La catastrophe de Gênes aurait-elle pu se produire sur le viaduc de Longwy ? « Clairement, non ! », pour Rafael Ortiz. Le responsable du service Ouvrages d’art de la DIR-Est explique pourquoi. Et rappelle la manière dont le pont est entretenu.
Une catastrophe comme celle de Gênes peut-elle survenir à Longwy, au niveau du viaduc de la Chiers ?
Rafael Ortiz : Clairement, non ! Longwy n’est pas du tout dans le cadre d’une structure innovante et complexe comme Gênes, avec le viaduc Morandi. Celui de la Chiers est assez classique, avec une dalle béton et un caisson métallique. Le tout se trouve dans un état tout à fait correct. Il est classé comme ‘‘peu inquiétant’’ et caractérisé au sein de la DIR-Est par une notation 2E.
Que signifie cette note ?
2E signifie que l’ouvrage ne témoigne pas de désordre structurel, mais de dégradations pouvant évoluer. Pour le viaduc de la Chiers, la notation indique qu’il y aurait quelques peintures à reprendre. Celui de Piedmont est d’ailleurs classé de la même manière, 2E, en raison de petits désordres sur ses équipements. Notre patrimoine est surveillé selon une échelle de 1 à 3 ; 3 étant un ouvrage atteint dans sa structure. La classe la plus critique, « 3U », désigne des soucis structurels exigeant une intervention assez urgente, dans les cinq ans.
Existent-ils des ponts classés dans la catégorie « U3 » à proximité de Longwy ?
Sur l’A31, c’est par exemple le cas des deux ponts de Richemont, en cours de réparation. Ou du viaduc de Frouard, également en travaux.
De quelle manière est surveillé l’état du viaduc de la Chiers ?
C’est un ouvrage particulièrement surveillé du fait qu’il surplombe, par endroits, une agglomération. Ce caractère urbain explique aussi pourquoi il est pourvu d’écrans de 3 à 4 mètres de haut sur les côtés. Ces dispositifs empêchent, par exemple, qu’un camion ne déverse son chargement par-dessus le pont, après avoir percuté la barrière de retenue.
Les ouvrages de la Chiers et de Piedmont font-ils l’objet de contrôles réguliers ?
Tous deux sont suivis selon le même régime. Nous procédons à une visite annuelle simplifiée, c’est-à-dire un contrôle visuel. Pour les ouvrages d’art soutenus par des piles très hautes, comme ces deux-là, cet examen est un peu limité. Mais tous les trois ans, nous effectuons une inspection plus fouillée : on passe l’ouvrage en revue, on cote chaque désordre, fissure, déplacement, déformation… La somme de tout ça donne la note de l’ouvrage. Enfin, le troisième stade correspond à l’inspection détaillée. Elle est réalisée tous les six ans, avec des moyens lourds et le concours d’un laboratoire spécialisé qui multiplie les photos, cotations et mesures précises. Les derniers examens de ce genre remontent à 2016 pour la Chiers et 2017 à Piedmont.
Le viaduc de la Chiers a été ouvert à la circulation le 6 juillet 1987. Des incidents sont-ils survenus au cours de ces trois décennies ?
Non… pas d’incident considéré comme grave. Seulement un souci dans le réseau de collecte d’eau. Sur le viaduc de la Chiers, toutes les pluies sont récupérées via des avaloirs sur les côtés. Puis elles sont emmenées vers un tuyau cheminant à l’intérieur du caisson. C’est invisible pour l’usager ! Mais ce tuyau métallique s’était corrodé, ce qui a entraîné des fuites et la présence d’eau dans le caisson. La conduite a été changée en 2013. Depuis, nous n’avons plus de souci.
Entretien avec Xavier Jacquillard (Le Républicain Lorrain)