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À Plombières-les-Bains, une économie suspendue à l’avenir des thermes


Pour cette année, aucune réservation n'a été prise.

« C’est obligatoire que ça continue »: à Plombières-les-Bains, historique cité thermale vosgienne, l’avenir des thermes, qui a fait l’objet d’une audience au tribunal de commerce de Bobigny mercredi, inquiète habitants et commerçants.

La juridiction se prononcera le 29 janvier sur le sort de ces thermes, gérés par l’entreprise Avec, qui rencontre des difficultés financières, a indiqué Bernard Bensaïd, le président du groupe. Les bains sont en redressement judiciaire, avec le risque qu’une liquidation judiciaire soit ordonnée.

Dans un fond de vallée vosgienne, la ville « aux mille balcons » accueille l’élégant bâtiment des thermes, de style Second Empire, qui était encore en activité lors de la dernière saison thermale, jusqu’à début décembre.

Mais pour cette année, aucune réservation n’a été prise.

Au cœur de cette petite cité de 1 600 habitants, en ce jour de janvier, peu de commerces sont ouverts et rares sont les habitants à braver la pluie, mais tous ceux rencontrés sont catégoriques: la fermeture des thermes serait un désastre pour l’économie locale.

« L’activité thermale est centrale à Plombières », abonde la maire de la commune, Lydie Barbaux. « C’est une ville thermale depuis toujours, puisqu’elle a été créée grâce aux eaux chaudes, qui ont été découvertes par les Romains. » La cité elle-même s’est construite « autour de ces eaux et de leurs utilisations ».

Société d’économie mixte?

Montaigne, Voltaire, Joséphine, Berlioz… Sans remonter jusqu’aux célèbres curistes des siècles passés, un retraité se souvient des années où « les militaires venaient, tous frais payés, soigner leurs maladies » après la guerre d’Algérie. A cette époque, « il y avait une trentaine de cafés » et les hôtels étaient tous remplis, souligne-t-il.

Aujourd’hui, de nombreux hôtels sont toujours présents, mais « la plupart sont fermés », pointe un commerçant, qui ne veut pas être identifié.

En novembre, la Nouvelle société des résidences Napoléon, entreprise du groupe Avec chargée de l’hôtellerie-restauration, a été placée en liquidation judiciaire. Le Grand Hôtel, qui jouxte le centre de cure, a dû fermer ses portes, de même que son restaurant. Deux autres résidences ont subi le même sort, laissant une dizaine de salariés sans emploi.

Pour Bernard Bensaïd et François Vannson, président du conseil départemental des Vosges, les thermes pourraient échapper à ce triste sort avec la création d’une Société d’économie mixte (SEM), où les collectivités réaliseraient, aux côtés d’Avec, les investissements nécessaires.

Mais la mairie et les habitants « ne veulent plus voir le groupe Avec et Bernard Bensaïd à Plombières », résume Guy Laurent, membre du collectif « Action pour Plombières », qui a déjà mené plusieurs mobilisations pour la sauvegarde des thermes… mais avec un gestionnaire différent.

Bernard Bensaïd affirme avoir injecté « 13 millions d’euros en 13 ans » dans la station thermale. Et les deux sociétés ont perdu en moyenne 500 000 euros par an, selon lui, depuis 2011.

Des investissements que la maire dit ne pas voir, déplorant l’état des bâtiments dont le groupe est propriétaire.

«Choc psychologique»

Depuis deux ans, Avec ne paie plus la location des eaux thermales, qui appartiennent à la commune, précise Mme Barbaux.

Calodaé, un centre balnéo-romain ouvert au grand public et qui permettait de donner vie, chaque weekend, au centre-ville, a fermé en 2020.

« Les Plombinois ont du mal à se projeter sans activité thermale. Quand l’activité thermale est en péril, c’est un choc psychologique pour les habitants », explique la maire, évoquant « une dépression collective » en 2020, lorsque les thermes ont fermé durant le Covid.

Depuis, la situation est compliquée. Les cures, qui accueillaient 400 personnes en simultané, n’en accueillent plus que 100 à la suite de travaux réalisés mais mal dimensionnés, ce dont Avec a réfuté, en décembre, être responsable.

Les thermes, déjà placés en liquidation judiciaire en 2011, avaient pu renaître grâce à leur reprise par DocteGestio (devenu Avec). Mais depuis 2021, les comptes ne sont plus publiés, signale Guy Laurent.

Plombières a longtemps été la première station thermale des Vosges, accueillant encore dans les années 2010 environ 4.000 curistes par année thermale.

D’une manière générale, les cures avaient encore en 2023 du mal à retrouver leur succès d’avant crise sanitaire. Elles sont proposées dans près d’une centaine de villes en France. Malgré le scepticisme d’une large partie du corps médical, elles promettent de soigner diverses maladies grâce aux bienfaits supposés des eaux locales, ainsi que des programmes d’exercices physiques et de kinésithérapie.

« On est dans le creux de la vague, c’est difficile, mais profitons-en pour imaginer l’avenir », souhaite Lydie Barbaux.