Lors du scrutin de ce dimanche, certains expatriés vont voter pour la première fois au Luxembourg. Rencontre avec deux d’entre eux.
Depuis cette année, les expatriés au Luxembourg ne sont plus obligés d’attendre cinq ans avant de pouvoir s’inscrire sur les listes électorales. Les non-ressortissants ont la possibilité de le faire dès leur arrivée au Grand-Duché et ils sont un peu plus de 50 000 à avoir franchi le pas à l’occasion des élections communales de ce 11 juin. Exactement 50 084, sur 252 464 électeurs soit 19,8 % (voir encadré), vont participer au scrutin ce dimanche.
Parmi ces derniers, certains glisseront pour la toute première fois un bulletin dans l’urne au Luxembourg. «C’est quelque chose d’extraordinaire», s’exclame Rui, Chinoise habitant le Grand-Duché depuis sept ans. «J’apprécie cette opportunité qu’on nous accorde, cette possibilité de s’exprimer. Cela fait un moment que je vis ici et je me sens très proche de ce pays et de ses habitants. Je suis enchantée d’avoir la chance de voter.»
Une véritable découverte pour la jeune femme qui n’a jamais eu l’occasion de donner son opinion par le vote. «Je ressens beaucoup de curiosité pour cette première. Je prends le temps de découvrir les choses.»
Rui plonge dans un monde électoral au sein duquel elle a quelques difficultés à s’immerger. Candidats, programmes, idéaux, noms des partis… Pas évident pour la ressortissante chinoise, malgré sa volonté, de trouver les informations qui la guideront vers un choix le jour J.
«C’est mon grand problème», avoue-t-elle. «Il me reste quelques jours pour étudier les programmes. Je vais aussi parler avec mes voisins qui sont luxembourgeois et qui pourront m’aiguiller, m’aider à suivre.»
En votant, je participe à construire le collectif
Mahmoud, un Égyptien de 36 ans, pourrait bien lui donner un coup de main sur le sujet. Habitant à Differdange depuis septembre 2021, le jeune homme n’est pas passé par quatre chemins pour obtenir des informations sur les candidats. L’étudiant au sein d’un master en gouvernance européenne a tout simplement empoigné son téléphone et interpellé les différentes têtes de liste depuis Instagram.
«J’ai contacté le CSV, déi Lénk, le LSAP, le DP… Tous sauf l’ADR, car leurs idées m’effraient. Tous ont répondu à mes questions sur la politique qu’ils souhaitent mener», détaille l’expatrié.
Certain de vouloir poursuivre sa vie ici, Mahmoud a, comme Rui, une véritable envie de participer à la démocratie luxembourgeoise. «Je veux acquérir la nationalité et en votant, je participe à construire le collectif, à élaborer notre société. Avoir une voix, c’est important pour créer l’avenir», appuie-t-il.
En 2011, Mahmoud était en Égypte lors du soulèvement populaire qui abouti au départ de l’ancien président Hosni Moubarak. Par la suite, il a voté lors des législatives de fin 2011 puis à nouveau en 2012, avant de s’abstenir en 2013. «La situation n’était pas propice à la démocratie», souffle-t-il.
Nous attendons des actes concrets
Depuis leur arrivée, un peu par hasard au Luxembourg, Rui et Mahmoud se sont immiscés dans la société luxembourgeoise. Née en Chine, passée par la France, Rui vie à présent dans le quartier Gare de la capitale. Si sa connaissance des programmes est encore à faire, elle fixe un thème à traiter en urgence, un thème en prise avec sa réalité : la sécurité.
Dans la ville, et notamment à Bonnevoie et à la Gare, ce sujet s’impose comme l’un des enjeux majeurs des élections communales. Les infractions y ont bondi de 20 % entre 2021 et 2022. «J’ai pu constater de plus en plus de problèmes sociaux. On doit se sentir protégés. J’ai déjà été suivie et insulté par un homme en rentrant chez moi», raconte-t-elle.
Sur ce front en particulier, élus locaux et ministres se cassent les dents, tandis que la peur s’installe chez les habitants. «Nous devons faire face à ce problème. Les politiques ont de belles paroles, mais nous attendons des actes concrets. Ils doivent résoudre ou, au moins, améliorer la situation.»
Toujours entre son domicile à Differdange et les couloirs de l’université du Luxembourg à Belval, Mahmoud voit dans le regard des expatriés, l’opportunité d’aborder de nouveaux angles sur le débat politique. Il souhaite voir des idées d’ouverture émerger de ces élections. «Les grands thèmes qui sont importants pour moi sont l’intégration, la diversité, je suis ouvert à toutes les idées, toutes les cultures, toutes les nationalités.»
Il conclut sur l’un des grands sujets qui anime les débats du pays et qui prend une autre dimension pour les expatriés : le logement. «Je considère que c’est ici que je veux vivre et je voudrais être sûr de trouver un toit au Luxembourg.»
Les étrangers peu mobilisés
Malgré la campagne «Je peux voter» organisée par le gouvernement, les résidents étrangers ne semblent pas décidés à passer aux urnes. Émaillée de nombreux projets, cette campagne a pourtant employé les grands moyens pour intéresser les non-Luxembourgeois à ces élections locales.
Mais la mobilisation des communes et des associations n’aura pas aidé à atteindre les 23 % des dernières communales de 2017. Ils ne seront que 50 084 électeurs sur 252 464, soit 19,8 %. Dans le détail, ce sont, sans surprise, les résidents de longue date qui sont les plus intéressés par le scrutin avec 27,2 % d’inscrits, un chiffre qui tombe à 15,3 % pour les personnes résidant au Grand-Duché depuis 5 à 9 ans et à 11,8 % pour celles installées depuis moins de 5 ans.
pas expatrié, luxo, et dernier! vote il y a +- 20 ans!