Ce pourrait être pour la Lorraine l’un des dommages collatéraux de la création de la Collectivité européenne d’Alsace. En obtenant de l’État le transfert de la gestion des autoroutes alsacienne, la CEA va pouvoir mettre en place une écotaxe qui pourrait entraîner un report de trafic vers… l’A31.
Ce n’est pas la première conséquence qu’on imagine en pensant à la création de la toute nouvelle Collectivité européenne d’Alsace (CEA). Et pourtant… Ses dommages collatéraux pourraient se faire ressentir jusque sur le trafic d’une A31 qui n’en avait vraiment pas besoin. Plusieurs élus lorrains le craignent depuis près d’un an et demi. Car parmi les compétences récupérées par la nouvelle collectivité, l’État lui a transféré la gestion de 300 kilomètres de routes et autoroutes, dont l’A35 qui traverse l’Alsace du nord au sud. Les élus alsaciens y voient l’occasion d’y mettre en place une écotaxe, cette fameuse redevance poids lourds. Elle pourrait être au mieux source d’importants revenus pour leur collectivité. Et au pire dissuader certains routiers, ce qui permettrait aux Alsaciens d’alléger leurs autoroutes souvent saturées.
«Itinéraire bis de l’Alsace»
Problème : les transporteurs qui voudront se soustraire à cette taxe devraient se reporter sur les axes voisins. À commencer par l’A31, qui leur permettra d’effectuer au passage un plein d’essence à moindres frais. Deux sénateurs de Moselle et de Meurthe-et-Moselle, Jean-Marc Todeschini et Olivier Jacquin, rejoints par Jean-Marie Mizzon et même l’Alsacien Jacques Bigot, avaient été les premiers à mener la fronde. François Grosdidier l’avait aussi fait de son côté. Refusant que la Lorraine et l’A31 ne deviennent l’itinéraire bis de l’Alsace», ils avaient réussi à faire passer au Sénat un sous-amendement étendant à la Moselle, la Meurthe-et-Moselle et les Vosges la possibilité de mettre en place cette taxe poids lourds sur le trafic marchandises étranger. Mais l’Assemblée nationale avait voté sa suppression deux mois plus tard.
«On continue à alerter»
En juillet 2019, Patrick Weiten, président du Département de Moselle et Mathieu Klein, alors président du Département de Meurthe-et-Moselle s’en étaient déjà émus, appelant Jean Rottner à se mobiliser pour que cette écotaxe soit régionale. «Elle n’a de sens qu’à cette échelle. La mobilité ne se joue pas à la seule dimension alsacienne. Le transit doit être examiné de manière globale et seul le Grand Est peut le faire», disait à l’époque le premier. «On nous avait promis que tout ceci serait examiné dans le cadre d’une grande loi Transports qu’on attend toujours», souffle Jean-Marc Todeschini, qui ne désarme pas pour autant : «Nous allons continuer à alerter sur ce point et nous saisirons la première occasion législative pour revenir dessus.»
Philippe Marque (Le Républicain lorrain)