En 2014, un accident de la circulation faisait un mort. Mardi, trois ans de prison, dont dix-huit mois avec sursis, ont été requis à l’encontre du prévenu.
« Nous sommes une famille très unie, et complètement brisée. Il y a deux ans, nous avons perdu quelqu’un qui nous était très cher. Et aujourd’hui c’est un vide… Un vide… » Viviane pleure. Hier, à la barre du tribunal correctionnel de Metz, elle est venue raconter ce 1er mars 2014. Ce jour terrible où elle et les siens ont perdu M., 42 ans. C’était boulevard de Trèves, à Metz. À 20 h 25, Arnaud, un Messin de 25 ans, entame un virage à gauche et percute M., qui circule à scooter. Le choc est violent, M. est projeté à plus de six mètres. Traumatisme crânien. Coma. Il décède trois jours après.
Deux ans plus tard, tête baissée, voix sourde, Arnaud répète : « Je suis désolé, je ne l’avais vraiment pas v u . Je refais mes excuses à la famille. » Il semble à la fois accablé par les remords et assommé par les médicaments. « Je suis dépressif », lâche-t-il. Sans diplôme, au chômage depuis un an, il est tombé dans la drogue à l’âge de 15 ans. Et malgré ses efforts, le soutien de sa famille, une psychothérapie et un traitement de substitution, il n’en sort pas.
« C’est un sentiment de colère qui m’anime. On a le droit de détruire sa vie, mais pas celle des autres ! », lance Me Redouane Saoudi, avocat de la partie civile. « Il n’a jamais réglé son problème avec la drogue et n’était pas apte à rouler. Il faut une réponse pénale appropriée. C’est une question de respect pour les victimes. » Arnaud reste immobile sur son banc. Pâle, il écoute. « Il y a un mort, il vous en faut combien pour arrêter ? » La voix du procureur, Serge Billet, résonne dans la salle d’audience. « Nous pouvons tous être victime ou auteur d’un accident de la route. Une infraction routière peut transformer un honnête homme en prévenu. Il suffit d’une seconde d’inattention. Mais vous… Votre usage de stupéfiant fait de vous un danger au quotidien. » Il requiert trois ans de prison, dont dix-huit mois avec sursis et mise à l’épreuve, assortis d’une obligation de soins et… d’un mandat de dépôt.
« Vous n’avez pas à juger un meurtrier, encore moins un assassin », assure Me Jonathan Savouret, avocat de la défense. « Nous sommes face à un drame terrible et à des familles brisées, mais cette émotion ne doit pas nous mettre des œillères. Il faut rester objectif. » Il met en avant « le courage et la dignité » d’Arnaud, qui, le jour de l’accident, « a pris ses responsabilités. Il n’a pas fui. Il a appelé les secours et a indiqué aux policiers qu’il avait consommé des stupéfiants la veille au soir ». Mais le 1er mars, son corps n’en portait plus de trace. C’est l’expert qui l’affirme. « Ce soir-là, il a grillé une priorité à 5 km/h. Autant dire presque à l’arrêt. Et, même si c’est difficile à entendre pour la famille du défunt, c’est important : le casque de M. n’était pas attaché, il a abordé le carrefour visiblement un peu vite et il avait consommé du cannabis… » Il poursuit : « Arnaud a un problème lié aux stupéfiants, mais vous devez aujourd’hui prendre en compte une infraction simple. Avec une sanction juste et modérée. » Il plaide pour une peine de prison avec un sursis total. « Pour qu’il puisse s’en sortir, il a besoin que la justice lui tende la main… »
Arnaud Munch est reparti libre. Décision le 14 juin.
Sandra Crané (Le Républicain Lorrain)