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A Metz, un lycée tente la « classe inversée »


Les élèves de Première ES lors d'une "classe inversée" le 22 avril 2016 à Metz. (Photo : AFP)

Dans une salle spécialement aménagée d’un lycée de Metz, une vingtaine d’élèves s’installent et sortent leur ordinateur : hier soir, ils ont regardé en ligne le cours magistral, ce matin, ils vont faire des exercices. Ici, la classe est «inversée».

Depuis la rentrée, la classe de Première ES pratique cette pédagogie, dite «inversée»: les professeurs postent sur un site internet dédié une petite vidéo qui résume le cours magistral, appelée «capsule». Une fois en classe, les élèves mettent en pratique ce qu’ils ont vu en faisant des exercices. Plus qu’inverser la pédagogie, il s’agit de la rendre active, explique Pierre Rodriguez, professeur de sciences économiques et sociales, l’une des chevilles ouvrières du projet.

Déjà essayée par petites touches dans plusieurs classes en France, la méthode est testée sur toute l’année et dans toutes les matières à Metz. Anne Boyard, la proviseure, très impliquée dans le projet, n’a en tout cas entendu parler d’aucune autre initiative d’une ampleur similaire. Après sept mois d’expérience, celle-ci semble concluante. Il a fallu créer une partie des ressources pédagogiques, apprendre à utiliser les logiciels pour réaliser les capsules, repenser la salle de classe pour qu’elle s’adapte au travail en groupe.

Si elle ressemble de loin à n’importe quelle autre salle, avec ses murs violet et son tableau blanc, la classe inversée est connectée: le sol est truffé de prises, pour que chacun puisse brancher son ordinateur et se connecter à internet. Le professeur de technologie a aussi été mis a contribution pour dessiner des tables modulables qui permettent de travailler en groupe. Au total, la mise en place du dispositif -largement soutenu par la région- est évaluée à 1 000 euros par élève.

« Dix fois mieux »

Comme dans toute les classes, lorsque ça sonne, les élèves s’installent. Mais ici pas de rangées: des ‘ilots’ accueillent les élèves par petits groupes. Après avoir demandé si tout le monde a bien regardé la capsule de la veille, M. Rodriguez donne les consignes des exercices du jour. Chaque groupe se concerte à voix basse, les claviers cliquettent. Pas d’onglet Facebook ou Twitter sur les écrans: la classe est étonnamment sage.

«A nous de rester concentrés, de ne pas aller sur internet», explique Assma: «surtout qu’il y a le bac à la fin de l’année». A sa table, personne n’aimerait revenir à une classe normale, même si le nouveau système a, selon les élèves, aussi ses défauts. Par exemple «en histoire, les vidéos et les exercices, ça manque un peu de grand récit, c’est presque que des études de cas», regrette Dylan.

A l’autre bout de la salle, Jaouad est catégorique: «c’est dix fois mieux». Et pourtant, «le travail à la maison est décuplé, ça se voit tout de suite si on n’a pas travaillé». Peu d’élèves arrivent sans avoir fait leurs devoirs. «Sinon on se sent exclu parce que tout le monde travaille», explique Dylan, dont les notes ont bondi entre l’année de seconde et celle de première.

La «pression sociale» et le travail collaboratif font partie des facteurs de réussite, reconnaît M. Rodriguez. Alors que 5 élèves sont passés en première contre l’avis du conseil de classe, aujourd’hui il n’y a quasiment pas d’absents et très peu de retards, assure-t-il. Le cas échéant, le logiciel permet théoriquement aux professeurs de vérifier si les élèves ont bien regardé les vidéos. Mais il ne s’agit pas de surveiller, martèle Anne Boyard.

Quand on évoque certains articles universitaires qui assurent que la pédagogie inversée augmente les écarts –notamment sociaux– entre les élèves, M. Rodriguez et Mme Boyard assurent qu’il n’en est rien chez eux.

«On a fourni les ordinateurs, vérifié que tout le monde avait une connexion suffisante à la maison», explique la proviseure. «L’école ne va de toute façon pas, d’un coup, gommer les différences», abonde M. Rodriguez, «mais le numérique permet de gommer les écarts». Pour les élèves en tout cas, même si «certains profs sont mieux que d’autres», comme partout, la salle est devenue «une deuxième maison». «On sort même plus à la récré», sourit Claire.

Le Quotidien/AFP

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