Un mois après l’annonce de la fusion entre TotalEnergies et le groupe tchèque EPH, les salariés de la centrale à charbon Émile-Huchet, exclus de ce mégadeal, craignent que leur outil ne profite pas de la conversion au biogaz promise. Entraînant la suppression de leurs emplois. Et la fin d’une ère à Saint-Avold.
C’était le 17 novembre dernier. Les salariés de la centrale Émile-Huchet découvraient la fusion entre TotalEnergies et EPH, la holding énergétique du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky qui détient la filiale GazelEnergie en France.
Un mégadeal à 10,6 milliards d’euros qui va permettre de hisser le groupe dirigé par Patrick Pouyanné au troisième rang des producteurs européens d’électricité à partir de gaz.
Sur le papier, le business est considéré comme l’affaire de l’année. Mais dans les faits, le territoire est-mosellan y perd des plumes. Le périmètre de la nouvelle entreprise exclut la centrale à charbon, toujours dans l’attente de sa reconversion au biogaz.
Les salariés laissés dans le flou
«Pour nous, ce partenariat, ce n’est pas de l’audace, c’est du pillage pour le site de Saint-Avold», dénonce Thomas About, délégué CFDT à la centrale Émile-Huchet. Car dans cette joint-venture, les investisseurs raflent au passage le site de stockage d’électricité par batterie de 35 MW, inauguré en décembre 2024 au pied de la tour aéroréfrigérante.
Zéro emploi mais une rentrée d’argent de plusieurs dizaines de millions d’euros par an, qui devait permettre de faire face aux années de reconversion de la centrale.
Sans ces revenus liés aux batteries, la crainte des salariés est de voir GazelEnergie abandonner le projet de biogaz. Condamnant le site naborien et ses salariés.
Ce dernier mois, rien n’a permis de rassurer les employés. Et ce, malgré les tentatives d’entamer un dialogue avec TotalEnergies. «Sa direction reste sourde, muette et fuyante.»
Du côté de GazelEnergie, les réponses souhaitées n’ont pas non plus été apportées. «Nous faisons face à des dirigeants fantômes. Tout ceci se déroule au nez et à la barbe de la direction française. Aujourd’hui, les décisions se prennent à Prague», déplore Thomas About.
«Nous avons déposé le 5 décembre un droit d’alerte économique. Quatre pages recto verso de questions ont été adressées à la direction. Dix jours plus tard, nous avions une réunion du comité social et économique (CSE). Nous avons fait face à une série de non-réponses.»
En gros, le flou est total et sans doute, c’est ce que l’on devine en tout cas en filigrane, à tous les échelons de la filière française d’EPH. Sollicitée, la direction n’a pas donné suite à notre demande.
Des actions menées dès le mois de janvier
Malheureusement habitués à de multiples revers, les salariés de la centrale se disent prêts à entamer un énième bras de fer pour préserver leurs emplois. «Lorsque le dialogue s’arrête, c’est souvent que les problèmes commencent et je regrette ce mois de silence», déplore Thomas About.
Des actions devraient être menées dès le mois de janvier pour donner de la visibilité à leur combat. Là encore, le soutien des élus est attendu, comme cela a déjà été le cas lors des précédentes luttes. «On a plus que jamais besoin d’eux. On les sait avec nous.»
Ce nouveau coup dur intervient alors qu’en avril dernier, l’Assemblée nationale avait validé, à l’unanimité, la conversion de la centrale à charbon au biogaz.
Le décret de la loi dite de Saint-Avold devrait d’ailleurs être publié avant la fin de l’année. Il devait ouvrir une nouvelle perspective au site naborien… Qui semble plus que jamais s’éloigner.
Mélanie Courte
(Le Républicain lorrain)