Des conditions de travail qui se dégradent quels que soient les services. Les salariés du CHR fatiguent. Ils témoignent. Et la CFDT a décidé d’agir. Le syndicat veut alerter et obtenir des réponses.
Capucine aimerait revenir quelques années en arrière, « quand l’ambiance, le relationnel avec les équipes de soins dans les services était encore sympa ». Aujourd’hui, l’aide-soignante avoue la fatigue. « Il manque 40 % d’aide-soignantes dans notre service, donc pendant les Week-end nous travaillons à 3 au lieu de 4 avec un horaire transverse ». Capucine à quelques années de service à son actif, tout comme Cloé qui fait partie du personnel administratif.
« On travaille à la tâche , explique-t-elle, dans des boxes fermés et on ne peut accorder plus de 2,3 minutes par patient pour constituer son dossier alors qu’on demande de plus en plus de renseignements, on fait la mise à jour des cartes Vitale, on vérifie les droits… On reçoit 110 patients par guichet, par jour en 7 h 30. La cadence devient infernale. Le matin dès notre arrivée, il y a déjà 15 voire 20 patients qui attendent et ils nous disputent parce qu’ils ne peuvent pas stationner, parce que le parking est payant. Le froid, les défections de chauffage, l’agressivité et je ne parle même pas de problèmes informatiques récurrents. »
Au CHR Metz Thionville, comme dans l’ensemble des hôpitaux de France, le personnel hospitalier s’essouffle. « Les agents , ajoute Patricia, aimeraient bien ne plus être appelés pour assurer des remplacements. Ils aimeraient encore pouvoir avoir trois semaines consécutives de congé en été, mais pour les obtenir, c’est l’enfer. On assure toujours le même boulot, mais avec des personnes en moins et sur des plages horaires plus longues. »
Pourtant ces femmes et ces hommes ne baissent pas les bras. Tous avouent se préoccuper des patients, tous révèlent qu’ils n’ont plus le temps « de prendre le temps ». « Quand on entre dans une chambre et qu’on regarde déjà la montre, c’est mort. »
« On estime qu’on a atteint la limite du système » dénonce Jeanne Gérardin, secrétaire adjointe au syndicat CFDT, on ne tient plus compte de l’humain. » « L’hôpital a atteint l’équilibre financier, reprend encore Denis BAron, délégué syndical CFDT, mais à quel prix. Au détriment de la prise en charge du patient. »
Faire des choix
Mathilde, l’infirmière confirme. Elle enregistre plus d’une centaine d’heures de travail supplémentaires sur un ou deux ans. « Nous avons de plus en plus d’écritures informatiques, moins de relation avec les patients, j’ai parfois l’impression de ne plus être infirmière. » « Parfois on n’a même pas le temps de mettre un patient, invalide, au fauteuil. »
En cause, le manque de personnel, les arrêts de maladie. « En 2015, le taux d’absentéisme s’élève à plus de 400 agents par jour (8,14 %) auquel s’ajoute un turnover de 6,3 %. Les heures supplémentaires sont exponentielles et inacceptables , reprend Denis Baron : « 234 514h soit l’équivalent de 153 postes ! ». L’infirmière ajoute que les dimanches les effectifs sont réduits alors « qu’il faut répondre aux familles et à leur agressivité. Les soins par contre sont aussi constants que dans la semaine. ».
Et de se souvenir, qu’un jour, quasiment au même moment, elle a dû gérer trois malaises en même temps. Seule. « Alors vous êtes confronté à des choix. »