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Généraliste messin atteint du Covid : «Je ne suis pas passé loin»


«J’ai fait une sérologie qui a révélé des anticorps mais pour combien de temps ?», s’interroge le Dr Meunier, placé en réa à Mercy, début mars, après avoir contracté le Covid. (Photo : D.-A.D./RL)

«J’ai repris du poil de la bête. Le Covid, la réa et tout ça, c’est derrière moi maintenant mais je pense que je ne suis pas passé loin», explique Gilles Meunier, médecin généraliste messin qui a été intubé et a vécu 18 jours d’hospitalisation. Un récit qui glace le sang, une terrible prise de conscience. Témoignage…

«Le Covid, je n’ai pas eu le temps de m’en méfier. Au tout début, on ne prenait pas plus de précautions, c’était une grippe avec de la fièvre. J’ai été le premier médecin malade sur Metz ou l’un des premiers», raconte Gilles Meunier, généraliste installé à Queuleu depuis 28 ans. «Ce virus, je l’ai attrapé par un patient que j’ai vu six jours avant d’être malade. Cet homme est d’ailleurs décédé quand j’étais hospitalisé à Mercy. Un mois et demi après tout ça, je vais bien même si je suis encore essoufflé. Les quinze premiers jours après ma sortie de l’hôpital, j’étais exténué.» Retour sur deux mois d’un terrible calvaire après lesquels ce médecin de 57 ans a le «sentiment de ne pas être passé loin de la mort».

«Un blanc de dix jours»

Tout a débuté par un simple, presque trop banal, symptôme grippal le 6 mars en rentrant du cabinet médical. «J’avais des frissons, courbatures, maux de tête et de la fièvre jusqu’à 39 degrés. J’ai pris du Doliprane et suis resté couché jusqu’au lundi. Je n’avais pas de toux ni de mal à respirer donc je ne me suis pas inquiété plus que ça. C’est le mardi matin, en me levant, que j’ai constaté que j’étais essoufflé même au repos. J’ai appelé le centre Covid qui m’a donné rendez-vous le jour même en début d’après-midi.» Arrivé à Mercy, il enchaîne les examens, le verdict tombe vers 16 h. «La radio pulmonaire n’était pas bonne. J’étais en manque d’oxygène. Dans la foulée, j’ai été placé en réa où il ne restait plus que deux lits sur les 24 disponibles, on m’a mis sous perf’ et après, j’ai un blanc de dix jours. Par la suite, j’ai appris que ce jour-là, en France, il y avait eu 12 hospitalisations et 8 morts. C’était le tout début de l’épidémie.»

«Endormi avant le confinement et réveillé après»

À sa sortie du coma, le 20 mars, le praticien, atteint d’une pneumopathie bilatérale, ne comprend pas ce qui lui arrive et découvre progressivement que la France est confinée. Sportif, il apprend que tous les matches et compétitions sportives ont été arrêtés, que la France vit au ralenti. «Je n’avais plus été à l’hôpital depuis mon internat. C’était d’ailleurs ma première hospitalisation : j’ai été intubé, extubé puis réintubé. J’étais extrêmement fatigué, c’est vraiment le souvenir qui me restera. Je ne pouvais rien faire sans être dépendant des autres. Tout était un effort. Je n’avais plus de mollet, j’ai perdu 12 kg. Mon cas a fait peur à beaucoup de gens qui se sont rendu compte que ça pouvait arriver à tout le monde et pas seulement aux personnes âgées ou fragiles comme on le disait au début de l’épidémie.»

«Peur de mourir différée»

Nouvelle étape le 22 mars avec son transfert vers le service des maladies infectieuses. «J’avais perdu le goût, je vivais au ralenti. Je ne pouvais pas sortir de ma chambre. Tout le service était Covid et ça n’était que le début de l’épidémie qui commençait à monter en puissance. Les médecins attendaient la vague une dizaine de jours après.» Pour le praticien, pas question de polémiquer sur le manque de masques… Conscient, aujourd’hui, que la mort l’a frôlé, il pense aux médecins et soignants qui n’ont cessé de côtoyer ce virus et de voir des patients mourir. Il a une pensée plus particulière encore pour les deux médecins messins, toujours hospitalisés en réanimation à Mercy, dans un état très grave. «Le déconfinement, il faut le faire avec tact et mesure en fonction de l’évolution des chiffres. J’ai eu de la chance dans mon malheur mais il faut être très prudent», conclut Gilles Meunier qui reprendra le chemin de son cabinet médical dès le 2 juin.

Delphine Dematte (Le Républicain lorrain)

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