Mise en sommeil depuis 2018, l’association messine Les Profanes reprend du service. Ses membres veulent promouvoir la visibilité des athées et des agnostiques, par des conférences, des débats, voire une marche. « Il ne s’agit pas d’une guerre contre les religions. Nous avons beaucoup à partager avec les croyants qui reconnaissent l’utilité de la critique des orthodoxies », insiste le nouveau président, Stéphane Aurousseau.
Lancée en 2013, l’association Les Profanes défendait la laïcité face à « l’implication des personnels politiques de tout bord qui usent et abusent du clientélisme religieux ». Ceux qui aiment l’humour se souviendront de l’Ordre du Jedi de Metz qui « dénonçait l’écueil de la reconnaissance de certaines religions, engendrant nécessairement des discriminations ». Elle a œuvré pour obtenir l’apposition de la plaque sur la place de la Laïcité. L’association avait été mise en sommeil en 2018. Elle est relancée par Stéphane Aurousseau et une vingtaine de membres.
Les Profanes reprennent du service avec une nouvelle ligne. Pourquoi ?
Stéphane AUROUSSEAU : « Nous voulons assurer la promotion de l’athéisme et de l’agnosticisme. Nous partons d’un constat, forcément subjectif. Les athées et les agnostiques ne ressentent pas la nécessité du prosélytisme. Pourtant, des intellectuels et des militants, lorsqu’ils s’expriment, sont rapidement menacés, certains sont sous protection judiciaire. C’est très préoccupant. Les traditionalistes d’extrême droite catholique ont toujours existé. Personnellement, je perçois de plus en plus une forme d’extrémisme de l’autre côté de l’échiquier. »
Même à Metz ?
« La première fois que j’y ai été confronté, c’était à une Marche des fiertés (en 2021, des militants antifas s’étaient réunis contre des positionnements de soutien, dans le cadre de l’affaire Mila, N.D.L.R.). Évidemment, il ne s’agit pas de toute l’extrême gauche. Sous couvert d’antiracisme religieux, certains refusent le débat. Il y a eu des insultes, des menaces d’agressions physiques. Cela ressemble à du fondamentalisme religieux. On se retrouve donc entre deux feux. Cela ne concerne pas uniquement les athées et les agnostiques militants, mais aussi tous ceux qui s’autorisent une forme de distance par rapport aux religions auxquelles ils croient. »
Vous intervenez aussi comme militant contre les discriminations dans les écoles, sous une autre casquette. Quel regard portez-vous ?
« La question religieuse revient systématiquement lorsqu’on évoque les discriminations. Pour certains jeunes, la religion est le camp du Bien, elle émane de la liberté et de l’intime, et tout débat est ressenti comme une agression insupportable. Il peut y avoir du mépris, voire de l’agressivité. Il n’y a pas de stigmatisation, les trois grandes religions monothéistes sont concernées. Une partie des jeunes défend une posture identitaire. Dans certaines classes, il n’y a plus de dialogue : ne pas être d’accord, c’est être l’ennemi. Des jeunes ont peur d’exprimer leur point de vue, ils font semblant d’être d’accord parce qu’ils savent qu’ils risquent gros. J’ai vu des jeunes croyants distanciés être rappelés à l’ordre par des camarades, être traité de traître. Pour moi qui milite depuis longtemps pour les droits LGBT, j’ai perçu le même type de réactions il y a quinze ans, à propos de l’homosexualité. »
Comment agir ?
« La laïcité perd sa pertinence si l’athéisme est invisible. Si certains pensent qu’il se résume à ne croire en rien, cela n’appelle pas d’autres commentaires. Nous voulons échanger, cultiver, organiser des conférences, et favoriser une visibilité individuelle et collective, avec l’organisation d’une Pride des Athées. »
Vous n’avez pas peur de cliver ?
« On sait qu’on sera confrontés à des obstacles, mais si on ne s’exprime pas, cela revient à faire reculer nos droits. Il ne s’agit pas d’une guerre contre les religions. Nous avons beaucoup à partager avec les croyants qui reconnaissent l’utilité de la critique des orthodoxies. On va surtout se heurter au fait que les athées, par une forme de pudeur, ne ressentent pas le besoin de s’exprimer. »
Agnosticisme:
Je sais que je peux croire que je sais, mais si je ne sais pas, je ne peux pas croire.
question subsidiaire ; comme savoir?