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Metz : le père du petit Corentin en grève de la faim et de la soif


Décès de Corentin : Pierre Jeras, père de Corentin, décédé d'une erreur médicale, lors d'une séance de dédicace de son livre «Corentin», à la libraire Hisler-Even, à Thionville. Photo Pierre Heckler / RL)

Pierre Jeras, le père du petit Corentin, décédé en 2014 à Metz après une opération de l’appendicite ratée à l’hôpital Claude-Bernard, demande le dépaysement du dossier judiciaire, que vient de lui refuser la cour de cassation.

Alors que les deux chirurgiens qui ont opéré son fils mort en 2014 ont été mis en examen pour homicide involontaire il y a une semaine (lire ici et ), Pierre Jeras a débuté ce matin une grève de la faim et de la soif pour exiger le dépaysement de l’enquête judiciaire. « Dès notre première rencontre, le juge d’instruction [le Messin Jean-Marie Carona, N.D.L.R] m’a fait une très mauvaise impression. Avant même de connaître le dossier, il m’a dit qu’il ne fallait pas que nous attendions trop du volet pénal. Que le domaine de la responsabilité dans les accidents médicaux était complexe et qu’il fallait plutôt compter sur le civil [où l’on demande une compensation financière d’un préjudice]… C’était inacceptable. Ensuite l’enquête a traîné en longueur… », témoigne le père de Corentin, mort des suites d’une appendicectomie ratée le 2 novembre 2014 au CHU de Brabois à Nancy, 24 h après son opération-catastrophe réalisée à Claude-Bernard à Metz.

Sa grève de la faim et de la soif est une réaction à la réponse, reçue vendredi dernier, de la cour de cassation qui refuse de transférer le dossier judiciaire de son fils à une autre juridiction. Il l’avait saisie le 30 juin par courrier. Il y dénonçait « une instruction qui n’était pas faite dans un climat de sérénité et célérité nécessaires à l’émergence de la vérité ».

Explications de Pierre Jeras : « Nous avons vécu un véritable parcours du combattant pour obtenir des éléments sur les conditions réelles de la mort de Corentin et c’est pour cela que nous avons ferraillé avec les instances disciplinaires pendant des mois. Nous avons obtenu des informations et des réponses, alors que la justice avançait à son rythme, c’est-à-dire très lentement. Corentin était un enfant merveilleux et je lui dois la vérité sur sa mort », estime celui continuera son activité professionnelle ces prochains jours tant que son corps suivra.

Pourquoi cette grève de la faim aujourd’hui, alors que les deux chirurgiens mis en cause dans la mort de Corentin viennent d’être mis en examen ? Réponse de Pierre Jeras : « Ils vont avoir accès au dossier et trouver tous les moyens pour faire encore traîner la procédure. La justice est une machine à faire taire les victimes, selon moi. Tout comme la santé, en France, est un système fait pour enrichir les actionnaires américains qui dirigent les cliniques ».

La justice messine avait ouvert une information judiciaire pour homicide involontaire une semaine après la mort du collégien âgé de 11 ans, en novembre 2014. Plusieurs rapports d’expertise ont critiqué les erreurs techniques et le retard pris par les chirurgiens, qui ont passé neuf heures au bloc ce 1er novembre 2014. Les deux chirurgiens, Salah Benlahrir, premier chirurgien à s’occuper de Corentin, et Pierre-Noël Chipponi, venu à la rescousse mais qui échoue à contenir l’hémorragie causée par un instrument de la cœlioscopie, ont été jugés par leurs pairs en février 2016 : le premier a une interdiction d’exercer la médecine pendant trois ans ; le deuxième, de deux ans dont un avec sursis.

Alain Morvan (Le Républicain lorrain)