Une sexagénaire de Longwy se bat depuis des mois pour récupérer l’allocation adulte handicapé dont elle estime avoir été flouée durant 22 mois. Un avocat du barreau de Luxembourg, la CGT Longwy et de Meurthe-et-Moselle suivent le dossier de près.
« On envisage toutes les possibilités, comme la saisie du Défenseur des droits, avant le ministère des Affaires sociales et de la Santé et le ministère de la Justice, car on ne peut pas accepter cette situation. Cette affaire est scandaleuse. » Michel Maire, défenseur syndical à l’union locale CGT du bassin de Longwy-Longuyon-Villerupt, Astrid Mattina, secrétaire droits, libertés et actions juridiques à l’union départementale CGT et Me Anthony Winkel, avocat au barreau de Luxembourg, sont remontés. Ils suivent depuis plusieurs mois Mme M., Longovicienne qui selon eux n’a pas touché les aides auxquelles elle avait droit de la part de la Caisse d’allocations familiales (CAF) durant 22 mois, soit plus de 16 000 euros au total.
Une somme qui compte pour cette maman de deux enfants d’origine arménienne et ayant vécu l’horreur en Azerbaïdjan. « Les Arméniens sont massacrés là-bas. Mme M. a ainsi été éventrée, elle en porte les traces de coups de couteau. Elle a demandé l’asile politique en France au début des années 2000. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides n’a pas donné suite, mais le préfet lui a finalement accordé une carte de séjour, valide jusqu’en 2021, pour vie privée familiale. Elle vient de demander sa nationalité française. Mais la situation précaire dans laquelle elle se trouve est très difficile. Et on lui refuse cette aide de plus de 16 000 euros qu’on lui doit. C’est intolérable. »
Un handicap sévère
La dame au regard triste, qui possède une formation de couturière-modéliste, s’est en effet fait opérer d’une double hernie discale. Mais l’intervention des médecins s’est soldée par une sciatique, qui la paralyse depuis. « Jusqu’à ses 61 ans, elle devait toucher l’allocation adulte handicapé (AAH), soit 800,80 euros par mois à l’époque, avant d’effectuer sa demande de pension. Elle a eu trois refus. La CAF s’est pourtant engagée à lui verser l’AAH jusqu’à ses 63 ans. Mais elle ne l’a pas fait. Mme M. n’a donc rien touché entre le 9 septembre 2014 et le 30 juin 2016. »
Au tribunal des affaires de sécurité sociale, le dossier n’aboutit pas. « Mais le recours déposé est victorieux au niveau de la Cour d’appel de Nancy, condamnant la CAF à verser 16 500 euros, plus 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La CAF s’est pourvue en cassation. Et à Paris, le 24 janvier 2019, le tribunal lui a donné raison, sans se justifier et en violation manifeste des textes de loi. »
Les trois compères émettent une hypothèse. « Il y aurait des milliers de personnes dans le même cas. Et l’immense majorité des gens s’arrêtent au premier jugement, car c’est coûteux d’aller en justice. Si le tribunal nous donnait raison, plein d’autres demandeurs auraient pu s’engouffrer dans la brèche. Sauf que tout ça n’est pas notre affaire. Mme M. est dans son droit. Et la loi reste la loi. On ne peut pas faire n’importe quoi avec les textes. »
Sébastien Bonetti (Le Républicain Lorrain)