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Basilique Saint-Vincent de Metz : nouvelle cathédrale pour l’électro ?


La Metz électronique, organisée par l’association Sutter Event, a pris ses quartiers dimanche à la basilique Saint-Vincent jusqu’à 20 h du soir. Après quoi, les adeptes ont poursuivi par un after au Café Chic et Queens de Metz. (Photo : Républicain Lorrain)

Ce dimanche pascal, des DJ ont remplacé le prêtre en installant leurs platines sur l’autel de la basilique Saint-Vincent. Sacrilège pour certains, géniale pour d’autres, l’appropriation des lieux par la scène électro fait du bruit !

Il est 17 h et les cloches de la cathédrale sonnant les vêpres nous poursuivent jusque dans le quartier des Isles. Ici, les rues sont désertes. La basilique Saint-Vincent, désacralisée depuis 2012, n’appelle plus ses fidèles. C’est une autre messe qui y est célébrée en ce dimanche pascal, annoncée par des vibrations sourdes qui semblent faire trembler les vitraux. À la porte, comme à l’entrée d’une discothèque, deux vigiles contrôlent les sacs mais pas l’état des chaussures. La nef gothique est dans la pénombre, c’est depuis le chœur que déferle le son. Nous voici au festival de La Metz électronique. Les DJ Qatataq, Mercure right now, Madar se sont succédé aux platines. À présent, c’est Mehdi C, arrivé le matin même de Nice, qui officie, une croix dorée sur la poitrine, devant une trentaine de danseurs.

Un spot magique !

« C’est un spot magique ! J’adore sa beauté, son énergie. C’est splendide ! », scande Irénée Sutter, l’organisateur. Pour discuter avec ce jeune homme de 20 ans, étudiant à l’Institut des administrations des entreprises (IAE) de Metz, déjà patron de twentytoo22.com, sa marque de prêt-à-porter, et accessoirement animateur sous le pseudonyme DJ Néné, on s’assied dans les fauteuils rouges de récup installés dans le transept, face à la buvette. « Le seul char avec de la musique électro du Père Cent, il y a trois ans, c’était moi. » Les Trinitaires, en décembre, où l’on a vu 500 adeptes de techno, de trap, de hip-hop danser dans l’ancien couvent, c’était encore lui. Lui et son association Sutter Event.

Il a obtenu les clés de la basilique Saint-Vincent pour sa troisième édition. « Metz, ce n’est pas que la fête de la mirabelle ! », hurle le jeune boss à notre oreille. « On a le capital : Blida – où il a d’ailleurs installé ses bureaux – la BAM, les Trinitaires. Et ici, c’est le futur ! »

Ici, en pleines fêtes de Pâques, le concept en décoiffe certains : « Ils auraient pu enlever la statue du Christ quand même », bougonne un passant. « Personnellement, je n’aime pas trop cette musique. Ouvrir l’église à l’art et la culture est une bonne chose, mais il ne faut pas y faire n’importe quoi », argumente Anne-Marie Klein, vice présidente des Amis de la basilique Saint-Vincent qui organisent régulièrement des visites de l’édifice.

En tout cas, la brèche est ouverte. Les élus locaux misent sur l’art contemporain et les musiques actuelles pour rajeunir l’image de l’agglo. Des scènes électro émergent même si elles ne sont pas si nombreuses. Et la basilique fait partie des lieux à conquérir.

Le premier jalon avait été posé lors de La Nuit Blanche 2010 organisée en partie dans l’église abbatiale alors « désaffectée au culte public ». Où la foule s’était déhanchée sur les samples de Chapelier Fou au milieu des ballons roses géants d’Anya Gallacio gonflés à l’hélium. L’un d’eux, tel une immense bulle de chewing-gum, avait été coincé dans la chaire du curé. Le public avait adoré… ou détesté !

On a vu aussi les danseurs de la compagnie Corps in situ installer des écrans TV un peu partout. L’été dernier, le Festival musique et numérique Ondes messines avait pris ses quartiers sous la nef. « Géniale » pour les uns, « sacrilège » pour les autres, cette appropriation des lieux a l’avantage de faire vivre l’édifice. « Ce festival électronique, c’est le mélange de la tradition et de la modernité », s’enthousiasme, Marie-Odile, qui n’est autre que la maman de l’organisateur venue « danser avec les jeunes ». « C’est une forme de résurrection pour cet endroit où il n’y a plus de vie. »

Céline Killé (Républicain Lorrain)