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En Moselle, la réplique d’un paquebot de croisière cherche un nouveau cap


Cindy Francisco (à droite) et Cathy Maka posent devant la réplique du paquebot "Majesty of the Seas". Photo : AFP

« C’est l’héritage de notre père » : les proches de François Zanella, le mineur mosellan qui a construit la réplique du paquebot « Majesty of the Seas », cherchent, malgré les difficultés, à donner un nouveau souffle à ce bateau de 33 mètres, à quai depuis des années à Sarreguemines.

Écluse 26, à la sortie de la ville. Quelques bateaux amarrés tanguent légèrement sur le canal de la Sarre. Parmi eux, la longue silhouette du « Majesty » (33,5 mètres de long, presque 5 de large) attire immédiatement le regard.

« Il a été conçu pour naviguer sur les canaux de France et d’Europe », glisse Christophe Francisco, 48 ans, gendre de François Zanella, le concepteur de cette maquette géante, décédé en 2015.

Passionné de paquebots, cet ancien mineur lorrain a passé plus de dix ans à assembler dans son jardin de Morsbach (Moselle) la réplique exacte au 1/8e du bateau de croisière de la Royal Caribbean.

« L’histoire du coin »

À force d’opiniâtreté, et avec quelques coups de pouce (comme ces pièces données par les Chantiers navals de l’Atlantique), son rêve se concrétise le 23 juin 2005, avec la mise à l’eau à Sarreguemines du « Majesty ». Des milliers de personnes assistent à l’événement, très médiatisé.

Les Zanella sillonnent ensuite pendant plusieurs années rivières et canaux, jusqu’à ce que François, dont la santé diminue, se décide à le mettre en vente. Il décède en mai 2015 à 66 ans, sans que son bateau ait trouvé repreneur.

Depuis, le « Majesty » ne navigue plus. Et, fatalement, subit les assauts du temps. « On vient régulièrement pour voir si tout se passe bien », mettre de l’antirouille çà et là, changer des joints, explique Christophe. « On le lave à peu près une fois par an. C’est du travail, les gens n’imaginent pas… »

Si les peintures extérieures montrent des signes d’usure, l’intérieur est en très bon état, de la salle à manger au salon en passant par les trois chambres et la salle de bain.

« Il n’est pas à l’abandon ! », insistent les filles de François Zanella, Cindy, 36 ans, et sa sœur Cathy, 46 ans.

Après la mort de François Zanella, « on a cogité pour savoir ce qu’on allait faire », reconnaît Christophe. Il est de nouveau mis en vente, là encore sans succès. Et puis, les dernières paroles du « patriarche » finissent par s’imposer, « comme une évidence » : à la fin de sa vie, il avait suggéré « de le mettre sur un terrain familial », à une trentaine de kilomètres de Sarreguemines, avec l’idée d’en faire un lieu de visite et d’expositions, relate Cindy.

« Ce bateau, c’est l’histoire du coin, celle d’un bassin minier. Et il a été fait par un mineur », insiste Cathy.

Mais le projet s’avère complexe – et coûteux. Il faut en effet arracher à l’eau les 102 tonnes du « Majesty » et les transporter sur plusieurs dizaines de kilomètres.

« Héritage »

En 2017, la famille tape donc à la porte des collectivités locales pour d’éventuelles subventions, en vain. « Nous restons ouverts pour que les gens coopèrent avec notre projet », insiste l’époux de Cindy.

À la mairie de Sarreguemines, on explique ne pas avoir de nouvelles du dossier « depuis quatre ans ». La ville, qui avait soutenu la mise à l’eau, avait été « très impliquée », notamment en fabriquant « des fondations spéciales » pour la grue qui avait servi au levage du bateau, rappelle-t-on.

Directeur du port sarregueminois, Jean-Yves Haus dit ignorer l’évolution du projet mais « respecte » le choix de la famille. S’il regrette que le « Majesty » ne navigue plus, il estime que « le plus important », c’est qu’il « entame une autre vie ».

La famille le reconnaît : le projet peine à avancer, et le Covid n’a rien arrangé. « On fonctionne avec de l’argent privé, des dons », explique Cindy.

Selon Christophe, sur un chiffrage initial de 200.000 euros, « on a économisé » environ 100.000 en faisant plusieurs choses « nous-mêmes », comme l’entretien du bateau ou la mise en état du terrain qui doit l’accueillir, il l’espère en 2023.

« On fait tout ce qu’on peut pour mener à bien l’héritage de notre père », insistent Cathy et Cindy. « Le but, c’est de le ramener chez nous ».