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Les autotests salivaires, une solution promue à Liège qui voudrait faire école


Fabrice Bureau, vice-recteur à la recherche de l'Université de Liège, montre comment prélever sa propre salive pour les tests de détection de Covid-19. (photo AFP)

« À faire le matin, à jeun, avant de se brosser les dents ». Dans le hall du bâtiment principal de l’Université de Liège, des étudiants viennent récupérer des kits de dépistage salivaire, un procédé que ses concepteurs espèrent voir utiliser à plus grande échelle.

Derrière une table où sont disposées des piles de boîtes blanches, deux étudiantes vérifient les cartes d’université qui donnent droit aux kits, donnent les consignes aux novices, et se chargent de récupérer les tests effectués. Les boîtes partent comme des petits pains. En fin de matinée mercredi, plus de 560 avaient déjà été écoulées.

Ruben Ponton, un étudiant en traduction et interprétation, prend un kit en sortant de son cours d’anglais. Depuis que l’opération a commencé fin septembre, il en est à son troisième. « Je viens le chercher le mercredi, j’ai le résultat le vendredi soir. Ce n’est pas obligatoire mais c’est important donc je le fais chaque semaine. Si je suis positif, je ne viens pas en cours », explique  le jeune homme de 20 ans.

La technique, mise au point par l’Université de Liège, ne nécessite pas l’intervention de personnel médical puisque l’utilisateur recueille lui-même sa salive dans un tube muni d’un entonnoir. Elle se présente comme une alternative rapide au prélèvement nasal réalisé à l’aide d’une tige, une solution pour désengorger les centres de tests pris d’assaut.

Une fiabilité de l’ordre de 60 %

But de cette initiative inédite: « faire la démonstration que ces kits d’autoprélèvement peuvent être utiles et permettre dans une université de 30 000 personnes de juguler la propagation de l’épidémie », explique le professeur Fabrice Bureau, immunologiste et vice-recteur à la recherche. « L’idée est ensuite de mettre cela à disposition d’un plus grand nombre de personnes », ajoute-t-il.

Lors de la deuxième semaine des tests – qui sont anonymes et gratuits –, le taux de positivité chez les étudiants était de 3,6 % et celui du personnel de l’université de 0,9 %, des chiffres qui ont plus ou moins doublé en une semaine. Les personnes testées positives sont appelées à s’isoler et peuvent obtenir des dispenses de cours.

La méthode a certes une moins grande fiabilité que le prélèvement nasal -de l’ordre de 60% contre 80-90%-, car « il y a moins de virus dans la salive », explique son collaborateur, le virologue Laurent Gillet, cocréateur du kit. Mais pour les gens qui ont une très forte charge virale, la fiabilité est de « plus de 95% », assure-t-il. En outre, il est plus facile à faire que le frottis naso-pharyngé : il peut se faire de manière répétée, ce qui « pallie le défaut de sensibilité » du test, argumente-t-il.

Pour lui, la formule a vocation à s’appliquer à « certaines populations déterminées, comme le personnel soignant et le personnel des maisons de retraite », en contact avec un public vulnérable, qui « pourraient se faire tester de manière régulière avec un résultat rapide, pour pouvoir contrôler la propagation du virus au sein de ces collectivités ».

Files d’attente

Pour soulager son centre de dépistage accessible en « drive in », dont les files d’attente atteignaient parfois huit kilomètres, le CHU de la ville wallonne a cette semaine mis à disposition de la population ces tests salivaires, prenant en charge leur coût (12 euros hors taxe).

Public visé : les personnes asymptomatiques ayant été en contact avec une personne positive. Mais en quelques jours à peine, les centres distribuant ces kits ont été débordés par la demande et le coût devenu trop lourd, selon Sandra Delcour, responsable des prélèvements au CHU de Liège, qui a annoncé que l’initiative se terminerait dès la fin de la semaine.

La responsable souhaite une « réaction des dirigeants pour fournir une alternative à la population ». Les professeurs Bureau et Gillet, qui sont en pourparlers avec les autorités régionales et fédérales, espèrent aussi voir leur procédé reconnu prochainement.

Le laboratoire peut actuellement réaliser chaque jour de 6 000 à 8 000 tests naso-pharyngés et traiter 6 000 autoprélèvements salivaires avec l’ambition d’atteindre 18 000. Point crucial, l’équipe fabrique elle-même son réactif, déjà validé par les autorités.

AFP/LQ