Une table ronde sur le thème du travail s’est vite transformée en tribune pour l’OGBL, qui a critiqué certaines orientations du gouvernement en la matière. Hélas, le ministre Nicolas Schmit n’était pas là pour répliquer.
Je pense qu’environ 50 % des salariés d’Algrange sont frontaliers », estime le maire d’Algrange, Patrick Peron. Des salariés à qui il faut faciliter la vie : « Notre rôle est de permettre aux frontaliers de se dégager des soucis de manque de temps, à cause des horaires de travail et des transports… Ça passe par un certain nombre d’investissements en infrastructures, mais aussi par des services. On est par exemple sur un projet de garde d’enfant, car la demande augmente d’année en année. »
Ce syndicaliste est le maire communiste d’Algrange, ville mosellane de 6 300 habitants, située à une petite demi-heure du Grand-Duché. Il participait à une table ronde vendredi, dans sa commune, dans le cadre du troisième salon des Frontaliers français. L’OGBL, qui organisait l’évènement, était représenté par Jean-Claude Bernardini, membre du bureau exécutif. Le sénateur de Moselle et maire de Talange, Patrick Abate, était également présent… mais Nicolas Schmit, le ministre luxembourgeois du Travail, a dû décliner à la dernière minute. « Dommage , remarque Jean-Claude Bernardini, car certaines questions lui auraient donné du fil à retordre. » Cette table ronde a en effet tourné autour de la thématique du travail. Extraits :
Temps de travail
Au Luxembourg, la loi PAN (plan d’action en faveur de l’emploi) encadre depuis 20 ans le temps de travail. Une loi qui doit être prochainement révisée. Or ce texte est basé sur une promesse non tenue, a plaidé le membre du bureau exécutif de l’OGBL : « Quand la loi PAN a été introduite, à la fin des années 90, cela devait être fait en contrepartie d’une réduction du temps de travail, qui ne s’est jamais réalisée, on est toujours à 40 heures par semaine. Plus même, car quand on se base sur les chiffres Eurostat, on est sur un temps de travail réel de 41 heures. »
Si on ajoute à cela la « dérégulation et la flexibilisation exagérée du temps de travail » apportées par cette loi, alors, selon l’OGBL, sont « absurdes et inacceptables les revendications des employeurs », qui désireraient « davantage de flexibilité négative en matière d’heures de travail et l’élargissement de la période de référence » du temps de travail (la durée normale de travail des salariés est actuellement de 8 heures par jour et 40 heures par semaine).
Compte épargne-temps
L’idée de l’introduction au Luxembourg du système de compte épargne-temps (qui permet aux salariés d’accumuler les heures et jours travaillés en trop pour les transformer en congés ou en rémunération) a été mise sur la table il y a une dizaine d’années, mais cette proposition « a été détruite », résume Jean-Claude Bernardini. « Maintenant, le gouvernement dit qu’il travaille sur un nouveau projet, mais s’il doit ressortir dans un contexte pro-libéral et patronal, il vaut mieux qu’il reste enterré. »
Patrick Peron : « Cela existe et cela fonctionne en France. Généralement, ces comptes sont utilisés pour bénéficier d’une retraite anticipée, parfois de trois ou six mois. »
Préretraite-solidarité
Jean-Claude Bernardini a critiqué une des mesures du paquet d’avenir du gouvernement, qui prévoit la suppression de la préretraite-solidarité. Elle permet aux salariés du secteur privé âgés de 57 ans de quitter la vie active, tout en touchant une indemnité de leur employeur. Lequel peut bénéficier d’une participation financière de l’État, à condition qu’il embauche au moins un demandeur d’emploi, ou un apprenti, en contrepartie.
Mais ce système n’aurait « jamais réellement fonctionné », comme l’expliquait en juillet dernier le ministre Nicolas Schmit.
« L’argument de l’État était de dire que ça coûte cher et que c’est peu utilisé, car les entreprises ne respectent pas la législation. Or, plutôt que de punir ceux qui ne respectent pas la loi, on décide de supprimer le compte », critique le syndicaliste. « Pourtant, les salariés qui aujourd’hui ne partent pas en préretraite seront peut-être demain malades ou invalides, parce qu’ils ont continué à travailler, et ça coûtera aux caisses de l’État. Mais au Grand-Duché, on fait de la politique à court terme, qui répond surtout aux besoins des entreprises », assène librement le syndicaliste. Faute de détracteur!
Romain Van Dyck