Dominique Klein, bagueur de cigognes pour le Muséum d’histoire naturelle, dresse le bilan de la nidification de l’échassier en Moselle en 2016.
L’Alsace n’est pas l’unique mère patrie de la cigogne. La Lorraine revendique aussi ce statut. Dominique Klein, ornithologue sarregueminois et bagueur de l’oiseau pour le compte du Muséum national d’histoire naturelle, en apporte doublement la preuve. « Les premières traces de la présence de la cigogne en Moselle datent de 1474, à Metz. La commune de Solgne veut dire cigogne en patois lorrain. Cela prouve bien qu’il y a toujours eu des cigognes ici et qu’elles n’appartiennent pas qu’aux Alsaciens. »
Cette guéguerre réglée, Dominique Klein s’est penché sur l’évolution et les chiffres de la nidification en Moselle. Le département comptait 21 nids en 1935, sept en 1950, un en 1977. « En 1935, tous les nids se trouvaient dans les arbres. La Société d’histoire naturelle de la Moselle en avait déduit que les toits lorrains ne convenaient pas aux oiseaux », rappelle-t-il, un brin dubitatif.
Afin de réintroduire la cigogne en Moselle, un premier enclos fut aménagé en 1977. « On se disait qu’elles disparaissaient lors des migrations et on a voulu les empêcher de migrer en les enfermant pendant trois ans dans un enclos pour supprimer leur instinct migratoire. » Le premier est construit à l’étang de Lindre, le deuxième en 1980 au parc de Sainte-Croix.
« Tous les trois ans, on relâchait les petits. Le développement fut long. En 1990, on recensait une dizaine de couples en Moselle.» L’an passé, 79 communes ont abrité 255 couples. Sept colonies (plus de 17 nids dans une même localité) sont installées à Harprich, Lelling, Imling, Rhodes, Sarralbe, Bistroff, Lindre.
Seulement 168 petits à l’envol
Les supports de nidification sont variés. Quarante-six pour cent des cigognes choisissent de grands arbres isolés et souvent morts. Leur envergure de 2,20 m nécessite un espace suffisant. Un sapin ne fait absolument pas l’affaire, sauf s’il n’a plus de pointe. Vingt-deux pour cent optent pour des poteaux, 16 % préfèrent des lampadaires. Enfin, 13 % se posent sur des bâtiments et 2 % sur des lignes haute tension.
En 2016, Dominique Klein a recensé seulement 168 cigogneaux à l’envol. « C’est catastrophique. Normalement, le taux de fécondité est de 2,5. Cela correspond à 625 oiseaux », relève l’ornithologue qui explique ce phénomène par le froid, la pluie incessante du printemps dernier, le manque de nourriture.
Le spécialiste s’est aussi penché sur l’origine des cigognes aperçues dans le département. Soixante pour cent ne portent pas de bagues. Vingt-quatre pour cent sont françaises, 11 % allemandes, 2,5 % helvètes. Le reste comprend diverses nationalités : belge, espagnole, hollandaise et suédoise.
Marie-Claire Föll (Le Républicain lorrain)