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Frontaliers : la fin programmée du télétravail les… travaille


Le 1er janvier prochain au Grand-Duché, le télétravail redeviendra ce régime d’exception limité à 29 jours par an conformément à la convention fiscale franco-luxembourgeoise de 2018 (Photo : Pierre Heckler, le Républicain Lorrain).

Au Luxembourg, le télétravail retrouvera son rôle secondaire le 1er janvier prochain. De quoi rendre perplexes de nombreux frontaliers plus épanouis avec le rythme de travail actuel. Certains s’interrogent même, à haute voix, sur la suite à donner à leur carrière.

« Lorsque je me rends sur l’open space, deux fois par semaine, je ne peux m’empêcher de penser que tout est déjà prêt pour notre retour… » Clara, la quarantaine, le sent. Le sait, même : d’ici peu, le 1er janvier précisément, le télétravail devrait être remisé sur une voie de garage. En attendant peut-être mieux, il redeviendra ce régime d’exception, limité à 29 jours par an conformément à la convention fiscale franco-luxembourgeoise signée en 2018. Un retour au monde d’avant précipité par… « la fiscalité ! Voilà sur quoi on se base pour abandonner un système qui fait ses preuves. Finalement, que retire-t-on de cette crise sans précédent ? Rien ! »

La Mosellane, qui œuvre pour un grand cabinet d’audit, paraît dépitée. « Revenir en présentiel cinq jours par semaine, retrouver les bouchons sur l’autoroute, avoir la peur au ventre de ne pas finir assez tôt pour récupérer mes enfants ? Non, tout ça, c’est fini pour moi. » Tout plaquer, revenir exercer au pays, en France : elle sait que la menace sera difficile à mettre à exécution. « Bien sûr, le salaire me retient. Mais j’ai pris tellement goût à ce rythme… »

« A force, lorsqu’on est pris dans le quotidien du frontalier, on s’oublie soi-même »

« Moi aussi, j’ai retrouvé du sens à la vie… » Mary, 25 ans, employée dans les télécoms au Luxembourg, ne faisait pas partie de la caste majoritaire des frontaliers essoufflés. « Les transports, se lever tôt, rentrer tard… En quatre ans d’exercice au Luxembourg, j’ai toujours pensé que cela faisait partie du deal ». En juin dernier, la mise en place d’un fonctionnement hybride au sein de sa société (« deux jours de présentiel, le reste en télétravail ») a replacé certaines activités en haut de la liste de ses priorités : « Le sport, les sorties entre amis… A force, lorsqu’on est pris dans le quotidien du frontalier, on oublie tout ça. On s’oublie soi-même, presque. »

Le télétravail lui permet d’ouvrir cette parenthèse personnelle qui ne lui semblait pas si vitale auparavant. Et ce, sans que cela n’influe sur sa production professionnelle : « Au sein de la société, on a tous gagné en productivité et en positivité », affirme la responsable de projet. Qui a toutefois bien conscience des limites du dispositif : « Le volet formation n’est pas simple à suivre à distance, c’est un fait, concède-t-elle. Par contre, les réunions se révèlent bien plus productives : n’étant pas sûr de revoir physiquement son interlocuteur dans la semaine, on aborde les choses d’une manière exhaustive. » La perspective prochaine de revenir en arrière lui a fait prendre une décision : « Dès que l’opportunité se présentera, je changerai de job. Et j’inscrirai ce rythme de travail en haut de mes conditions personnelles. »

« Accepter de redescendre d’un échelon »

Cas particulier. Mais totalement d’actualité. L’année dernière, Laetitia a claqué la porte à deux décennies d’exercice au Grand-Duché. Un poste « bien rémunéré, valorisant, qui poursuivait la mise en œuvre de projets pour des pays en voie de développement. » Mais à l’aube de la quarantaine, il était temps pour cette habitante de Basse-Ham de rattraper le temps perdu : « Les transports, à la fin, cela devenait anxiogène. Je perdais trois heures aller-retour. Trois heures que je ne consacrais pas à ma fille, à ma vie personnelle ».

Laetitia s’est alors posé cette question simple avec son époux : « De combien avons-nous besoin à la fin du mois pour être heureux ? Quitter ce genre d’emploi, c’est accepter de redescendre d’un échelon. Et dans mon cas, je ne regrette pas ce sacrifice. » Certains pourraient pendre cette même résolution le 31 décembre à minuit…

Jean-Michel Cavalli (Le Républicain Lorrain)

4 plusieurs commentaires

  1. Finies les vacances!

  2. Il faut déjà avoir les moyens de s installer au luxembourg ?

  3. Si les bouchons font peur aux frontaliers il y a aussi l’option de devenir résident et de participer encore plus à l’économie du pays en y dépensant pour ses loisirs, son shopping etc.

  4. Super, dés la fin du télétravail, les frontaliers vont se ruer sur les maisons à la frontière et la mienne va doubler de prix! 😉