La volonté de compensation financière pour assumer la main-d’œuvre frontalière du Luxembourg franchit une étape en Allemagne. Selon nos confrères du Trierischer Volksfreund, c’est désormais le ministère des Finances de Rhénanie-Palatinat qui demande à Berlin d’enclencher des négociations avec le Grand-Duché.
Une lettre était partie en mai, à destination de la chancellerie, signée par le maire de Trêves, Wolfram Leibe, et les dirigeants des Landrats de Trèves-Sarrebruck et du Bitburg.
Il s’agissait, en partenariat avec le maire de Metz, Dominique Gros, de demander aux États respectifs d’enclencher des négociations avec le Luxembourg, pour obtenir une compensation financière permettant d’assumer l’afflux des frontaliers (+9 000 en 2018/2019, soit environ 22 500 nouvelles personnes en Lorraine/Sarre/Wallonie, dans la fourchette basse 1 actif = 2,5 personnes dans le foyer).
En effet, du côté français comme du côté allemand, les élus font le constat d’une stagnation économique des territoires : les entreprises s’installent majoritairement au Grand-Duché, mais il faut accueillir une main-d’œuvre de plus en plus nombreuse (jusqu’à 70% d’actifs frontaliers dans certaines communes).
Un cran au-dessus
Dans l’édition en date du jeudi 17 octobre, nos confrères du Trierischer Volksfreund expliquent que le dossier est désormais dans les mains du Land. Un cran au-dessus donc, en lien direct avec le ministère des Finances fédéral. L’article relate également la réponse succincte faite par Angela Merkel aux élus locaux : la chancelière souhaite d’abord attendre les travaux de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur la question pour agir. Ce qui semble perçu comme un paravent par les élus de terrain, qui souhaitent que le dossier avance.
L’article note également que l’Allemagne a déjà conclu de tels accords frontaliers avec la Suisse, la France et l’Autriche.
Fiscalité biaisée à la frontière
Le Luxembourg compte 47 000 frontaliers allemands et 105 000 frontaliers français. À eux deux, ces contingents représentent plus de 33% des actifs du Luxembourg. Avec les frontaliers belges, le taux monte à 47% des actifs soit presque un travailleur sur deux.
Prélevés sur leurs impôts sur le revenu à la source au Luxembourg, ils alimentent de façon substantielle le budget de l’État du Grand-Duché, qui atteindra d’ailleurs des montants record pour 2020. Ils alimentent aussi le budget via la création de richesse dans leurs entreprises et les taxes que prélève l’État dessus (IRC, ICC, etc.) Leur apport est colossal, et se chiffre en milliard d’euros chaque année.
Ces frontaliers sont pourtant globalement à la charge des territoires voisins (éducation des enfants, équipement culturel ou sportif, infrastructures routières et sanitaires, etc.) Les impôts locaux qu’ils payent éventuellement ne suffisent pas à dynamiser le territoire : ces impôts constituent d’ailleurs une forme de « double-peine » par rapport aux actifs résidents au Luxembourg, qui non seulement profitent d’un budget étatique très confortable (nourrit avec les impôts de tous, dont les frontaliers), mais en plus ne payent pas ou très peu d’impôt locaux au Grand-Duché.
Hubert Gamelon