, pour faciliter « l’appropriation ». « L’idée n’était pas d’en faire une revue médicale. Je ne suis pas médecin, simplement parent-expert. Avec ma femme, on a dû apprendre seuls. »

Papa surinvesti au point de s’oublier, Adel Bounif espère lever le voile sur ce « handicap invisible » malmené par les préjugés : « Certaines personnes pensent encore que c’est contagieux… On perçoit les regards quand on se gare sur une place handicapée. Beaucoup de fantasmes perdurent en 2023. » Il aurait, confesse-t-il, « tellement voulu une autre vie ». La sienne est désormais entièrement tournée vers celle pour qui il veut « avoir fait le maximum ».

Un arc-en-ciel après la pluie, d’Adel Bounif, disponible aux Editions du Net.