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Les Émaux de Longwy se battent pour leur avenir


L'entreprise, fondée en 1798, fabrique à la main des céramiques colorées à l'émail, uniques en leur genre.

Victime du «marasme économique», la Manufacture des Émaux de Longwy, faïencerie bicentenaire du nord-est de la France, est à la recherche d’un nouveau souffle, tout en maintenant son ADN.

L’entreprise, fondée en 1798, fabrique à la main des céramiques colorées à l’émail, uniques en leur genre. Son âge d’or remonte à l’entre-deux-guerres mondiales, aux grandes heures de l’Art déco. Son président, Martin Pietri, a demandé en septembre son placement en redressement judiciaire, pour lui «donner de l’oxygène» et «des forces pour affronter l’avenir», retrace-t-il.

Un redressement judiciaire permet notamment de geler les dettes et d’obtenir des remises de dettes et des délais de paiement. La durée de la procédure est de six mois, renouvelable une fois.

Jeudi, un premier point de situation doit avoir lieu au tribunal, et Pietri se dit confiant : «On a eu un surcroît d’activité, on a pu faire remonter notre trésorerie».

Les salariés font de leur côté leur maximum en coulisses pour honorer l’afflux de commandes de cadeaux de Noël : heures supplémentaires, renforts, la faïencerie se transforme en fabrique du père Noël.

«On fait tout pour que ça perdure», souligne Catherine Meneghin, employée depuis 39 ans comme sa mère. «Je n’ai pas envie que ça ferme, que l’histoire se termine».

De la réception de la terre à l’expédition, rien n’est sous-traité aux Émaux de Longwy : la quarantaine de salariés réalise l’ensemble du travail. «On est une chaîne», souligne Meneghin.

Que ce soit dans la première étape de coulage ou une fois la terre séchée, lorsque les décorateurs entrent en scène, les salariés disent leur «fierté» de travailler artisanalement.

Pinceau à la main, la décoratrice Chloé Albrecht, jeune recrue formée par ses collègues il y a trois ans, s’attelle à remplir de couleur, minutieusement, une boule de 35 centimètres de diamètre, nécessitant une grande précision et de la patience… «Deux jours et demi de travail» environ. Un métier «passion» pour la jeune femme.

De manière générale, le processus de fabrication peut durer, «en fonction de la complexité des décors», entre quatre semaines et «parfois plus d’un mois et demi, deux mois», souligne Pietri.

Les employés comme le président de l’atelier se disent touchés par le soutien apporté par les consommateurs «en Lorraine, en France et dans le monde».

Le millier de pièces d’une chouette bleu turquoise, vendue pour soutenir l’entreprise dans cette phase difficile, s’est ainsi écoulé rapidement cet automne, au prix de 150 euros l’unité.

Facture énergétique

«Malgré tous nos efforts, les crises, le marasme économique et les tensions internationales fragilisent notre situation, au risque de menacer nos emplois», écrivait l’entreprise pour justifier cette édition spéciale.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, début 2022, il a fallu adapter la cuisson des faïences pour éviter de faire exploser la facture énergétique liée aux cinq fours, qui chauffent entre 650 et 1.020 degrés.

«On fait partir la cuisson un tout petit peu avant le début des heures creuses», tout en laissant refroidir lentement à la fin, explique la directrice de l’atelier, Coralie Marchal. Le prix de l’or, avec lequel sont ornés de nombreux objets, a également flambé.

En 2015, l’entreprise avait été sauvée de la liquidation en étant reprise par la société de mobilier d’art Emblem, cofondée et gérée par Martin Pietri.

Depuis, de nouveaux projets se mettent en place, selon Pietri. Parmi eux, des collaborations avec de grandes maisons du luxe et des stylistes de renom. Mais cela ne fait que deux ans que ce travail a fini par se traduire par «un décollage de notre chiffre d’affaires», selon lui.