Des caméras de vidéosurveillance braquées sur le local syndical et les toilettes filmaient les faits et gestes des employés de la FNAC de Metz depuis des années. Alors qu’elle a longtemps nié l’évidence, la direction vient de les mettre hors d’usage. Les représentants du personnel déposent plainte.
À quoi peut servir une caméra dirigée vers la porte des toilettes de ses employés? Pourquoi surveiller le local syndical? La direction de la FNAC n’a pas pu apporter d’éléments de réponses jeudi. Parmi les membres du personnel du magasin de Metz, chacun a son idée sur ce sujet qui cristallise localement les rapports sociaux depuis 2012. Avec le dépôt d’une plainte, le dossier vient de prendre une autre tournure.
Lors du déménagement au sous-sol des Galeries Lafayette, les salariés du spécialiste de la distribution de produits culturels avaient bien remarqué l’installation à profusion de caméras. Mais il y a quelques règles à respecter. «Or, il n’y a jamais eu de mise en conformité avec la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). Le CHSCT (Comité d’hygiène et de sécurité des conditions de travail) et le comité d’entreprise n’ont jamais été consultés», explique Christelle Schaeffer, déléguée CFDT.
Les images sur les téléphones
La caméra braquée sur le local syndical, situé au 5e étage, ne devait être enclenchée que le soir, en absence des salariés. «Pendant six ans, c’est ce qu’on nous a répondu. On nous affirmait qu’il ne s’agissait que d’un système utile en cas d’intrusion.»
La représentante a découvert récemment une autre réalité : non seulement la caméra fonctionnait en continu, mais «en plus, les agents de sécurité recevaient les images sur leur téléphone», s’agace Christelle Schaeffer.
Pendant six ans, les dirigeants locaux pouvaient donc surveiller les faits et gestes des salariés, et savoir ceux qui sollicitaient les syndicats. «Les gens sont extrêmement choqués. Ce n’est pas pareil de travailler lorsqu’on sait que l’on est filmé. Pourquoi faire ça? Pourquoi surveiller également les toilettes?» On y revient. Avocat des instances syndicales, Me Laurent Paté a son avis, lui aussi : «Pour un dirigeant, détenir de manière déloyale des informations, c’est accroître son pouvoir.»
La direction a désormais mis hors d’usage les caméras suspectes. Mais une plainte pour entrave et atteinte à la vie privée a été déposée auprès du procureur de la République. «Nous n’avons plus confiance. Nous irons jusqu’au bout!»
Kevin Grethen/RL