À Hayange, la cérémonie du 19-Mars a viré à la foire d’empoigne : un élu FN a préféré lire un texte du maire plutôt que le discours du secrétaire d’Etat, comme il est d’usage. Les anciens combattants veulent porter plainte.
Un message posté sur sa page Facebook voici quelques jours avait donné le ton : Fabien Engelmann, maire Front national de Hayange, annonçait qu’il ne participerait pas à la cérémonie du 19-Mars, journée nationale du souvenir en hommage aux victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie. Et pour cause : l’élu ne reconnaît qu’une seule date pour marquer la fin du conflit en Algérie, celle du 5 décembre 1962. Alors il s’est abstenu…
Son représentant, en revanche, l’adjoint aux travaux Francis Langlois, accompagné du conseiller municipal René Heidmann, a fait la démonstration qu’ici, les choses peuvent vite déraper.
Devant le monument aux morts de Hayange-Marspich, l’adjoint au maire a pris quelques libertés avec le protocole officiel, préférant la lecture d’un communiqué de Fabien Engelmann au texte officiel du socialiste Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État chargé des Anciens Combattants. Dans les rangs de la Fnaca (Fédération nationale des anciens combattants d’Algérie), du Souvenir francais et de l’UNC (Union nationale des anciens combattants), cette légèreté n’est pas passée. « On n’a jamais vu ça ! », témoignent Jean Paolini, président de la Fnaca, et le trésorier Jean-Baptiste Migloiretto, encore sous le choc. « Immédiatement, on lui a demandé d’arrêter cette lecture. « C’est une insulte aux anciens combattants », qu’on lui a dit. Mais il continuait, il continuait ! »
Dans l’agitation, l’élu aurait administré une claque à une jeune femme tentant de lui arracher son discours. Et le lecteur zélé aurait lui-même écopé d’un coup de drapeau. Ambiance.
« Scène surréaliste »
La scène a été jugée « surréaliste » par les observateurs. « Les gens criaient : « La honte ! La honte ! »» La Sonnerie aux Morts et La Marseillaise ont été lancées précipitamment, mais l’élu frondeur n’a rien lâché, poursuivant sa lecture jusqu’au départ du cortège. Abondamment hué, Francis Langlois a finalement eu le bon goût de ne pas s’inviter au pot de l’amitié…
Jean Paolini, lui, ne décolère pas. « C’est plus qu’une déception. Il y a deux ans, le maire nous félicitait pour tout ce qu’on faisait. On le ressent comme une trahison. Ça nous fait mal au cœur, il n’a pas respecté ce moment extrêmement important », soupire le médaillé militaire. Présente également aux côtés de membres de l’association d’opposition Hayange Plus Belle ma Ville, la conseillère départementale Nathalie Chini s’est dite « dépitée ».
La Fnaca veut porter plainte
Contacté, Fabien Engelmann s’est aussitôt rangé derrière Francis Langlois, qu’il dit « soutenir à 100 % ». Son discours « plus personnel » relayé par l’adjoint aux travaux ? : « On avait tout à fait le droit, ça se fait dans beaucoup de mairies ! En revanche, il est inacceptable de ne pas avoir laissé M. Langlois finir son discours. » Tout aussi inacceptable, selon lui, que de commémorer le 19-Mars. « C’est une mascarade ! Ces amnésiques oublient les Harkis, les pieds-noirs ou les rapatriés de la guerre d’Algérie. Je suis issu d’une famille de pieds-noirs, alors ne me parlez pas de 19 mars ! »
La Fnaca, justement, n’entend pas passer l’événement sous silence. En plus d’exiger des explications auprès du maire, les anciens combattants veulent déposer plainte.
Joan Moïse (Républicain Lorrain)