Le Sénat entame mardi l’examen en première lecture du projet de loi relatif aux compétences de la nouvelle « Collectivité européenne d’Alsace », qui promet des discussions animées entre les sénateurs du Grand Est.
Cette collectivité (CEA) doit rassembler en 2021 les compétences du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, ainsi que « de nouvelles compétences » concernant notamment la coopération transfrontalière, le bilinguisme, le tourisme, la mobilité ou la culture. Les deux préfectures actuelles seront maintenues à Strasbourg et à Colmar. Elle répond, en vertu d’un accord signé à Matignon le 29 octobre entre le gouvernement et les élus alsaciens, à une volonté de remettre en valeur une forme officielle d’Alsace, diluée dans la région Grand Est.
Le projet de loi « préfigure le droit à la différenciation » entre territoires, a souligné Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires, lors de sa présentation en conseil des ministres fin février. « Comme tout compromis, ce texte suscite de vives insatisfactions », a relevé la rapporteure Agnès Canayer (LR), lors de l’examen en commission des Lois. De la part de certains Alsaciens, qui souhaitent carrément la sortie de la région Grand Est, et de la part des autres élus de la région, qui demandent à disposer des mêmes avantages que la CEA.
« Des usines à gaz »
« Ce texte ne satisfait personne », a estimé François Grosdidier. Il « vise à régler le problème pour deux millions d’Alsaciens », mais « aggravera la situation du million de Mosellans », a grondé le sénateur LR de Moselle, revendiquant pour les Mosellans, et plus largement tous les Français, « les mêmes droits qu’aux Alsaciens ». Le centriste Yves Détraigne (Marne) a fustigé « un bricolage qui calmera le jeu pendant quelque temps mais donnera des idées à d’autres régions ».
La commission a adopté le texte, avec 23 amendements, dont un changement de dénomination, ce qui a déjà fait débat. La « collectivité européenne d’Alsace » est devenue « département d’Alsace », via un amendement PS. « Je ne voudrais pas qu’on induise en erreur les Alsaciens par une publicité mensongère ! », a argumenté Jacques Bigot (Bas-Rhin). Jacqueline Gourault a clairement annoncé lundi sur Public Sénat l’intention du gouvernement de rétablir « ce qui était dans l’accord ».
Quelque 150 amendements ont été déposés avant l’examen en séance, notamment par Jean-Louis Masson (Moselle, non-inscrit), pour qui « on est en train de créer des usines à gaz ».
LQ/AFP