L’homme avait défrayé la chronique judiciaire entre 2005 et 2010 pour avoir monté un groupe sectaire à Algrange, en Moselle. Condamné, en fuite, puis rattrapé par la prison en 2010, il est très actif sur internet.
L’ex-gourou d’Algrange rebondit sur… YouTube ! Mêmes discours ésotériques, mêmes obsessions sur les ovnis, mêmes démonstrations de karaté. La mise en scène de sa (pseudo) puissance spirituelle sur les vidéos de sa chaîne YouTube est peut-être encore plus spectaculaire. Parlant de lui à la troisième personne, le Lorrain, qui fut condamné à un an de prison ferme par la cour d’appel de Metz pour violences et séquestration après son arrestation à Malte (1), se qualifie désormais régulièrement de « blind samuraï » ou de « blind shaolin monk ».
Comprendre « le samouraï aveugle » ou « le moine shaolin aveugle ». Sur fond de musique new age, le présumé non-voyant célèbre son habileté à percevoir les objets, réalise des prouesses en alignant les paniers de basket ou se filme jouant au tennis de table ! Sur Facebook, il poursuit son prosélytisme en développant d’obscures théories sur la création du monde par les extraterrestres… Mieux, il se plaint, dans une longue vidéo autoproduite, de son éviction de l’île de Lampedusa alors qu’il voulait, selon ses dires, prêter ses talents de traducteur aux humanitaires déjà à l’œuvre, sur le terrain, au soutien des migrants. Bref, le gourou lorrain se réinvente sur internet…
Réseaux espérantistes
Rien d’illégal ni même d’inquiétant a priori dans tout cela. Mais une adepte du langage universel espéranto – le quinquagénaire lorrain se présente désormais sous son identité espérantiste – s’est néanmoins interrogée sur ce néoprofesseur très sûr de lui et convaincant comme à son habitude. « Il a fait son apparition dans les réseaux espérantistes il y a quelques mois et est très actif depuis », témoigne la jeune femme, installée en région parisienne. Elle s’est rendu compte que l’ex-gourou lorrain organisait des stages de langage universel. « C’est lors de l’inscription que j’ai compris qui c’était. ».
Une des victimes de l’époque de la secte Minh Vacma à Algrange a également réagi hier. « Je savais plus ou moins qu’il était passé par l’Allemagne. Je sais toujours à peu près où il en est, sans le pister pour autant. J’ai mis sept à huit ans pour tourner la page », raconte l’homme. Il a été séquestré en 2005 par la secte, soumis aux règles rigoristes de la communauté de la vallée de la Fensch et aux punitions du maître de l’époque. « Il faut toujours qu’il en rajoute sur ses pouvoirs, même si c’était quelqu’un d’impressionnant, de marquant. Je sais qu’il était diabétique, qu’il avait des problèmes aux yeux. Il voit flou », explique-t-il, minimisant les exploits de l’ex-leader de Minh Vacma.
Secte made in France
Dans le livre qu’il a publié en 2012, l’ex-juge d’instruction Georges Fenech, qui a dirigé la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), avait classé le « groupe d’Algrange » dans les sectes « made in France », où dix adeptes étaient retenus en Moselle autour d’un gourou charismatique « prêchant l’imminence de l’Apocalypse ».