Huit heures, ça peut paraître « peu de chose », soupire Me Zakia Aït Slimane. Pour les parents de Bérényss, cette parenthèse a suffi à transformer leur vie, leurs habitudes et à fragiliser leur existence.
En avril dernier, ils ont cessé de respirer pendant ces huit heures. Jusqu’à ce que leur fille soit retrouvée, en bonne santé, à Montzéville, un petit hameau des Ardennes, déposée là par l’homme à l’origine de leurs tourments. Un homme recherché par tous les gendarmes de Lorraine après avoir kidnappé l’enfant de 7 ans, à quelques mètres de la maman, dans le village de Sancy, au nord de Briey.
Eric Fauchard, un agriculteur meusien de 48 ans, a été interpellé dès le lendemain, mis en examen pour enlèvement, séquestration et agressions sexuelles. Puis incarcéré. Une cellule dont il n’a pas bougé.
Dix mois ou presque sont passés depuis cette onde de choc traumatisante. L’enquête est achevée, le mis en cause sur le point d’être jugé. Déjà. Le quadragénaire est attendu mardi sur le banc du tribunal correctionnel de Briey. Les parents de Bérényss seront présents. « Ils veulent le voir. Ils veulent savoir qui est à l’originaire de tous leurs maux. Parce que leur vie a été bouleversée, emportée par la peur ressentie », relate Me Aït Slimane.
Pourquoi Sancy ? Pourquoi cet enfant ?
Le procès doit aussi être le temps des réponses. Celles qui se font attendre chez le mis en cause. En garde à vue, puis devant la juge d’instruction de Briey, Eric Fauchard n’a pas expliqué son geste. Ou si peu.
« J’avais des soucis. J’étais perturbé par des plaintes de mes deux nièces pour agressions sexuelles et des problèmes avec la Mutuelle sociale agricole », s’est-il justifié en substance au cours de l’information judiciaire. « C’est court », grince l’avocate de la famille.
C’est peu face aux questions suscitées par le dossier. Pourquoi cet habitant de Montzéville, près de Verdun, est-il venu à Sancy ? A-t-il repéré les lieux avant ? Pourquoi Bérényss ? Dans ses auditions, le ravisseur présumé évoque un coup de tête. Mais il avait quand même des bonbons pour attirer l’enfant au coin de la rue, à l’abri des regards.
Une fois qu’elle est montée dans le véhicule blanc, Eric Fauchard lui a ordonné de baisser la tête et de se cacher de la vue des adultes présents, notamment de sa mère. Le comportement d’un homme sûr de lui, réfléchi, méticuleux. L’enfant a passé quelques heures dans une pièce de la ferme de Montzéville. Une pièce très chauffée. « Pour qu’elle se retrouve en culotte », pense Me Aït Slimane. Que voulait-il faire d’elle ? Toujours pas de réponse claire. « Je suis persuadée que l’alerte enlèvement a été déterminante et a permis que cela finisse bien. Une des filles du prévenu a diffusé l’alerte et envoyé un SMS à son père vers 22h. A 23h, la petite était retrouvée dans les Ardennes. Il nie mais je suis persuadée qu’il a décidé de la libérer à ce moment-là. » Dans le cas contraire ? « Je préfère ne pas y penser. »
Aucune trace de violence
Bérényss n’a été ni violentée ni agressée sexuellement durant son rapt. Cette prévention n’a pas été retenue contre le prévenu. Une trace ADN de l’auteur présumé a été isolée mais sur la partie extérieure de la culotte de la petite. « Elle a eu de la chance, il faut dire ce qui est », souffle encore l’avocate. Cette trace a permis aux gendarmes d’identifier le ravisseur et de l’interpeller le 28 avril au matin.
Kevin Grethen (Républicain Lorrain)