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Cambriolage post-mortem à Maizières-lès-Metz : les larmes de la honte


Le suspect a brisé une vitre pour pouvoir accéder à l'intérieur de l'immeuble. (Photo : Archives RL)

Deux Maiziérois cogiteront en prison le vol avec effraction et le recel d’objets appartenant à leur défunt voisin. La maison du disparu avait été pillée une semaine après son décès. Devant les juges, les larmes ont coulé à flot.

Lorsque Hacène Sadi pénètre dans la maison de son voisin, en pleine nuit, le 24 septembre dernier, à Maizières-lès-Metz, il sait que personne ne viendra troubler ses affaires. Qu’il a toute la nuit, voire bien plus. Et pour cause, l’octogénaire qui vivait là a quitté définitivement les lieux. Atteint d’une grave maladie, ce voisin, connu de tout le quartier, apprécié des petits comme des grands, a fini par succomber. Le décès est si récent que la maison est restée en l’état, bouclée comme lieu d’investigations des enquêteurs qui doivent, comme l’exige la procédure, confirmer les causes de la mort.

Le cambrioleur ne s’est pas déplacé pour rien ; n’a pas brisé deux fenêtres pour des clopinettes : la maison regorge de petits trésors : 19 louis d’or, des pièces en argent, 3 000 € de numéraire, une montre à gousset en argent, un ordinateur portable…

Les rumeurs post-mortem, propagées par quelques langues bien pendues, sur « c e voisin qui gardait beaucoup d’argent chez lui et des objets de valeur », étaient donc avérées. Il paraît même que 50 000 € étaient cachés dans le congélateur.

Mais les ouï-dire ont cette particularité de ne cesser de circuler. Très vite, la nouvelle de la disparition de l’octogénaire gagne le quartier en même temps que les doutes assaillent la famille du cambrioleur. Il faut dire que ce dernier dépense beaucoup, sa copine tout autant. Belles fringues et grand train finissent par interpeller l’entourage. Un proche du Maiziérois voit déjà la honte s’abattre sur toute la famille et décide alors de faire part de ses soupçons aux autorités. Le début d’une enquête que les gendarmes de Maizières et leurs collègues de la brigade de recherches de Metz bouclent en quelques jours seulement. Les agences de rachat d’or sont une première piste fiable qui mène les gendarmes tout droit chez Hacène Sadi et son ami, José Da Cunha. Le premier a fomenté le cambriolage nocturne ; le second, recélé les objets de valeur. Certains ont été vendus, d’autres offerts ; le cauchemar commence pour trois familles voisines…

Lundi, devant le tribunal correctionnel de Metz, les foudres se sont forcément abattues sur le duo, principal acteur de ce scénario aussi réel que sordide. Le receleur, en larmes, a mille fois demandé pardon tandis que le voleur a lui aussi ressassé ses regrets. « Mais vous le connaissiez ce voisin ? , a interrogé, effaré, le président du tribunal. Et ça ne vous a pas arrêté ! »

3 500 €. C’est la somme totale que les deux hommes seraient parvenus à se partager après avoir écoulé la marchandise. Les prévenus l’assurent : jamais, ils n’ont mis la main sur 50 000 € dans le congélateur. Seul le salon a été fouillé. Le tribunal en doute, le ministère public, ulcéré, n’en a cure. « Les héritiers préparaient les obsèques pendant qu’on vidait la maison du défunt ! , a tancé Émeline Dannenberger. On regrette aujourd’hui, mais tout ça n’était pas si clair en garde à vue. » Huit et trente mois de prison sont requis, avec maintien en détention.

« Oui, toute cette histoire est dérangeante , a insisté Me Zouaoui pour la défense de Sadi. M ais mon client n’a pas une vie comme on l’imagine. Il marche à la méthadone après des années d’addiction aux drogues dures. Rien n’est simple dans sa vie ». L’avocat de Da Cunha dit sa surprise : « Douze mois de prison pour 3 500 € ! , rappelle Me Damien Grayo. On a vu, ici, des condamnations moindres pour bien pire ». Son client, au casier quasi vierge, a un job, une vie jusqu’ici plutôt bien rangée. « Il est coupable d’avoir accepté une dette, rien d’autre. Parce qu’il a toujours été là pour son ami lorsqu’il avait besoin de lui. » Des plaidoiries plutôt musclées qui ont fait descendre la jauge des réquisitions. Quatre mois de prison ont été prononcés à l’encontre de José Da Cunha tandis que Hacène Sadi a écopé d’un an. Le maintien en détention a été prononcé dans les deux cas. Seul le receleur verra sa peine bientôt aménagée en semi-liberté. Pour aller travailler.

S.-G. Sebaoui (Le Républicain Lorrain)