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Fusillade de Metz : des familles foudroyées


Le quartier Boileau est sous le choc. (photo RL)

Le plomb a parlé, samedi à Metz-Nord, et foudroyé plusieurs familles. Celle de Céline Royer, abattue sur le trottoir, et d’Anthony Lavialle, toujours entre la vie et la mort.

La sœur de Daniel Lavialle habite le quartier Boileau, dans le Nord messin, depuis des lustres. «Mais elle a peur. Elle sait la violence qui y règne.» Samedi soir, Patricia a entendu plusieurs détonations en bas de sa tour. Elle a aussitôt posté sur sa page Facebook quelques lignes  : « Encore des coups de feu dans ce quartier de fous. » À ce moment-là, elle ignore que les balles viennent de faucher ses deux enfants. Céline Royer, 22 ans, a été touchée d’abord dans le dos. Elle s’est effondrée et n’a pas réussi à se mettre à l’abri. Jean-Ludovic Gbetie l’a achevée, à bout portant.

Anthony Lavialle, son demi-frère de 25 ans, a été hospitalisé à Nancy. Atteint à la tête par une balle de 9 mm, il « se trouve entre la vie et la mort », confie l’oncle des victimes. « Lundi, il a fait plusieurs infections. Il a déjà perdu un œil. S’il s’en sort, dans quel état sera-t-il… Au milieu de tout ça, on n’oublie pas les autres familles touchées. » Florian Vrevin, 18 ans, et Edik Mouradov, 64 ans, ont également été grièvement blessés dans la fusillade.

Daniel Lavialle est le seul membre de la famille à pouvoir mettre aujourd’hui des mots sur cette épreuve. « Nous sommes six frères et sœurs. On entoure Patricia, la mère des enfants. On tient le coup pour elle, pour Anthony. Elle s’accroche à la vie parce que son fils est encore là. Elle est à ses côtés tous les jours, elle lui parle. »

Des obsèques «dignes»

La maman attend la restitution du corps de sa fille. L’autopsie doit avoir lieu demain. « J’ai commencé les démarches auprès des pompes funèbres , dit l’oncle. J’ai 51 ans et je gère les funérailles d’une jeune de 22 ans. Ce n’est pas l’ordre des choses. C’est horrible… »

Lorsque le corps sera remis à la famille, une autre épreuve l’attend  : offrir à Céline un enterrement « digne ». Avocat de la famille, M e Miroslav Terzic a saisi la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) dans l’espoir d’avoir une avance sur l’indemnisation. « La justice s’est montrée réceptive , indique le conseil. Maintenant, il faut que ça se concrétise. » Un élan de solidarité autour de ces parents en détresse lui offrirait aussi un ballon d’oxygène. « Ma sœur ne veut pas que Céline finisse au carré des indigents. Il ne faut pas… », insiste Daniel Lavialle.

En parallèle, la famille s’est constituée partie civile hier. Me Terzic ne peut pas encore répondre à toutes ses interrogations. « Ils veulent savoir, comprendre comment on a pu arriver à un enchaînement aussi effrayant. Cela apparaît tellement gratuit… J’ai rarement vu ça ici. Pourtant, je me dis, en découvrant le passé du tireur, qu’il y avait des signes. Cela pose question, forcément. » La vie de Céline n’a pas tenu à grand-chose. Jean-Ludovic Gbetie s’est incrusté une première fois dans l’après-midi parmi les jeunes, rue Pierre-et-Marie-Curie. Il est revenu le soir, pendant qu’ils buvaient un coup. Le ton serait monté lorsqu’on lui a dit qu’il n’y avait pas de bière. Anthony Lavialle lui a demandé de partir. Le quadragénaire, qui a été mis en examen lundi pour assassinat, tentative d’assassinat, crime suivi ou précédé d’un crime et incarcéré, était revenu armé et avait tiré. À de nombreuses reprises.

« Céline, une fille très discrète, agréable, et Anthony étaient inséparables. Là où Anthony se trouvait, elle était. Ils étaient forcément en train de boire un verre ensemble et de discuter , souligne encore Daniel Lavialle. Et voilà… Maintenant, elle n’est plus. On ne vivra plus de moments heureux avec elle. Je ne sais pas si l’on pourra encore vivre d’autres moments heureux au sein de notre famille. Le tireur a tout brisé. »

Kevin Grethen (Le Républicain lorrain)