L’incident a eu lieu lors d’une formation de candidats militaires au camp Lagland, à Arlon. Un jeune soldat a tiré sur un autre. L’affaire vient d’être débattue au tribunal correctionnel.
Une bêtise sans nom, un « jeu » de cow-boy et Indiens. Les qualificatifs n’ont pas manqué, lundi, devant le tribunal correctionnel de Marche qui a à juger un incident s’étant produit le 25 juillet 2018 au camp militaire Lagland, à Arlon. Lors d’une journée d’exercice de tir, un jeune soldat avait tiré dans le dos d’une autre jeune recrue avec son arme. Il pensait qu’elle n’était pas chargée.
Les deux jeunes soldats, qui avaient intégré l’armée depuis trois mois, avaient terminé leur exercice. Le premier, la victime, avait fait mine « par jeu » de tirer vers son collègue de peloton. Mais son arme était sécurisée.
Le second avait répliqué, mais avait été surpris, car une munition se trouvait dans l’arme. La victime avait été admise en soins intensifs. Aujourd’hui encore, outre les séquelles physiques, elle souffre toujours de traumatisme psychologique et doit abandonner tout espoir de carrière militaire. Le tireur a, lui, été écarté par l’armée.
Devant le tribunal, il doit répondre de coups et blessures par défaut de prévoyance ou de précaution. Mais il n’est pas le seul à devoir s’expliquer. L’État belge est aussi cité comme potentiellement civilement responsable.
L’avocat du tireur, Me Renaud Duquesne, a de son côté lancé une citation directe envers le sergent moniteur de tir qui supervisait la formation au camp d’Arlon, et a donc voulu que celui-ci s’explique en correctionnelle.
Pour le ministère public, la hiérarchie est hors de cause
L’État belge, via son avocat, tout en déplorant le « jeu », impute la responsabilité au tireur qui n’a pas observé des règles de base dont le fait qu’il faut toujours considérer une arme comme étant chargée ou encore ne pas viser quelqu’un. L’État réclame déjà 61 000€ de réparation au tireur, car les salaires ont dû continuer à être payés.
« Le renforcement des tests psychologiques reste une leçon à retenir du côté de la Défense », a dit l’avocat de l’État.
Le ministère public estime, lui, que le respect d’une seule des règles de base aurait permis d’éviter l’incident et que rien ne peut être reproché à la hiérarchie ou au formateur. Au contraire du soldat qui a tiré, envers qui cinq mois de prison avec d’éventuelles mesures de faveur sont réclamés.
Le sergent, devant le tribunal, souligne que les exercices de tir sont basés sur la confiance accordée aux candidats et que tous doivent maîtriser les règles. Il demande son acquittement.
Au final, seul l’avocat du tireur voit une responsabilité au niveau de l’encadrement, puisque les armes n’avaient pas été inspectées par le formateur. « L’armée, la Grande Muette, protège ses hommes, et nous sommes face à une injustice avec audace et platitude », a lancé Me Duquesne, provoquant la réaction des autres parties.
Pour l’avocat, qui dit défendre « un préposé », reconnaître une responsabilité a un autre niveau, bien que son client admet sa faute, signifierait que celui-ci ne doit pas endosser seul les conséquences civiles. Le prévenu sollicite la suspension du prononcé. Jugement le 4 février.
Sébastien Etienne (L’Avenir)